J’étais rédactrice. Mon travail, c’était d’écrire pour les autres. Et puis j’ai eu des enfants : deux en même temps ! Pour survivre à ce tsunami de couches, de biberons, de cris, de nuits sans sommeil, j’ai commencé à écrire pour moi. Mon mari a lu mes textes et il a dit : tu devrais vraiment lancer un blog et publier ces textes !
J’ai dit OK, mais pas tout de suite. Ce blog, je le lancerai :
- quand ma maison ne ressemblera plus à un champ de mines
- quand je ne râlerai plus sur les enfants
- quand j’aurai des choses intéressantes à dire
- quand j’aurai plus de temps
- quand toutes les circonstances s’y prêteront parfaitement
- quand je serai sûre que personne ne critiquera mon travail
- quand je serai devenue la bonne personne
- autrement dit : jamais.
Sauf qu’un jour, j’ai dit merde au perfectionnisme.
J’ai été assez courageuse pour publier mon premier article imparfait.
Et puis j’ai publié un premier livre imparfait, parce qu’il restait des coquilles dedans.
Et dans quelques semaines, vous découvrirez un deuxième livre imparfait, parce que je n’ai pas eu assez de temps pour qu’il soit parfait.
Et là je suis en train d’écrire un troisième livre qui sera imparfait, parce que c’est un sujet vraiment trop intello pour moi.
Je suis même assez folle pour publier des chroniques imparfaites sur des médias nationaux. Et devinez quoi :
- ma maison ressemble toujours à un champ de mines
- je râle encore sur mes enfants
- j’ai toujours peur que ce que j’ai à dire ne soit pas assez intéressant ou assez intelligent
- je n’ai pas plus de temps pour tout faire bien
- les gens ne se privent pas pour me faire savoir tout ce qu’ils n’aiment pas dans mes articles (et tout ce qu’ils n’aiment pas chez moi)
- pourtant, je sais que je suis à ma place, et je vis mon rêve de révéler la fabuleuse en chaque maman.
Le perfectionnisme, c’est quoi ?
- une croyance selon laquelle si vous avez une vie, un comportement et un look parfaits, vous pouvez réduire considérablement, voire éviter la souffrance liée aux reproches, aux jugements et à la honte.
- un mensonge : “seules les personnes parfaites sont aimées ; “tu ne seras aimable que si tu es bien dans tous les domaines ; pas un peu bien, mais très très bien »
- un faux ami : il nous dit “je ferai de toi la plus belle”, mais il ne nous dit jamais “maintenant, tu es la plus belle”. Il nous rappelle sans arrêt qu’il reste encore une tache sur le chemisier blanc.
- un bouclier que vous trimbalez en pensant qu’il va vous protéger, alors qu’en réalité il vous empêche de prendre votre envol.
- la procrastination. Le perfectionnisme, c’est attendre d’avoir toutes les cartes en mains pour jouer son coup. Sauf que personne ne se sent jamais entièrement capable. Personne n’a des finances illimitées, du temps illimité et de l’énergie illimitée pour atteindre ses objectifs. Tout le monde est terrifié par la perspective de l’échec, de passer pour un taré, de décevoir les gens. Alors on procrastine, dans l’attente d’un confort qui ne viendra jamais.
- une paralysie : le perfectionnisme, c’est toutes les opportunités que nous ratons parce que nous avons peur de faire voir au monde quelque chose d’imparfait. Ces rêves que nous ne poursuivons pas en raison de notre peur profonde d’échouer, de commettre des erreurs et de décevoir les autres. Le perfectionnisme, c’est refuser de prendre des risques.
Le perfectionnisme, c’est une histoire de filles…
Dès leur plus jeune âge, on enseigne à la majorité des filles qu’il faut éviter le risque et l’échec. On apprend aux garçons à grimper, à sauter la tête la première, à prendre des risques, mais aux filles on apprend à faire des beaux sourires, rester en terrain connu, avoir des 20/20.
En résumé, on apprend aux filles à être parfaites et aux garçons à être courageux.
Résultat, la gent féminine manque de courage, et c’est inquiétant. Une étude HP a montré que les hommes postulent à un poste s’ils ont 60% des qualifications requises. Les femmes ne postulent que si elles répondent à 100% des qualifications ! Elles prennent moins de risques, pas parce qu’elles sont moins douées, mais parce qu’on ne leur a jamais appris à être courageuses.
