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Est-ce qu’on le garde ou pas ?

grossesse surprise
Une Fabuleuse Maman 27 février 2023
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Dans la société actuelle, la question est plus que jamais tendance.

« Faire des enfants ? Mais t’as pas idée, quand même ! Pour leur offrir quoi ? T’as vu notre monde… Franchement, quel égoïsme de se reproduire par les temps qui courent ! ».

Ce discours est presque devenu viral dans la bouche de la jeune génération.

Il m’arrive parfois d’observer, sur le trajet retour de l’école, mes trois petites têtes dans le rétro intérieur de la voiture, et de me demander si je suis, de fait, un être humain irresponsable parce que j’ai choisi de donner la vie à 3 enfants. Et ma réponse est non.

Cela fait plus de dix ans que je suis devenue maman. Crois-moi, je m’en suis posé, des questions. Des grandes, des petites, des graves, des drôles. Et ces considérations-là, vois-tu, deviennent marginales quand, à l’heure du coucher, elles trouvent leurs réponses dans leurs trois petites têtes plus la mienne, réunies sur les mêmes oreillers dans une avalanche de câlins. 

Mon Fabuleux et moi avons décidé de fonder notre famille presque tacitement.

C’était une évidence (d’autres penseront peut-être « convention sociale », « éducation » ou « héritage culturel ») pour nous deux de devenir parents. Nous sommes de ceux — heureux — qui n’ont jamais connu les angoisses provoquées par des hormones capricieuses, les faux départs et les vrais chagrins de fausses-couches à répétition, les diagnostics douloureux de stérilité, les rendez-vous câlins à des horaires plus précis que ceux de la SNCF.

Pour mes deux grandes, ce fut immédiat. Tellement que, au jeu des devinettes, à la question « Devine qui est enceinte dans notre entourage », mon mari a épuisé la liste de toutes nos connaissances proches ou lointaines avant d’imaginer que ce pût être moi, la femme enceinte…

Après :

  • deux naissances en 21 mois
  • des abîmes de fatigue engloutissant vie sociale et vie de couple,
  • un baby-blues auquel personne ne m’avait préparée et que ni mon Fabuleux ni moi n’avons compris
  • des nuits où les pleurs de l’aînée semblaient ne plus jamais vouloir cesser et où il ne me restait rien que mes propres larmes pour dire ma détresse d’être une mère qui ne sait pas calmer son enfant
  • des journées de travail où la seule perspective qui me tenait debout était celle de retrouver mon lit le soir venu
  • des liasses de billets distribuées sans remords à des spécialistes autoproclamés, parce que je croyais vraiment qu’ils réussiraient là où j’échouais (c’est-à-dire à transformer l’expérience de la parentalité en conte de fées).

Cette liste ressemble plus ou moins à ta vie ? Il est peut-être urgent de te ménager une bulle d’oxygène. Sais-tu qu’Hélène Bonhomme, la fondatrice des Fabuleuses, envoie chaque matin un mail à 150 000 mamans ? Si tu veux t’inscrire, c’est gratuit et ça se passe ici.

Après tout ça donc, lorsque j’ai réalisé que mon couple avait tenu la vague même dans la plus terrible des houles et que mes enfants ne voyaient pas en moi la mère débordée et lessivée que j’étais persuadée d’être mais la maman aimante et disponible que j’étais vraiment,

j’ai trouvé que deux enfants, c’était fantastique. Fantastique, mais suffisant.

La mer s’est calmée. Mon Fabuleux et moi sommes en phase pour dire : « Notre famille est belle et stable à 4. Profitons comme ça. Faisons des projets ». Initier nos filles à la randonnée, leur faire découvrir Paris, les laisser seules quelques heures le temps de faire une course, profiter de nos soirées et retrouver de vraies nuits, nous libérer des contraintes horaires engendrées par les siestes obligatoires… En somme, retrouver un semblant de vie d’adulte.

C’est acté, nous n’aurons pas d’autre enfant.

La certitude est ancrée chez nous, chez nos filles, chez nos amis et nos familles. Je me souviens encore des conversations assurées dans lesquelles, rassérénés, nous soupirions d’aise en disant : « Ça y est, elles grandissent, on respire. C’est top. Là, on profite ».

Jusqu’à un soir de juillet, il y a plus de trois ans. Un lendemain de joyeuse fiesta entre amis. Des nausées m’avaient cueillie au sortir de la sieste. Évidemment, je les imputai à un léger surplus d’alcool mal digéré (ça arrive à tout le monde, hein). Mais ce trouble digestif persista le lendemain, et le surlendemain. Mon mari, sur le ton de la boutade, me lança ces quelques petits mots innocents qui changèrent ma journée, et toutes celles à venir : « T’es p’têtre enceinte ».

Enceinte ? Sous pilule ?

Je lui ris au nez, littéralement « Enceinte, hahaha, tu ne penses pas que j’aurais remarqué ? ». Hahaha. Eh bien, non… Le test pratiqué lui donna raison. Et pourtant, soyons francs, sur l’instant, nous aurions préféré qu’il ait tort, mon Fabuleux.

