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Dans ma tête

Une copine de thérapie m’a enseigné la résilience

Marie Chetrit 6 novembre 2019
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Avec Alex, notre relation a démarré brutalement et directement dans le registre de l’intimité : sur le canapé de notre groupe de thérapie. Notre psy commune avait jugé que nous progresserions mieux et plus vite en nous confrontant aux interactions avec d’autres. Nous avons commencé par connaître tous nos vilains petits secrets qui d’ordinaire, ne se disent qu’au bout de plusieurs années de relation amicale. Maintenant seulement, nous commençons à boire des apéros en terrasse et à parler futilités ensemble après le boulot. Le monde à l’envers !

Alex est mariée, maman de deux jeunes garçons, auto-entrepreneure, Belge, et marrante.  Pourquoi vous en parler ? Parce qu’elle est ce que l’on appelle dans le langage courant, une « super-meuf ». Pourtant, sa vie n’a pas été que pétales de roses sur fond d’arc-en ciel. Alex illustre à mes yeux le concept de résilience. Elle a accepté de témoigner de son parcours de vie.

Quand je t’ai connue dans le groupe de thérapie, tu pleurais et tu éclusais le stock de mouchoirs. Raconte-nous ce qui se passait…

C’était l’Etna ! Une irruption incontrôlée d’émotions et de pleurs ensevelis sous une couche de 30 ans d’âge, mélangée à des peurs et des croyances.

C’était aussi, in fine, une libération, un nettoyage par les larmes, un besoin pour aller mieux et avancer dans ma thérapie. Je ne me sentais pas autorisée à pleurer ailleurs. J’ai eu la chance d’être accueillie et soutenue dans cette détresse par des gens formidables, dans ce cadre thérapeutique bienveillant où exprimer ces émotions était non seulement permis, mais encouragé.  Je les adore !

Ta maman a été très tôt malade de l’alcoolisme. Comment se remettre d’une telle épreuve vécue enfant ?

Tout cela était une blessure vive et douloureuse que je ne voulais plus cacher mais au contraire, soigner, assainir. À défaut de soigner la blessure de ma mère (décédée quand j’avais une vingtaine d’années), je pouvais prendre soin de moi pour un meilleur avenir.

Vers 30 ans, il m’est apparu vital de ne plus vivre avec ce fardeau mais de creuser ce sujet pour :

  • Tout d’abord, me rencontrer, au lieu de constamment m’adapter au monde extérieur, comme je l’avais toujours fait avec elle.
  • Comprendre l’histoire de ma mère, qui a eu un tel impact dans ma vie et m’a remplie de colère… Appréhender sa détresse, son alcoolisme, sa dépression. La rencontrer…
  • Rééquilibrer mes ressentis entre mon père et ma mère… Vastes montagnes russes ! Encore aujourd’hui, la relation avec mon père me déstabilise.

Mon souhait était d’accepter tout ce que cette enfance compliquée m’avait apporté et appris. Je suis parvenue à pardonner ma mère et suis en route pour mon père.  Je suis aujourd’hui fière de m’en être sortie, sans avoir mal tourné, et sans être tombée dans les mêmes travers que mes parents (enfin, j’essaie !!). Bref, je me suis offert une belle portion de résilience qui me permet de croire que je peux faire face à beaucoup de choses compliquées sans m’effondrer.

Cela a dû te demander des efforts !

J’ai accepté de me remettre en question. J’ai sorti ma colère et mes émotions, et essayé d’aligner, autant que possible, ma tête, mon cœur et mon corps. J’ai appris à dire les choses afin de me respecter soi-même. Je voulais vivre en paix avec mon histoire, en ayant pardonné à mes parents. Maintenant, j’ai appris à reconnaître que je suis une sacrée nana d’avoir fait tout ça, et que je suis très riche de mon histoire.

Ton fils aîné a déclaré une leucémie à l’âge de deux ans et demi. Comment as-tu réussi à surmonter cela ?

Ce fut une énième épreuve, la plus dure que j’aie eu à vivre. Depuis toute petite, j’ai géré les difficultés (comme le quotidien avec ma mère malade) comme j’aurais fait de la gestion de projet : avec distance et efficacité.

Là encore, mon choix a été de limiter ma souffrance. Pour cela, j’ai choisi de me couper au maximum de mon ressenti et de m’éloigner des proches qui faisaient remonter en moi des émotions fragilisantes ;

Mais aussi, de croire dur comme fer à un meilleur lendemain, même si je n’osais pas vraiment l’imaginer de peur que cela ne se réalise pas. Mais mon passé m’avait toujours prouvé ma force et ma capacité de résilience en cas de danger.

