Ancienne mannequin chez Élite, psychologue, Sandra Dubi est mariée à Julien. D’origine suisse, ils sont responsables du Gospel Center à Annecy et fondateurs d’une association d’aide aux familles. Ils ont 6 garçons âgés de 3 à 13 ans.
Ça fait quoi de vivre dans un monde de garçons ?
Je me sens hyper à l’aise ! On me dit souvent : «Oh ma pauvre, tu n’a pas de fille…» À chaque fois que j’étais enceinte on me demandait : «Alors, c’est une fille ? Tu fais un bébé de plus pour avoir une fille, c’est ça ?» Pas du tout : j’aime les gars ! Et je suis persuadée qu’on a les enfants qu’on est fait pour avoir.
Comment se retrouver en couple ou en famille quand on a 6 enfants ?
Un couple, ça se construit. Une famille aussi. Si l’on ne fait pas le choix d’arrêter le temps pour être ensemble, il sera difficile de construire… Dans notre famille, on croit beaucoup aux rituels. Quand on est dans le rush, il n’est pas évident de prendre du temps en couple ou avec les enfants. Mettre en place des rituels hebdomadaires permet d’instaurer des habitudes durables. On bloque des moments d’office, et du coup c’est plus facile de faire une croix sur les autres choses !
Quels sont les rituels dans votre famille ?
Un soir par semaine, on se retrouve tous en famille autour d’un bon repas. C’est notre fête à nous, inspirée du shabbat juif, qui relève d’une grande sagesse. Cette soirée hebdomadaire nous permet de nous retrouver, de prendre du plaisir à être ensemble et de montrer notre affection à chacun.
Un autre soir par semaine, on passe une soirée tous les 2 en amoureux, même si c’est à la maison. Ce qui aide, c’est que chez nous tout le monde est couché à 20h !
On essaie aussi d’instaurer des événements récurrents pour chaque enfant, de manière individuelle. Comme ils sont toujours dans la meute, nos enfants ont besoin de ces temps à part. Par exemple, nous organisons un repas seuls avec l’enfant qui a son anniversaire. Quand un enfant rentre au collège, mon mari l’emmène camper au bord d’une rivière. On a décidé aussi que l’année des 13 ans chaque enfant, on l’emmènerait seul en week-end quelque part en Europe : en décembre, nous sommes partis à Lisbonne pendant 2 jours, seuls avec Ilan (merci Easyjet !)
Une famille nombreuse, ça doit être beaucoup de travail !
Les gens me disent : «Mais tu es folle, 6 enfants c’est trop difficile, tu as trop à faire et tu n’as plus de temps pour toi !» C’est vrai qu’il y a du travail. Je n’ai pas de fille au pair, pas de femme de ménage ni de cuisinière (même si j’aimerais en avoir !)
Quand ils partiront de la maison, j’aimerais que mes garçons sachent faire le repassage, cuisiner… Chacun a son petit job : mettre les assiettes ou les couverts sur la table, débarrasser, rincer les assiettes, vider le lave vaisselle… Mon but n’est pas les faire crouler sous le travail mais de partager les tâches et de leur apprendre à avoir un esprit de service.
Ce n’est pas trop le chaos ?
Oh si, le chaos je connais ! À table par exemple, c’est toujours le carnage : il y en a un qui renverse son verre, un autre qui crie et un troisième qui tombe de sa chaise. Par contre, j’ai remarqué que c’est toujours dans ces moments-là que des choses importantes sortent, que je peux dire des choses fondamentales.
En fait, j’ai fait le deuil de «pour bien enseigner, il faut du calme» ! C’est dans le chaos que la vie prend place. Il n’y a qu’au cimetière que tout est calme et que rien ne bouge…
Qu’est-ce qui est le plus difficile dans votre quotidien ? Et le plus gratifiant ?
Ce qui est le plus difficile, c’est aussi le plus gratifiant : semer dans la vie de mes enfants.
Pendant mes études, j’ai appris en cours de gériatrie que les statistiques prouvent qu’en fin de vie, ce qui est le plus important pour les gens, c’est leurs enfants et leurs petits-enfants.
