Bon, ça suffit maintenant ! Il y en a marre de toute cette guimauve, de cet émerveillement béat devant les niaiseries infantiles quotidiennes de mes rejetons !
Je lève l’étendard de la révolte maternelle, j’envoie tout péter et JE ME CASSE, comme Thelma et Louise (note pour moi-même : penser à regarder ce film, un jour), en laissant toute la clique de marmots avec leur parent n°2 – je veux dire, leur père et beau-père !
Ciao, à moi la virée en Italie !
Peut-être même avec des copines qui comme moi en ont ras la casquette, cheveux au vent dans une décapotable sur des routes bordées de cyprès, dans le doux soleil de fin d’après-midi et le verre de chianti accompagné de prosciutto en fines tranches, sur la place bruissante à la tombée de la nuit.
Ah Ah ! On fait moins les malins maintenant, hein ? Plus personne à vampiriser, bandes de chauves-souris assoiffées de sang maternel ! Si vous avez besoin de quoi que ce soit, demandez à Nestor. Tenez, allez-y ! Nestor ? Nestoooooor ? Une tototte sur un plateau d’argent, s’il vous plaît mon brave !
… Non, rien. Dommage, il n’y a pas de domestique mes chéris !
Il va donc falloir retrouver ta tototte tout seul comme un grand, mon petit lapin. Non, inutile de me regarder avec tes grands yeux pleins d’eau levés vers moi et les coins de ta petite bouche qui retombent. Je reste de marbre. Demande à ton père. Moi, je pars en Italie.
Mes chers enfants, je pars, je vous aime, mais je paaaaars, vous n’aurez plus de mèèèèère, ce soir…
Non, pas le temps pour un dessin, pas le temps pour un devoir, ni pour cuire les pâtes, je me casse, je me casse, je me casse vous dis-je ! Débrouillez-vous sans moi ! Ces jours-ci, ce sera sevrage intégral de maman et stage commando d’autonomie. Non mais, si je ne suis pas mère célibataire, il y a bien une raison, non ? Je vous donne un indice : en changeant quelques lettres à « Maman », ça fait… « Papa ».
Tenez : pour que ce soit plus clair, je vous fais un petit schéma explicatif :
Voilà.
Mes chéris, à la semaine prochaine !
Aaaaaaah, enfin seule. Via, via, vieni via con me…
Que mettrai-je sur ma to-do liste, pardon, ma lista-a-fare ?
- Acheter des chaussures en cuir à Florence,
- Y contempler David le sublime,
- Assister au Palio à Sienne,
- Manger une bruschetta devant le Panthéon à Rome, et aussi des artichauts à la romaine,
- Flâner dans le musée du Vatican,
- Visiter la chapelle Sixtine seule,
- Faire le tour du Colisée à fond la caisse en Vespa rouge,
- Me tordre le cou pour admirer la voûte de la chiesa del Gesù,
- Manger une glace rococo sur les escaliers de la Trinita dei Monti,
- Appeler mon chéri et lui dire de me rejoindre, finalement,
Quoi les enfants ? Ça va, ils se débrouilleront seuls pendant 48h, non ? Allez, soyons fous ! Un petit week-end à Rome, tous les deux sans personne…
Comment ça, je parle seule ? Attends, je me lave les mains et je sors.
Hé ho les mouflets, si je ne peux même plus rêvasser cinq minutes à voix haute dans les toilettes !
Non ma chérie, je ne suis plus énervée. Qu’est-ce-que je disais ? Rien, rien du tout. Je me reposais. Je suis partie en voyage. Oui, dans les toilettes.
Ne lève pas tes sourcils comme ça, ma chérie. Je ne suis pas folle, je t’assure. Les mamans ont des super-pouvoirs, tu sais, dont celui de voyager dans les toilettes, l’espace d’un instant.
Les plus beaux voyages sont parfois intérieurs.