En quelques secondes (le temps que le petit trait rose se dessine sans ambiguïté dans la case du bâtonnet), notre navire change de cap. Paf, comme ça, un grand coup de barre en pleine ligne droite. L’évidence est là, corroborée par un dosage Bêta-HCG où dansent fièrement les hormones de la vie.

J’attends un autre enfant. J’abrite à nouveau la vie. Sans l’avoir choisi.

Des heures passées comme hors du temps, la tête lancée sur le programme essorage 1200 tours de la machine à laver… Mon amoureux et moi plongeons dans une espèce de trou spatio-temporel, sans début ni fin. C’est un trait de quelques millimètres seulement sur un bâtonnet en plastique mais des déferlantes de questionnements. Parce que nos certitudes ne sont plus que poussière. Et surtout, parce que nous sommes adultes et que nous savons que nous allons devoir décider. Les options ne sont pas légion. C’est blanc ou c’est noir. Stop ou encore. Et c’est dur. C’est manichéen. 

Voilà, c’est la situation où l’on parle parfois si abruptement d’« enfant non désiré ».

Moi, je préfère l’aborder sous un angle moins tranchant, moins violent, moins traumatisant. Mon mari et moi sommes dans la situation d’une grossesse non désirée. Et, mine de rien, ça pèse un peu moins lourd. Ça serre moins le cœur.

Notre vérité, c’est que nous avions choisi d’être 4 dans notre famille. Pas 5. Mais si 5, c’était chouette ?

Nous n’avions plus envie de connaître les difficultés d’accueillir un nouveau-né. Mais si c’était joyeux, d’accueillir cet enfant ?

Matériellement, cela s’annonce compliqué. C’est vrai, nous n’allons pas pousser les murs… Mais si on réussissait à lui faire un peu de place ?

Choisir d’assumer une grossesse non désirée, ça peut tout foutre en l’air, vie de couple incluse.

Mais si l’assumer, c’était en fait la dernière pièce du puzzle ?

La vérité, c’est que cet enfant-là, au creux de moi, nous force à reconnaître la puissance de la vie. Au fil de nos discussions, mon mari brandit la très jolie image du petit brin de verdure qui va trouver sa place dans la microscopique fissure d’une grande dalle bétonnée. Cette toute petite fleur sur laquelle ton pied va éviter de marcher parce que la Nature, c’est ça. Tu la regardes, tu te demandes comment elle a fait pour pousser là, tu t’étonnes.

La poésie de la métaphore s’évapore vite alors dans les nimbes du jargon médical très pragmatique :

si l’on ne se sent pas prêts à accueillir l’imprévu, c’est l’avortement.

C’est un médicament à prendre. Un verre d’eau pour faire passer la pilule. Attendre. Et laisser la vie s’en aller. Cette option, nous la connaissons avant d’entendre la sage-femme la verbaliser. Dans la bouche de cette femme qui me connaît et qui a vu mes aînées naître, ce mot-là est froid comme la mort. Il grince à mes oreilles comme la fourchette dans le fond de l’assiette. Dans quelques jours, nous partirons en vacances. En famille. Il s’agit donc de choisir dans un délai de 48 h si nous souhaitons ou non être parents une troisième fois. Accepter les nouvelles contraintes matérielles que représente cette potentielle naissance et vivre encore l’aventure extraordinaire d’une grossesse, d’un accouchement et de l’éducation. Ou s’en tenir à nos projets de famille à 4, et recourir à ce droit de dire non parce qu’on n’a pas décidé cette grossesse.

C’est le choix d’une vie. Et nous avons fait celui de la vie.

Je pense que mon cœur de maman avait décidé dès l’instant où le petit trait rose s’était matérialisé. Oui, mon cœur avait choisi ; mais ce choix-là n’aurait pas tenu si nous n’avions pas décidé à deux. 

Tu vois, chère Fabuleuse, mon mari et moi avons résolu ensemble d’embrasser cette grossesse inopinée et finalement, de désirer cet enfant. Nous avons pris la route de la montagne pour aller randonner avec ce secret partagé. Il est des événements que l’on n’explique pas. Je n’aurais jamais pensé être à nouveau enceinte, et ce bébé, j’ai été terrifiée à l’idée de le perdre, jusqu’à ce qu’il soit bien accroché. J’ai attendu chaque échographie avec une fébrilité heureuse. J’ai savouré chaque petit coup de pied qu’il m’a donné. Je l’ai remercié encore et encore de nous avoir choisis.

Pour qu’il sache qu’il était inattendu mais désiré.

Mon petit dernier — car il sera le dernier, c’est sûr — a trouvé sa place sans que nous poussions les murs. Sur mes genoux, dans les bras de ses sœurs, sur les épaules de son père pour les balades. Il est la dernière pièce de notre puzzle. La vie à 5, c’est chouette et joyeux.

Ce texte nous a été transmis par une fabuleuse maman, Emilie.



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