Enfin, le déconfinement pointe son nez ! Vous commencez à imaginer la reprise de la crèche ? Vous allez être obligée de reprendre le travail ? Pour vous, la reprise des moyens de garde serait un soulagement ?
En dehors des questions légitimes concernant la sécurité et l’adaptation des locaux, vous craignez peut-être qu’après 2 mois ou plus sans vous quitter, ce soit vraiment difficile pour votre enfant.
Je suis pédiatre, je suis retraitée, je pense à vous les fabuleuses jeunes mamans qui essayez de préparer au mieux cette transition.
Pour que tout se passe bien, la reprise aura besoin d’une préparation réfléchie.
Votre enfant a moins de 3 ans :
Le fait marquant du confinement brutal a été la disparition incompréhensible des personnes-clés de son entourage. Cette situation peut avoir créé un sentiment d’abandon, d’insécurité, même si vous êtes restée en permanence avec lui.
Il a vécu sans les comprendre le stress ambiant, les inquiétudes de beaucoup de parents pour la santé des proches, pour leur travail.
Pour les moins de 8-9 mois, le retour à une vie « normale » sera probablement assez simple, à condition de refaire une adaptation progressive, d’au moins 2-3 jours, avec dans l’idéal quelques demi-journées ou journées courtes.
Eux ne se posent pas encore de questions.
Ni sur le temps que le confinement a duré, ni sur les masques, ni sur la peur de ne pas respecter les gestes barrières. Pour eux, la reprise sera comme après de très longues vacances. Seul le masque porté par les adultes à la crèche sera nouveau.
Pour les 9 mois-3 ans, la situation risque d’être plus délicate, selon ce qu’ils ont vécu pendant le confinement, selon leur caractère, selon qu’ils ont des frères et sœurs, etc…
Pour les chanceux qui ont pu profiter d’un jardin, d’espace, et de la présence permanente de leurs parents, la séparation demandera une réadaptation, mais celle-ci devrait être relativement facile si vous pouvez éviter qu’elle soit brutale.
Mais d’autres ont vu disparaître soudainement presque tout leur environnement familier : assistante maternelle, équipe de la crèche, copains bien sûr, mais aussi grands-parents souvent très présents en temps normal, baby-sitter, amis, voisins, commerçants etc..
Je pense particulièrement aux mamans solos, et à leurs tout-petits, surtout celles qui vivent dans un petit espace ; leur bébé a du coup renforcé son lien fusionnel et exclusif avec elles. Ces mamans n’ont jamais pu faire de pauses, n’ont jamais pu souffler ! Après 2 mois seules, isolées physiquement et parfois socialement, ces mamans peuvent être épuisées, voire proches du burn-out. Pas idéal pour reprendre le travail !
Ce que vivent les enfants :
Selon leur caractère – et selon l’état de leur maman -, on peut penser que certains vont avoir développé une forme de peur que de nouveau tout le monde disparaisse tout à coup, et surtout leur maman, bien sûr.
Ils peuvent avoir intégré le fait que, à tout moment, tout le monde peut disparaître !
Je pense à S.,2 ans, dont la maman est seule avec lui depuis le début du confinement, dans un petit appartement parisien. Pendant leurs sorties quotidiennes, il refuse de marcher ou d’utiliser sa draisienne. Il veut rester sur ses épaules, en contact physique avec sa maman. A-t-il peur qu’elle disparaisse si il s’éloigne tant soit peu ? C’est probable.
Et J., 2 ans aussi, qui, par visioconférence, demande à ses grands-parents de voir les jouets qu’il connaît et qu’il aime dans leur maison. Il a besoin de vérifier que les choses existent encore telles qu’il les connaît
Si beaucoup, dès cet âge, réclament la crèche ou leurs grands-parents chéris, pour autant il faudra probablement du temps, du tact et de l’empathie pour qu’ils puissent sereinement se séparer de nouveau de leur maman.
Peut-être avez-vous pu garder contact avec l’assistante maternelle, avec l’équipe de la crèche, tout au long du confinement ? C’est bien sûr le mieux.
La difficulté pour les structures d’accueil est de proposer des solutions adaptées à chaque situation, chaque famille, et pour les parents d’être dans l’observation et l’écoute attentive des réactions de leur enfant.
Que peut-on prévoir pour que tout se passe bien ?
Mieux vaut, sans stress, anticiper et s’organiser.
- Si vous ne l’avez pas encore fait, essayez de reprendre contact avec les personnes qui s’occupent de votre bébé, pour réfléchir ensemble à ce qui semble possible ou non. Essayez qu’il entende leur voix, ou qu’il les voie en visio-contact.
- Parlez-en de plus en plus avec votre bébé, redites-lui les noms des adultes, des copains.
- Essayez de lui remettre en mémoire l’organisation habituelle de ses journées. Détaillez les moments qu’il vit quand vous travaillez, comment se passe le matin, le départ de la maison, l’accueil, les jeux et les jouets qu’il aime, le repas, le sommeil, le retour le soir à la maison. Faites revivre dans son esprit la crèche, l’assistante maternelle, les copains.
- Reprenez peu à peu les horaires de lever, d’habillage, de bain. Ca vous sera utile à vous aussi pour vous remettre en mode « fonctionnement habituel ».
Le cerveau humain est incroyablement adaptable – nous l’avons tous encore vérifié pendant cette période de confinement – mais c’est au prix de beaucoup d’efforts et de fatigue. Chaque fois que possible, l’anticipation facilite les changements et épargne de l’énergie. Dans cette idée, voici une piste :
Préparer un « calendrier visuel » du déconfinement.
Vous pouvez le faire de plein de façon très simple : des carrés sur une feuille, et on barre ou on colorie un carré par jour, des cartonnettes découpées et collées sur un carton fort ou des magnets sur le frigo.
L’idée est que votre tout-petit, à partir de 18 mois environ, puisse visualiser le temps qui reste « AVANT » : avant d’aller à la crèche, avant de revoir telle ou telle personne.. et qu’il réalise que ce temps diminue chaque jour.
L’idée est de trouver un système où l’on peut “enlever” un jour chaque matin (les petits comptent toujours en nombre de “dodos”), ou sur lequel on cache les jours passés. N’hésitez pas à le faire participer, avec quelque chose de concret à faire lui-même : coller le papier qui veut dire « jour fini » ou enlever du frigo le magnet d’hier.
Selon l’âge, pas la peine de le faire plus d’une semaine ou 10 jours avant l’évènement que vous voulez préparer.
Nous y voilà enfin :
nous pouvons recommencer à imaginer reprendre une partie de nos vies « normales » ! Je vous souhaite un déconfinement suffisamment sécurisé et joyeux !
N’oubliez pas de fêter tous les petits moments de plaisir retrouvés !
Ce texte nous a été transmis par Martine de Vigan, médecin de PMI retraitée, auteur du blog La Naissance des mamans.