Chaque enfant redispatche l’équilibre familial - Fabuleuses Au Foyer
Vie de famille

Chaque enfant redispatche l’équilibre familial

famille dans la foret
Agathe Portail 4 décembre 2023
Partager
l'article sur


Chère Fabuleuse, où en es-tu, dans ce grand jeu de l’oie de la maternité ?

Premier enfant, deuxième, troisième, plus ? Si tu es ici, c’est probablement que pour toi, l’entrée en maternité s’est faite façon boule à neige : toi, ton Fabuleux et ton bébé avez été retournés par la main facétieuse de la vie afin que tous les flocons qui couvraient le sol décollent et retombent leeennnnnteeeeement pour la plus grande joie des spectateurs qui trouvaient ce spectacle magnifique, vu de l’autre côté du globe en verre. Oui, la maternité te secoue dans tous les sens et la neige met un certain temps à retrouver sa nouvelle place. C’est ça qui fait toute la beauté du processus, finalement. 

Cependant, après bien des ajustements, après beaucoup de dialogue avec ton Fabuleux pour désamorcer les petites grenades du quotidien, après cette salutaire prise de conscience que, oui, ta vie a changé avec l’arrivée de ce bébé, et non, elle ne redeviendra jamais comme avant, tu as peut-être l’impression fugace que, ça y est, vous avez trouvé votre équilibre.

Joie ! Joie à ne surtout pas bouder ! Mais joie à durée limitée si, comme un certain nombre d’entre nous, vous avez le projet de renouveler l’expérience en agrandissant la familia.

Je vais te dire un secret : chaque nouvel enfant fait valser de nouveau la boule à neige.

Ce qui est super chouette, c’est que tu as maintenant le recul suffisant pour avoir la certitude que tu ne vas pas passer toute ta vie agitée en tous sens par la main (toujours facétieuse) de la vie, et qu’un jour ou l’autre, ça va se calmer : la neige va retomber doucement au sol et tu retrouveras une certaine stabilité. Sauf que le paysage aura changé, parce que sur le perron de ce joli chalet sous cloche, il n’y aura plus un Fabuleux, une Fabuleuse et un bébé, mais un Fabuleux (idéalement), une Fabuleuse, un enfant et un bébé.

Non, ce nouveau venu ne va pas se glisser ni vu ni connu dans le quotidien bien rodé que vous avez tant travaillé à mettre en place.

Il va tout chambouler, imposer son caractère, ses besoins particuliers, révéler de nouvelles facettes de ton caractère, de celui de ton Fabuleux, changer ton enfant unique en grand frère ou grande sœur, bref, ça va déménager, comme pour la première fois. Est-ce que c’est grave ? Non. C’est crevant, passionnant, décoiffant, mais ce n’est pas grave. Est-ce qu’on peut sauter directement au moment où la neige est retombée sur le sol, sous les yeux émerveillés des spectateurs et de la jolie petite famille debout sur le perron du chalet ? Non.

Parce que chaque enfant nous fait grandir, c’est d’ailleurs un peu sa mission sur terre :

faire de ses parents des gens plus généreux, plus ouverts, plus affirmés, plus responsables, plus fous, plus joyeux, plus authentiques, plus doux… Et, tu t’en doutes, grandir ne se fait pas comme ça : plip, l’enfant est arrivé,  ploup, ça y est, j’ai grandi, youpi, next !

J’ai une amie très chère, qui vient d’accueillir son deuxième enfant. Elle avait traversé une belle période de turbulences à l’arrivée de son premier, parce que tout était à construire : sa place de mère, la place du père, la position des tous jeunes grands-parents, le dispatch des tâches quotidiennes, la répartition de la pression financière, le partage de l’espace dans la maison… bref, nous avions longuement discuté, et j’ai eu le grand bonheur de regarder la neige retomber doucement sur elle et sa petite famille. C’était doux et joyeux à voir.

