« Quel est ton poids idéal ? »
C’est le genre de question qu’on peut trouver dans les formulaires de promoteurs de solutions « efficaces, rapides et (presque) sans effort » pour avoir — enfin — un corps de rêve. Cette question sous-entend évidemment que tu es trop grosse, trop flasque et que tu ferais mieux d’éviter d’oser te mettre en maillot de bain avec l’allure que tu as.
Si seulement ça ne tenait qu’à un chiffre…
La neuroscientifique Sandra Aamodt, citée par Amelia et Emily Nagoski dans Pourquoi les femmes font des burn out ?, suggère qu’une fois arrivés à l’âge adulte, nous avons toutes et tous un « poids protégé », que notre corps défendra : il s’agit d’une tendance qu’a celui-ci à s’équilibrer naturellement. Ainsi, tu auras moins faim le lendemain d’un gros repas, ou tu mangeras comme trois après avoir fait un régime drastique pour rentrer dans cette superbe robe de cocktail pour le mariage de ta cousine. Selon cette scientifique, « seule une fraction très restreinte de la population peut perdre du poids et stabiliser cette perte de poids grâce à un régime et de l’exercice, établissant alors un nouveau poids protégé ».
Tu es tout à fait libre de te fixer ce genre d’objectif, ou bien d’écouter cette petite voix qui te supplie de te laisser tranquille avec tout ça. Ça se passe entre ton corps et toi, et c’est toi et toi seule qui peux définir ce qui va te permettre d’atteindre le meilleur équilibre possible, et — bonheur absolu — le bien-être… Dans tous les cas, pour atteindre ce que tu recherches, tu devras relever des défis au quotidien, pas seulement dans ton corps, mais aussi dans tes pensées.
Les sœurs Nagoski proposent quatre stratégies concrètes :
1/ Stratégie numéro 1 : Accepter le grand n’importe quoi
Pour améliorer la santé physique et psychique, de nouvelles approches nous encouragent à avancer vers l’acceptation de notre corps, et de sa diversité, et à l’écouter. On ne peut être que d’accord et ça a l’air facile sur le papier, mais quand on est environné en permanence par des images de la soi-disant « beauté idéale », on a tendance à développer une sorte d’ambiguïté avec son propre corps. C’est ça, le « grand n’importe quoi ». Une partie de nous-mêmes voudra toujours changer la forme de notre corps. Mais peu importe. Continuons à bouger, parce que ça fait du bien et accueillons nos contradictions avec bienveillance. Accueillons le « grand n’importe quoi ».
2/ Stratégie numéro 2 : Vous êtes la nouvelle définition du « sexy » — c’est mon passage préféré ^^
« Lorsqu’on reconstruit son propre standard de la beauté avec une définition qui vient du cœur et qui inclut son propre corps tel qu’il est aujourd’hui, on peut le regarder avec bienveillance et compassion. »
Plus facile à dire qu’à faire, encore une fois… Le « nouveau sexy » est une stratégie qui nous apprend à « laisser tomber l’autocritique et à passer à l’autobienveillance ». Ça veut tout simplement dire que tu es superbe « en dehors de toute référence à l’idéal de beauté socialement construit ». Ceci n’est pas un scoop : ton corps évolue avec le temps et il ne reflète pas forcément celui d’il y a quelques années ni celui que tu voulais atteindre. Mais ce n’est pas grave : ton corps d’aujourd’hui est le « nouveau sexy ».
Regarde-toi quelques instants dans un miroir :
- Tu aperçois une nouvelle ride au coin de tes yeux ? C’est le nouveau sexy.
- Tu t’es trouvé un pantalon dans lequel tu te sens à l’aise en toutes circonstances ? C’est le nouveau sexy.
- Tu as choisi une nouvelle couleur pour tes cheveux ? C’est le nouveau sexy.
- Ta cicatrice de trachéo est toujours visible ? C’est le nouveau sexy.
- Ta tendinite récente à l’épaule t’oblige à te tenir droite ? C’est le nouveau sexy.
Ton nouveau sexy, c’est toi qui le définis, le redessines et choisis de le kiffer. Parce que tu es fabuleuse et que tu le vaux bien. Tu n’es pas obligée de tout aimer chez toi. Tout ce dont tu as besoin, c’est de te considérer sans jugement, avec douceur, bienveillance, en bref, comme l’apprennent ou le réapprennent chaque année des milliers de mamans qui s’inscrivent au Village, avec autocompassion. Tu es belle comme tu es et pas seulement intérieurement, hein.
Je t’entends grincer un peu, là, chère Fabuleuse. Tu as peut-être l’impression qu’accepter purement et simplement ton corps comme il est est un objectif inatteignable. Je ne le crois pas. Parce que j’ai réussi, moi, pourtant ancienne adolescente hyper complexée, et pas mieux à l’âge adulte… Ça m’a pris du temps, et il m’arrive de connaître quelques rechutes (le fameux « grand n’importe quoi »), mais je sais aujourd’hui regarder mon reflet avec satisfaction. Je ne suis d’ailleurs pas peu fière de ces progrès !
3/ Stratégie numéro 3 : tout le monde est le « nouveau sexy »
Même sans le vouloir, on a toujours des pensées critiques qui émergent quand on croise une personne qui n’entre pas dans le moule de la soi-disant « beauté idéale ». On peut se renvoyer ces critiques à soi-même aussi, en se jugeant parfois très sévèrement. Et puis, on se jugera pour avoir jugé les autres, ou soi-même. C’est encore le « grand n’importe quoi » qui rapplique… On n’a pas grand-chose à faire pour changer ça, alors le mieux est de l’accueillir en souriant et de déclarer pour soi : tout le monde est le « nouveau sexy ». Toi, moi, elle, eux. C’est à notre portée de décider que chacun a de la valeur, pour que cela devienne une vérité.
4/ Stratégie numéro 4 : De quoi mon corps a-t-il besoin ?
Que ressens-tu à l’intérieur en ce moment ? Tu peux accueillir tes sensations de la même manière que tu accueilles les formes de ton corps. Même si tu as appris à ignorer ses besoins et que tu ne remarques même pas que tu les ignores, il continue à t’envoyer des signaux ! Alors, prends un instant pour imaginer que ton corps est celui de quelqu’un dont tu dois prendre soin. Ne te contente pas de le regarder, mais pose-lui des questions : « Comment te sens-tu ? De quoi as-tu besoin maintenant ? » Si tu es attentive — peut-être qu’en fermant les yeux et en respirant calmement cela t’aidera — il te répondra. En fait, ton corps a des besoins récurrents : respirer, dormir, se nourrir… et être aimé. Si tu ne pourvois pas à ces besoins, tu te mets en danger. Au contraire, si tu en prends soin, il te procurera de la joie, réellement de la joie, pour ce qu’il t’apporte, pour ce qu’il porte et supporte chaque jour de ta vie. Il te veut du bien, même s’il est imparfait. Il peut te décevoir, tu peux avoir l’impression qu’il te trahit, mais, au fond, il reste ton allié.
Je sais, ça peut paraître bizarre tout ce paragraphe où je te parle de ton corps comme d’un tiers :
en réalité, ton corps, c’est toi, on est bien d’accord. Mais l’idée est que tu essaies de prendre ce léger recul et que tu apprennes à te considérer, à te parler, à prendre soin de toi comme tu le ferais avec ta meilleure amie.
En cette saison estivale, où les matières s’allègent et laissent davantage transparaître nos courbes, nos couleurs et tout ce que Photoshop n’a de cesse de « corriger », c’est le bon moment pour te regarder fièrement et te dire : « Je suis le nouveau sexy ! »