En 2016, féminisme ne rime plus avec liberté mais avec formatage ! C’est l’une des thèses de Thérèse Hargot, sexologue et intervenante en éducation affective et sexuelle, dans son ouvrage tout juste paru chez Albin Michel : Une jeunesse sexuellement libérée… ou presque. J’apprécie le talent par lequel Thérèse, qui a contribué au livre des fabuleuses, parvient à nos faire réfléchir au-delà des “pour” et des “contre” qui déchirent notre société sur les questions identitaires et familiales, afin de proposer une “troisième voie” capable d’ébranler enfin les stéréotypes dans lesquels nos propres mentalités nous enferment. À lire également : mon entretien avec Thérèse Hargot sur le site du Point.
Des formatages hérités de la révolution sexuelle
Pour Thérèse Hargot, “en prenant du recul sur la manière dont nous avons été éduquées, nous pouvons prendre conscience de schémas de pensées qui sont totalement aliénants, et qui nous laissent penser que réussir sa vie ce n’est que professionnel, que notre liberté se trouve dans le fait d’avoir un diplôme et un travail. Ces croyances sont en fait des moules, nous n’avons plus conscience d’y être enfermées.
En tant que parents, on veut à tout prix véhiculer à nos filles une certaine idée de l’indépendance. Les schémas de pensée actuels veulent nous mettre mal à l’aise, par exemple, avec les déguisements de princesses, nous faisant oublier qu’au travers des déguisements et des stéréotypes se joue une quête existentielle (Ai-je de la valeur ?), aussi bien pour les garçons que pour les filles (Suis-je fort ? Suis-je belle ?) Aujourd’hui, on est mal à l’aise avec ces stéréotypes alors qu’ils sont constructifs de notre identité à une certaine période de la vie.
Égalitarisme idéologique, modèles oppressants
À force de belles idées sur l’égalité entre les hommes et les femmes, nous sommes tombés dans l’égalitarisme idéologique. Ce souci d’indifférencier le traitement fait aux garçons et aux filles en espérant que l’éducation et la culture puissent les libérer de ces modèles oppressants à tout faux et est devenu lui-même oppressant.”
Que transmettons-nous à nos filles sur l’idée du féminisme, de la femme ? Est-ce que nous les poussons à s’accomplir uniquement dans leur carrière, ou au contraire est-ce que nous les enfermons d’avance au foyer ? Pour Thérèse Hargot, “les schémas de pensée se construisent très tôt, selon la manière dont les parents vont hiérarchiser, valoriser leurs différentes activités.”
Quel exemple montrons-nous à nos filles (et à nos garçons !), dans le regard que nous portons sur ceux qui ne sont pas dans la productivité ? Valorisons-nous ceux qui sortent des schémas du faire, de l’existence sociale par le travail ?
À lire pour aller plus loin : Une jeunesse sexuellement libérée… ou presque (Thérèse Hargot, Albin Michel)
À lire aussi : mon entretien avec Thérèse Hargot sur le site des fabuleuses