Elle a la tête ailleurs : un peu, beaucoup, à la folie, passionnément.
Elle est dans la lune : le corps semble être ici, mais si peu. Elle fuit.
Elle fuit la réalité qui l’étouffe, elle fuit les bruits, les odeurs, les images qui lui rappellent que toute sa vie est un peu de travers, que ses plans sont parfois freinés, tronqués, absents, que ses rêves se sont fait la malle pour la laisser avec, dans les bras, une montagne de linge à ranger.
Elle a l’échappée belle. Dans sa tête, elle prend ses jambes à son cou parce que, dans une réalité alternative, elle va mieux. Elle a tout ce dont elle a besoin.
Elle fuit, comme on plonge dans une eau profonde, dont on ne veut entendre que le silence.
Tout est feutré, tamisé, doux. Elle y est protégée, comme dans une poche à bulles.
Elle plonge, parce que s’immerger ailleurs c’est plus vivable que d’ouvrir les yeux, ici, maintenant, dans le déchirement et les grands écarts que le quotidien lui fait faire constamment. Elle veut que tout s’arrête un instant.
Alors, tout comme Alice, elle saute à deux pieds dans le terrier du lapin blanc. Elle le poursuit un instant, elle savoure l’enchantement d’un ailleurs, d’un pays aux merveilles.
Tourbillon qui l’emporte loin de l’ennui de sa vie.
Elles sont nombreuses ces mamans, à chercher ailleurs ce qui pourrait rassasier leur cœur assoiffé d’autre chose : de frissons, de paix, d’amour, de passion, de lenteur, de réconciliation, de mots doux. Elles se cherchent une vie meilleure au creux des pages, des lignes, des romans ; au cœur des photos, des posts, des récits d’autres mamans ; elles plongent dans des séries qui leur offrent sur un plateau un repas imaginaire… Un trompe l’œil qui semble faire du bien à leur âme.
Du bien ? Vraiment ?
Oui, savoir s’arracher au présent pour avoir la tête dans la lune, c’est vivre une évasion bienvenue qui peut alléger le poids du présent. Quand on s’offre cette escapade intérieure, on peut y trouver un peu de souffle, de nouvelles idées, un peu comme un voyage dont on reviendrait rassasiée, apaisée, ressourcée.
Et, oui, dans ce quotidien où notre cerveau slalome entre les tâches et les soucis, entre les plans et les empêchements, entre les rêves et la réalité, savoir s’échapper, c’est un cadeau. Savoir éteindre la lumière extérieure et rallumer la flamme intérieure, c’est un trésor. Savoir quitter ce qui semble nous aspirer tout entière pour nager librement, ne serait-ce qu’un instant, ne serait-ce que dans sa tête… c’est une force, un moment que l’on se donne.
Et pourtant…
Pourtant, parfois, avoir la tête ailleurs, c’est perdre le fil d’aujourd’hui.
Parfois, on s’enfuit trop souvent, trop longtemps, on perd le bon goût du réel. On se languit d’une vie “petite maison dans la prairie”. On rêve constamment de reprendre une pâtisserie au bord de la mer. Nos corps ne frissonnent plus que lorsque nous tournons les pages de ce polar haletant, prenant, que nous ne voulons plus poser. On vit si fort ailleurs que le retour au réel nous fait mal. On vit si bien ailleurs qu’on ne s’investit plus tellement dans le quotidien.
On fuit si loin et si longtemps qu’on préférerait vivre dans cette réalité alternative.
Et c’est là que le bât blesse. C’est là qu’on se perd dans nos échappatoires. Comme dans un labyrinthe sans fin, on a du mal à retrouver la sortie. On compare, on soupire, on voudrait vraiment tout quitter. On n’entend plus les gens autour de nous qui nous appellent, qui nous parlent. On y répond à peine.
Mais l’ailleurs avec lequel on flirte n’est que mirage. Une oasis qui fait semblant. Elle n’apaise pas notre vraie soif, ne répond pas à nos vrais besoins. Elle nous soulage un temps, elle apaise un peu nos âmes fatiguées mais, tôt ou tard, il faut rentrer chez soi.
C’est comme si on n’avait pas seulement la tête dans la lune, mais qu’on y habitait aussi, délaissant peu à peu nos foyers. Comme une maison abandonnée, notre vie s’effrite à cause du temps qu’on a passé ailleurs. Nos relations prennent la poussière, les saisons passent sans crier gare. Et le jour où l’on veut enfin rentrer chez soi, on s’y sent perdu. On se demande à qui appartient cette vie dont on n’a jamais vraiment voulu. Pourquoi ce grand canyon entre nos espoirs, nos rêves d’enfants et la réalité de notre quotidien ? C’est comme si on était partie décorer ailleurs en négligeant l’ici, le maintenant, le réel.
Parfois, il faut trouver le courage, le courage de rentrer chez soi.
Passer la porte de son présent, de qui on est, de ce qu’on a, de ce qu’on n’a pas, de qui on n’est pas. Passer la porte de chez soi et aménager son présent. Décorer, rendre vivant, rendre intéressant, vivre. Agir. Oser. Oser prendre les chemins peu ou pas empruntés mais qui sont ceux qui nous ressemblent vraiment. Dire non à ce qui nous éloigne de notre cœur, de nos envies, de notre être profond, et ouvrir les bras, dire oui, accueillir et créer ce qui nous donne le sentiment de vivre mieux… de vivre bien… de vivre enfin ! Pour être soi, chez soi !
Alors, oui, elle a la tête dans la lune, elle est toujours un peu ailleurs…
et parfois, c’est tout le bien qu’on lui souhaite, mais on l’attend ici et maintenant pour écrire et vivre à ses côtés un présent qui lui corresponde : vraiment… fabuleusement… chez elle !
Si toi aussi tu sens que tu investis l’ailleurs parce que l’ici et le maintenant de ta vie de maman te blesse, tu peux aller feuilleter le parcours d’Hélène Bonhomme et voir comment elle est passée de l’épuisement à l’imparfaite fabulosité. Un cadeau à se faire à soi ou à offrir à une maman un peu (trop) dans la lune ? Découvre le livre “Que ta journée soit belle”.