J’ai choisi deux personnes, seulement, pour me soutenir dans cette épreuve : le cancérologue de mon fils, et une personne ayant traversé la même situation, mais qui parvenait à se décentrer de son expérience pour accueillir ce que je vivais. Je n’étais pas en recherche de contact avec d’autres parents d’enfants malades. Je voulais rester dans ma bulle pour me protéger et surtout garder mes forces.

Je ne sais pas si ma manière de surmonter cette épreuve était la meilleure, mais c’est comme cela que j’ai réussi.

Et après ?

Une fois le cyclone passé, je me suis effondrée… C’est à ce moment que j’ai eu besoin d’antidépresseurs et de revoir ma thérapeute. En effet, après cette période de lutte intense, il a fallu rester aux abois, et tenir sur la longueur, avant d’entendre enfin, cinq ans plus tard :

« Votre fils est guéri ! »

Cinq années de marathon avec une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes, avec cette vie en suspens. Sans ma thérapie, il m’aurait été très difficile de survivre et de me reconstruire.

Pendant la maladie de ton fils aîné, ton cadet était tout petit. Quel impact cela a-t-il eu sur votre relation ?

Il n’avait que 6 mois à l’annonce de la leucémie de son frère. Nous ne nous sommes quasiment pas vus durant les 6 mois d’hospitalisation. Durant cette période, ce pauvre petit loup a été balloté de grands-parents en nounou ou en voisines ; nous sommes passés à côté de sa première année, pour des raisons de vie ou de mort de notre grand.

À notre retour de l’hôpital, mon bébé m’a très vite montré des signes d’opposition, comme s’il me disait : « Je vais te faire payer ton absence » … J’étais épuisée et extrêmement triste, c’était très dur.

Je me suis alors tournée vers des professionnels de la petite enfance pour savoir comment réagir. Je lui ai très vite verbalisé combien je l’aimais, combien je n’avais pas eu le choix et combien j’étais là pour lui. J’ai aussi cadré ses émotions débordantes en le contenant physiquement, et en lui répétant que c’était moi et son papa qui décidions… pas lui ! Que malgré ses colères légitimes, je l’aimais très fort et que je ne lâcherais rien. Je le rassurais sur le fait que j’étais aimante, solide, présente et fiable pour lui.

Ensuite nous avons eu la chance de rencontrer une thérapeute qui a organisé des séances à 3. Nous avons évoqué sa conception, la grossesse, sa naissance, son arrivée à la maison, l’allaitement, nos câlins, l’amour que nous lui portions… cela a duré quelques séances, durant lesquelles il écoutait et jouait distraitement. Puis un jour, il s’est effondré en pleurs, a tout lâché et c’est alors que nous avons pu reposer les bases d’une nouvelle relation faite de beaucoup d’amour.

Il reste aujourd’hui un petit garçon qui garde beaucoup en lui jusqu’à exploser, et qui a besoin d’être accueilli et réconforté. Il fait régulièrement des séances d’ostéopathie émotionnelle pour évacuer ses émotions. Nous continuons à grandir ensemble.

En dépit de toutes les difficultés que tu as traversées, tu es l’incarnation de l’optimisme. Quelles sont tes astuces de Fabuleuse pour survivre aux journées bien pourries ?

  • Manger des pâtes ! Mon plus gros vice (en lien avec mon centre de gravité, d’ailleurs ☺).
  • Croire en sa bonne étoile et en ses forces, voir combien la vie de tous les jours est faite de merveilles ! Le chant mélodieux d’un oiseau, le sourire d’un enfant, un chien qui vient dire bonjour, un moment de complicité avec un inconnu, une maladresse rigolote… La vie est magnifique : croquez-la simplement.
  • Garder son sens de l’humour (belge, c’est mieux !), ne pas se prendre trop au sérieux,
  • Croire que si quelque chose de désagréable arrive, c’est que l’univers a prévu quelque chose de mieux après.
  • Chercher à s’aligner tous les jours un peu plus (tête-cœur-corps), pour limiter au maximum les angoisses, la tristesse et la colère … Ce n’est pas forcément facile mais chaque petite victoire fait un bien fou !
  • L’arme ultime, c’est de filer vite au lit ! Demain est un nouveau jour.


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Cet article a été écrit par :
Marie Chetrit

Scientifique de formation et de profession mais littéraire de cœur, Marie Chetrit partage sur son blog de petits textes sur les moments rigolos ou exaspérants de sa vie familiale. Elle et son fabuleux époux ont chacun un grand d’une première union et deux petits diablotins ensemble.
https://prgr.fr/

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