Quand son deuxième enfant est arrivé, j’ai reçu un nouvel appel : 

– Mais, je ne comprends pas, j’ai l’impression qu’on avait tellement bien bâti notre truc avec mon Fabuleux, on était fin prêts à accueillir ce nouveau bébé, j’avais parfaitement identifié les erreurs à ne pas refaire, et bim, nous venons de nous prendre le chou en beauté ! Est-ce qu’on est revenus à la case départ ? 

– Oh ma Fabuleuse, non tu n’es pas revenue à la case départ ! C’est juste normal que ce nouveau bébé secoue tout l’équilibre : tout doit bouger pour qu’il trouve sa place à lui ! Une famille, ce n’est pas un puzzle dans lequel chaque pièce a une place aux bonnes dimensions qui l’attend ! Non, chaque nouvelle arrivée redéfinit le dessin, tout le monde bouge, se réajuste, rediscute. Ça vaut pour le deuxième, le troisième, le douzième enfant… 

– Oui mais bon, tu te rends compte, si on se frite pour ça, alors je ne donne pas cher de notre avenir ensemble !

– Oula, relax : les problèmes qui sortent en ce moment ne sont pas ceux que vous allez vous traîner tout le reste de votre vie : aujourd’hui c’est leur moment, demain ils seront beaucoup moins encombrants. Vous les digérerez doucement comme vous avez fait avec les premiers, il y a trois ans.

Si toi aussi, chère Fabuleuse, tu es en plein dans cette grande désillusion

(vous aviez si bien bossé votre nouvelle identité de parents, votre nouvel équilibre de couple !) et si tu ne comprends pas pourquoi l’arrivée de ce bébé fait tout valser, sois rassurée. C’est comme ça chez tout le monde. Au premier enfant, ça grince concernant le partage des tâches. Au deuxième enfant, ça grince sur la vie sexuelle qui se transforme. Au troisième enfant, ça re-grince sur le partage des tâches parce que ce qui tenait en équilibre à quatre ne tient plus à cinq. Au quatrième, ça grince sur la place des beaux-parents et des familles élargies, sur le degré d’autonomie à laisser aux plus grands, sur le désir fou d’acheter un paon ou une grosse décapotable… Bref, on peut continuer la liste longtemps. 

Le maître mot que tu as forcément identifié dès ton premier enfant, sans nécessairement mesurer l’importance croissante qu’il allait occuper dans ta vie, c’est “souplesse”.

Si tout grince en ce moment, c’est parce que les pièces sont en train de s’emboiter d’une nouvelle manière,

c’est bon signe, et tu connais déjà l’huile magique à mettre dans les rouages pour que tout se passe le plus sereinement possible : c’est la gratitude. Regarde le chemin parcouru depuis cette première grande engueulade lorsque votre aîné avait deux semaines. Tu peux avoir confiance en vous : vous êtes déjà en train d’y arriver.   



Partager
l'article sur


pack noel

Cet article a été écrit par :
Agathe Portail

Maman de 4 enfants (très) rapprochés et girondine d’adoption, Agathe Portail écrit des romans adultes édités chez Actes Sud, Calmann Levy et J'ai lu, mais aussi des romans historico-fantastiques édités par Emmanuel Jeunesse.

https://www.fnac.com/ia9173370/Agathe-Portail

> Plus d'articles du même auteur
Les articles
similaires
femme qui regarde dans un carton de livraison
Être mère au foyer ne correspond pas à ce que j’espérais
Parmi les femmes que je reçois, certaines font le choix d’être « au foyer ». Pour les unes, ce choix répond au[...]
métissage
Le défi du métissage
« Ah, c'est elle ta mère ? Je ne l'imaginais pas comme ça... » Tels sont les mots que j’ai[...]
Qui a dit que le troisième enfant, ça passe comme une lettre à la Poste ?
Bien sûr, à chaque nouvel enfant, chacune a eu droit aux dictons maison : le premier bébé, c’est censé être facile[...]
Conception et réalisation : Progressif Media