Il y a quelques mois, à la terrasse d’un bistrot, le passant en promenade a pu surprendre une scène joyeusement banale : quatre amies attablées autour d’un café, quatre femmes en âge d’être grand-mères. C’étaient trois de mes amies de longue date et moi, qui nous sommes retrouvées plus de 25 ans après notre rencontre. La simplicité de nos échanges m’a touchée. Plus besoin de paraître, de se cacher : chacune était là avec ses joies, ses peines et la richesse de tous ces chemins parcourus ensemble depuis si longtemps.
L’amitié vraie, belle, unique, fidèle !
Je ressens une immense gratitude pour ce moment hors du temps. Gratitude pour toutes ces amies qui partagent ma vie et me font voir plus loin, plus haut, plus beau. Gratitude pour toutes celles qui me connaissent depuis 10, 20, 30 ans et plus, celles qui sont là et celles qui n’y sont plus. Celles qui partagent ma vie au quotidien, et les fidèles que je croise de loin en loin. Comme une escale lors d’un long voyage, un havre de paix au milieu des tempêtes, une main tendue quand je suis perdue, une oreille attentive à mes détresses, une épaule sur laquelle pleurer. Et toujours celles avec qui je peux rire, sourire, parler, échanger sur tout et rien et refaire le monde jusqu’au bout de la nuit !
Mais comment les ai-je rencontrées, ces fameuses amies ?
N’allez pas vous imaginer que ces rencontres ressemblent à celle du Petit Prince et du renard, tout en poésie et/ou comme un conte de fées.
Non, clairement, la réalité, parfois, s’éloigne de la grande littérature ou des dialogues à la Audiard. Elle est souvent beaucoup plus basique. Chez moi, au fil des années, ça a pu donner :
— T’es nouvelle au collège, tu viens d’où, tu t’appelles comment ?
— Bonjour… (j’avais 14 ans et ça faisait une semaine que je croisais tous les jours cette fille, à marée haute, sur la même planche à voile que moi…) Elle est devenue 20 ans plus tard la marraine de ma dernière fille.
— Votre mari travaille ici ? — Oui, il est élève officier. Aïe, avais-je pensé, le mien est instructeur, ça ne pourra pas coller… 32 ans plus tard, on ne s’est pas perdues de vue.
Sur la plage, au parc, au square :
— Il est très mignon votre petit garçon, il a quel âge ? C’est votre petite fille sur le toboggan ?…
À l’école/collège/lycées de mes enfants :
— Vous venez aussi à la réunion de parents de la 4ème B ? — Ah votre fille est dans cette classe. Moi c’est mon fils !
— On s’est déjà vues non ? — Je crois que c’était à la sortie du cours de danse de nos filles.
— Vous venez d’arriver dans cette ville ?
— Vous habitiez où avant ?
— Vous avez des enfants ?
— Vous faites quoi comme travail ?
— Vous connaissez les horaires d’inscription à la piscine ?
— Vous voulez venir prendre un café à la maison ?
— ….
Bref, rien de bien original ni de très spirituel. La vie quoi ! La phrase bête qu’on finit par dire parce qu’on en a marre d’être toute seule et qu’il faut bien dire quelque chose pour entrer en contact avec les gens. Avec la peur du ridicule ou celle de déranger. Et souvent en face, le soulagement de celle qui n’attendait que ça, qu’enfin une d’entre nous ose briser la glace.
Dans vos mails, chères Fabuleuses, je lis souvent que vous n’avez pas d’amie et ne savez pas où et comment faire des rencontres.
Je sais d’expérience, pour avoir déménagé souvent, combien se retrouver seule sans connaître personne pèse lourd. J’ai essayé de me souvenir des lieux où j’avais rencontré mes amies :
- L’école, c’est souvent le meilleur endroit pour rencontrer d’autres mamans
- Les associations de parents d’élèves
- Les clubs de sport, de randonnées
- Les écoles de musique, dessins, d’art sous toutes ses formes
- Les lieux de culte
- Dans certaines villes, la mairie organise des rencontres avec les nouveaux arrivants (Les associations comme les AVF [Accueil des villes françaises] qui proposent des tas d’activités)
- Les chorales
- Les groupes de paroles et d’échanges pour les mamans
- Et bien sûr : le lieu de son travail
Arrive le plus difficile pour moi, et certainement pour vous aussi les Fabuleuses :
le premier pas, le premier échange !
Il s’agit de se lancer, d’oser lancer l’une des phrases dont je parlais plus haut. Mais le jeu en vaut la chandelle !
Peu importe finalement la manière dont on s’est rencontrées. L’important c’est le bout de chemin que j’ai parcouru avec elles et que je parcours encore.
Toutes les amitiés ne se ressemblent pas, certaines sont légères, d’autres plus profondes. Les promenades avec amies et enfants ont occupé de nombreux mercredis après-midi ! Bibliothèque tournante, échanges de conduites scolaires, club de sport, randonnées ou cours de dessin m’ont donné la chance de nouer de nouvelles amitiés.
J’ai expérimenté aussi le fait qu’on pouvait être amie en salle de sport ou à la sortie de l’école
mais qu’on n’était pas obligé de partir en vacances ensemble ni de partager les mêmes opinions. On a le droit aussi d’élever ses enfants en faisant ses propres choix et tant pis si l’autre autorise les dessins animés le matin alors que tu es pour le 0 écran total jusqu’à tel ou tel âge. Ces différences de point de vue m’ont parfois dérangée, quand j’étais plus jeune. J’ai longtemps cru qu’il fallait tout partager, être d’accord sur tout, faire les mêmes activités pour être amie.
Alors que l’amie est celle qui t’accepte comme tu es, sans jugement,
celle que j’accueille en retour avec toute sa richesse et sa différence. Là sont les vraies amies. Avec elle je peux oser être moi, être vulnérable, montrer mes failles et même me disputer, avec la certitude qu’on aura les mots pour s’expliquer. Dans les coups durs, je peux compter sur elles et elles sur moi.
Au fil du temps restent les grandes amies, qui comptent pour moi d’une manière spéciale.
Les amies sont un cadeau de la vie. L’amitié fait parfois peur, elle nous engage. Et les amies ne nous laissent pas indifférentes, elles nous dérangent parfois, nous poussent dans nos retranchements, mais toujours nous changent en bien et nous font devenir meilleures. Elles font grandir le cœur !
Chère Fabuleuse, n’aie pas peur d’oser l’amitié, d’oser la rencontre, de tendre la main et de lancer « tu veux bien devenir mon amie ? »