L’illusion aujourd’hui, c’est qu’il faut fuir le foyer pour être heureux. Mais lorsqu’on interroge les gens en fin de vie, on réalise que le plus important pour eux, c’est l’héritage. Ce qui demeure au final, ce sont les enfants et les petits-enfants. Je ne dis pas qu’avoir des enfants c’est facile. Je dis juste que finalement, à l’échelle d’une vie de 80 ans, le temps qu’on investit dans nos enfants est court : lorsqu’ils passent 13 ans, on a déjà semé une immense partie de ce qu’on pouvait semer dans leur vie.
Semer dans la vie de ses enfants, c’est n’est pas facile. Loin de là. Je suis tout en même temps : avocate, juge, policière, enseignante, général en chef, chef cuistot, blanchisseuse et tout le reste… mais quand je me couche le soir, je m’endors avec une grande satisfaction de semer dans la bonne terre.
Je ne cherche pas à donner de leçons, j’essaie juste d’être un témoignage le plus fort possible. Je voudrais que les mamans qui me côtoyent puissent être inspirées et encouragées à ne pas abandonner. Ce qu’elles font au quotidien a une valeur inestimable !
Comment fait-on pour «semer dans la vie de ses enfants» ?
Miser sur nos enfants, c’est un bon calcul. Mais pour bien miser, il faut d’abord être guéri de ses propres blessures, sinon on ne va faire que répéter ce que nos parents ont fait avec nous, même les choses qu’on juge mauvaises. Le principe de la malédiction, c’est la répétition. Par exemple : je déteste mon père parce qu’il a été violent, je suis violent à mon tour donc je me déteste, l’amertume vient envenimer tout ça et les choses empirent.
Si tu veux vivre la grâce (si tu ne veux pas répéter ce que tes parents ont fait), tu dois avant tout exercer la grâce sur tes parents. Ce que tu sèmes, c’est ce que tu reçois !
Semer dans la vie de nos enfants, cela veut-il dire ne plus avoir de vie ?
Beaucoup de femmes vivent dans la prison de la frustration. Elles voient les enfants comme un frein à leur épanouissement. Effectivement, si on écoute ce qu’on nous dit, avoir des enfants c’est le pire truc qui puisse nous arriver : «tu peux jamais faire ci ou ça, tu n’es jamais tranquille, tu n’as plus de vie…»
On peut vite accuser les enfants de voler notre vie. Mais on peut choisir de changer de lunettes : et si c’étaient eux qui nourrissent nos rêves, nos passions, nos projets ?
Comment êtes-vous passée du mannequinat à la psychologie ?
Pendant que j’étais encore mannequin, j’ai commencé mes études en psychologie parce que mes parents ont toujours été pro études universitaires : il fallait que je fasse des études pour être «quelqu’un de sérieux dans la vie» !
À l’époque déjà, mes copines venaient se confier à moi et j’ai toujours eu cette envie que les gens autour de moi aillent mieux. Au fil du temps, c’est devenu une véritable passion pour aider les gens à trouver leur identité. Aujourd’hui je suis chrétienne et j’ai expérimenté une rencontre avec Dieu et sa guérison intérieure qui m’a aidée à trouver qui je suis. Pour moi, c’est Dieu le Père est le seul qui peut guérir et restaurer l’identité des gens.
Est-ce que le fait d’être psychologue influence votre vie de famille aujourd’hui ?
Bien sûr ! Ma famille est mon premier champ d’action. Tout ce que j’entends en entretien m’aide énormément dans la gestion du quotidien. Je mets en pratique de nombreuses techniques sur mes enfants, notamment pour la guérison des souvenirs. Je ne veux pas qu’ils aient de lourds fardeaux à porter sur des années, alors que cela peut être traité en un temps record !
Avec mon mari, nous croyons que la famille est le socle de la société. Quand les familles françaises seront reconstruites, c’est la France qui changera ! Pour apporter notre pierre à l’édifice, nous avons créé l’association S2V, qui apporte une écoute et une aide confidentielle sur le couple, la grossesse, la sexualité, la parentalité.