Elle a trois gosses, un mari, un chien, une machine à laver, un job, des cernes… et pas d’amies. Elle me dit : « Je ne connais personne. J’ai personne à qui parler. »
Personne pour lui dire « je sais », « pleure un bon coup », « je suis là », « tu vas y arriver », « je pense fort à toi », personne pour dire « ça va toi ? », personne pour écouter vraiment la réponse à la question.
Elle les voit, à la sortie de l’école, ces mamans qui se claquent la bise et qui restent un peu plus longtemps pour papoter. Elle les voit, celles qui rient aux éclats sur le trottoir ou qui se font des grands signes sur le parking. Elle baisse les yeux, direction la maison où elle va se faire couler un café avant d’attaquer sa journée solitaire.
C’est comme une scène de déjà vu : 25 ans en arrière, au beau milieu d’un cours de badminton, quand la fille la plus stylée de la classe faisait les équipes et qu’on restait longtemps, trop longtemps sur le banc.
J’ai pas le temps d’avoir des amies !
Devenir mères nous a fait basculer dans un monde impitoyable où le temps est une ressource trop rare pour être gâchée. Si déjà on a pu récupérer tous les enfants à l’heure tout en ayant pu étendre du linge et envoyer tel courrier à temps, la journée peut être considérée comme une réussite totale.
Alors où, franchement, trouver du temps pour développer des amitiés ?
J’ai perdu mes amies d’avant
On en avait, des amies, mais ça c’était avant… avant de plonger dans la maternité qui a bousculé tout ce que l’on croyait savoir – et tout ce que l’on croyait être. Avec certaines de nos amies d’avant, on n’a plus les mêmes délires (et je ne vais pas leur en vouloir de ne plus m’inviter en compagnie de ma marmaille – la dernière fois qu’on était chez des amis, les enfants ont tartiné de la mousse au chocolat sur leur écran plat ; ça me fait passer l’idée de voir du monde, moi.)
Je suis amie avec mon mec, c’est déjà bien non ?
« Happiness is being married to your best friend ».
Ça, c’est la version américaine et pinterestisée de la vraie vie.
Parce que moi, je m’entends bien avec mon homme, mais quand je pète une durite à trois heures du matin, mon homme il dort tu vois ? Et si je le réveille, il me dira : « ben t’as qu’à », et ça, c’est justement la phrase à bannir en amitié. J’aime mon mari. Mais je suis bien contente qu’il ne soit pas mon seul ami. Parce que j’ai cette chance inouïe de savoir vers quel numéro me tourner pour vider mon sac à 3h du matin, et même d’avoir une réponse à 3h01 du matin, parce que j’ai cette amie-là, qui me répondra. Le genre d’amie tout-terrain qui a tout vécu, qui ne juge rien, qui sait tout entendre et qui ne m’en veut pas quand j’oublie son anniversaire.
Il y a des sujets qui ne sont pas faciles à aborder. L’amitié en fait partie.
C’est un sujet sur lequel on s’est toutes au moins une fois cassé les dents. Et puis un jour, on devient maman. Par la force des choses (et par l’absence de sommeil), un tri monumental se fait dans nos priorités, dans nos intérêts, dans nos relations.
Et souvent, on préfère en rester là. Ne pas tenter de nouvelles prises de contact – ne surtout pas approfondir les relations existantes.
Parce qu’on a peur :
- peur de ces moments ultra gênants où on se retrouve nez à nez avec une inconnue à l’aire de jeux
- peur de ne pas être assez intéressante, et de ne pas avoir les capacités lorsqu’il s’agit de « faire la petite conversation »
- peur de ne pas être une assez bonne amie (« Je n’ai pas le temps de rendre service, je suis à bout, alors comment pourrai-je encourager quelqu’un d’autre ? »)
- peur de perdre du temps : cette pensée ancrée dans le “pas assez”, qui nous fait oublier que le temps c’est des relations, qui nous redonnent du carburant pour nous remettre à la tâche
- peur de se montrer vulnérable, de faire entrer le loup dans la bergerie, peur d’être déçue, peur d’avoir mal. Cette peur qui nous fait oublier que la vraie vie comporte toujours une part de risque… (Lire : Le bonheur est dans les relations – le malheur aussi)
L’amitié, ça fait peur.
Parce que par définition, c’est nouveau.
Parfois, la solitude est plus confortable parce qu’on se sent isolée, mais au moins, on sait à quoi s’attendre !
L’amitié, c’est toujours plus glamour vu de l’extérieur. Souvent, on a tendance à idéaliser l’amitié. L’amitié, c’est parfois tout simple, c’est souvent des petits riens, et ce n’est pas forcément toute la vie avec toujours la même personne (et là je casse le mythe de la BFF ^^)
Chère fabuleuse, j’aimerais te challenger aujourd’hui à refuser de te comparer à qui que ce soit, et à te poser ces questions-là :
- qu’est-ce qui m’empêche de lancer une conversation sur la pluie, le beau temps et le dernier film que j’ai vu, la prochaine fois que je serai à l’aire de jeux ?
- qu’est-ce qui m’empêche d’ouvrir ma maison, même non rangée, pour un café avec quelqu’un que j’ai vraiment envie de revoir ?
- qu’est-ce qui m’empêche à passer un coup de fil à quelqu’un en qui j’ai confiance, et qui est assez hors contexte pour que je puisse vider mon sac sur mes derniers déboires professionnels, maternels ou de couple ?
- à qui est-ce que j’aurais envie d’envoyer du chocolat, juste comme ça, pour dire « je suis là » ?
Il paraît qu’il faut un village pour élever un enfant… moi je dis qu’il faut un village pour soutenir sa maman.
Chère fabuleuse, tu as le droit de te sentir seule, ça ne veut pas dire que tu es moins importante, moins intéressante, ou que tu aurais moins bien réussi que les autres. Ça veut peut-être tout simplement dire que c’est le moment d’oser être toi, d’oser (ré)essayer l’amitié, à ton rythme, en sachant poser tes limites, en croyant que la vie vaut la peine d’être partagée…
Et si tu as la chance d’avoir :
- une amie qui te proposera toujours de te garder les petits quand tu as rdv chez le gynéco (et qui tient vraiment parole)
- ou une amie qui sait rire avec toi devant une vidéo à la con (parce que ouais, ça fait du bien de regarder des vidéos de chat sur youtube)
- ou une amie qui t’emmène courir une fois de temps en temps
- ou une amie qui t’appelle pour savoir comment tu vas, parce qu’elle a vu sur Facebook que ton petit était malade
- ou une amie avec qui tu peux te faire des déj en douce pendant que tout le monde est à la cantine
- ou une amie qui te répond à 3h du matin
Alors partage-lui cet article et dis-lui merci d’être là !