(Vous voulez en savoir plus ? Regardez ABSOLUMENT cette excellente conférence Ted de Reshma Saujani !)
Le perfectionnisme, c’est encore pire quand on devient mère.
Avant, on pouvait tricher, se montrer parfaite, au moins en société. Mais on ne peut plus tricher quand on a des enfants. Ils sont maîtres dans l’art de nous donner des leçons de pagaille. C’est le bordel partout, dans la voiture, dans la maison, et même dans la tête, dans le coeur.
Vouloir combiner maternité et perfection, c’est se rendre malheureuse et risquer de devenir un dictateur dans son foyer.
C’est vouloir donner une image parfaite, par peur d’être rejetée, étiquetée, jugée. C’est devenir bâtisseuse de façade et se retrouver coincée derrière, seule pour pleurer.
Vous voulez connaître mon arme anti-perfectionnisme ?
“Fait vaut mieux que parfait”
- Une balade de sept minutes vaut mieux qu’une course de dix kilomètres que je ne fais pas.
- Une bière en amoureux sur le tapis du salon vaut mieux qu’une soirée cinéma qui ne se fera pas.
- Une facture réglée vaut mieux qu’un bureau débarrassé de toute paperasse, qui n’existe que dans mes rêves.
- Un coup de brosse dans la cuvette des WC vaut mieux qu’un grand ménage de printemps qui n’aura jamais lieu.
- Un livre imparfait entre vos mains vaut mieux qu’un livre parfait que je n’écrirai jamais
- Un article où il reste des coquilles vaut mieux qu’un article nickel que je mettrai une vie entière à mettre en ligne
- Une robe imparfaite cousue vaut mieux qu’un rouleau de tissu censé devenir une tenue idéale
- Une association bancale créée vaut mieux que mille bons sentiments que l’on aura jamais osé mettre en oeuvre
- Une réalité imparfaite vaut mieux que des idées parfaites qui ne voient jamais le jour
- Une maman imparfaite qui est là avec sa famille vaut mieux qu’une maman parfaite qui n’existera jamais.
Pourquoi ?
1. Parce qu’on aime les gens imparfaits.
Autant le perfectionnisme nous dit que c’est d’être au top qui nous rend aimable, autant les gens ne veulent pas de ces personnes lisses, sans rugosités, sans failles et sans ombres. Au fond, on aime les gens comme nous qui se prennent des gamelles quand ils sont courageux. On aime les encourager, ceux qui nous rappellent que la petite tache sur le chemisier blanc, c’est toute la valeur de la vie.
2. Parce que les gens n’ont pas besoin de modèles parfaits.
Ils en ont déjà assez sur Facebook, Instagram et Pinterest. Les gens se sentent mieux quand ils se sentent moins seuls. Ils ont besoin de toi et moi pour leur dire les deux mots les plus puissants du monde : “moi aussi”. Moi aussi j’ai une vie de famille qui ne tourne pas complètement rond, moi aussi je fais des erreurs, moi aussi j’ai des doutes, moi aussi j’ai peur de ce que les gens pensent, moi aussi j’ai besoin d’aide.
3. Parce que c’est en faisant qu’on apprend.
Si j’avais attendu de savoir bien écrire pour commencer à écrire, je serais toujours en train d’attendre. C’est en me trompant que j’ai pu progresser. Le perfectionnisme, c’est l’ennemi du progrès. L’action, c’est l’amie du progrès !
4. Parce nous devons apprendre à nos filles à être à l’aise avec l’imperfection.
Nos belles paroles ne serviront à rien. Nous devons leur montrer l’exemple en prenant des risques, en montrant des choses imparfaites, en nous trompant, en sachant gérer la critique avec sagesse et détachement. Nous avons la responsabilités de montrer à nos filles à quoi ressemble une vie courageuse.
Je suis sûre qu’il y a parmi vous d’incroyables richesses enfouies.
Des relations jamais tentées, des vies de famille jamais vécues, des projets jamais lancés, des ONG jamais créées, livres jamais écrits, des albums jamais composés, des langues jamais apprises, des concours jamais passés, des fleurs jamais envoyées, des talents jamais révélés… à cause de la peur de l’imperfection.
Ne remettez plus jamais vos rêves à demain.
Ces rêves n’ont jamais été aussi importants pour le monde. Tout veut vous faire croire que vous n’êtes jamais assez mince, jamais assez compétente, jamais assez présente… En réalité, vous êtes juste assez fabuleuse, et ça change tout !