Se reconstruire après une séparation - Fabuleuses Au Foyer
Dans ma tête

Se reconstruire après une séparation

femme avec un coeur brisé
Hélène Dumont 5 juin 2023
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« Je craque, je n’ai plus de ressource », m’avait confié Marianne l’an dernier lors de notre première séance, les yeux cernés. À l’époque, sa relation de couple était devenue si conflictuelle qu’elle se trouvait dans un état d’épuisement physique, émotionnel et mental immense, semblable à ce qu’elle pouvait lire à propos du burn-out professionnel. Cette comparaison l’avait amenée à désigner ce qu’elle vivait comme un « burn-out amoureux ».

Il fallait partir pour sortir la tête de l’eau : cette décision s’imposait comme une nécessité vitale.

Stéphane, que j’accompagne depuis quelques mois, commence seulement à refaire surface. Sa compagne l’a quitté brutalement l’été dernier. Leur relation n’était pas idéale, mais la rupture ne lui semblait pas d’actualité non plus. Mis devant le fait accompli, il s’est littéralement effondré sans comprendre ce qui arrivait. 

Qu’elle soit choisie ou subie, la rupture engendre la plupart du temps une véritable souffrance.

Stéphane avait su repérer les premiers signes d’un éloignement conjugal. Pourtant, l’annonce lui parut incompréhensible, presque loufoque. Comment la femme qu’il aimait, la mère de son enfant, pouvait-elle ainsi balayer 15 ans de vie commune ? Il fallait s’accrocher : il suffisait d’y croire. À cette époque, Stéphane me parle de mauvais rêve, d’un cauchemar dont il va se réveiller. Ce processus de déni est souvent observé lors d’une séparation, notamment par celui ou celle qui est quitté. « Fracture, déchirure, cassure, coupure » sont les mots déposés en entretien pour exprimer la douleur ressentie, aiguë, quasi corporelle. De nombreuses personnes somatisent, perdent le sommeil, maigrissent, se bloquent le dos.

Oui, une rupture, ça fait mal, même si parfois le choix soulage :

cette réalité paradoxale n’enlève rien à la difficulté de traverser ce moment, puis de s’en remettre. C’est ce que partage avec moi Marianne : si la séparation apparaît comme un soulagement, la colère finit bien vite par l’envahir. La jeune femme est révoltée : comment a-t-elle pu se tromper, elle qui ne s’engage jamais à la légère ? Comment cet homme qu’elle avait aimé, si gentil, bourré de qualités et de projets, avait-il pu changer autant ? Marianne a besoin de plusieurs semaines pour évacuer son émotion. Elle aurait préféré faire bonne figure, mais sa carapace se brise. Tout lui semble injuste, intolérable. Marianne se sent blessée, tandis que Stéphane ne cesse de s’interroger sur ce qu’il vaut. Cette période de prise de conscience de la réalité de la rupture et de ses conséquences est désagréable, mais normale. De nombreuses personnes, comme Marianne ou Stéphane, passent par ces différentes phases que sont le déni, la révolte et la colère. Cette évolution n’est pas linéaire ni mathématique, en revanche elle est nécessaire pour se séparer « vraiment » et commencer ce que l’on appelle un travail de deuil pour se reconstruire.

On observe deux types de séparation :

l’une visible, qui serait celle des corps ; l’autre psychique, où le lien enraciné à l’intérieur de soi peine parfois à s’effacer. « Je ne parviens pas à lâcher, me dit Marianne, je voudrais laisser partir nos souvenirs, mais je m’accroche. Je ne sais pas pourquoi. »  Le processus de séparation est effectivement plus ou moins long selon notre capacité à supporter la perte de l’autre, la perte de tout ce qui avait été construit ensemble, mais aussi la perte de ce qui avait été imaginé. Certains rêves ou projets ne se produiront jamais : un tour du monde, un deuxième enfant, la construction d’une maison… La vie elle-même devient autre. Ainsi, comment penser cette autre vie ? 

La reconstruction ne pourra s’amorcer qu’une fois la tristesse ressentie.

Elle prendra du temps. Je n’hésite plus à dire aux personnes que j’accompagne qu’une année me semble nécessaire pour se remettre. Cette perspective temporelle peut sembler insurmontable, néanmoins je la crois réaliste. Nous ne sommes pas des moteurs de recherche, qui trouvent instantanément la bonne réponse à une question posée. L’être humain a besoin de temps pour accueillir, digérer, se consoler, puis créer autre chose. 

Dans ce processus de reconstruction, quelques points me semblent incontournables : 

Relire son histoire

Pour lui donner du sens, comprendre ses erreurs, repérer ce qui dysfonctionnait, mais aussi ce qui a rendu heureux. Ce temps est un moment privilégié pour exprimer sa colère ou sa tristesse. Relire son histoire permet de mûrir en reconnaissant sa responsabilité comme celle de l’autre. Il s’agit de sortir de la culpabilité ou de la victimisation pour devenir actif dans la reconstruction. Se reprendre en main et agir. 

Prendre soin de soi

Cela paraît évident, mais je n’hésite pas à le redire : il faut prendre soin de cette part de nous-mêmes qui souffre, de cette part de nous même qui se sent perdue. Dans ces moments-là, l’amitié ou la famille sont de précieux soutiens. Ensuite, il faudra être capable de prendre soin de soi-même, seul(e), en apprenant à repérer ce qui nous ressource, ce qui nous apaise. Un petit pas chaque jour, une mise en action raisonnable pour se remettre debout : les objectifs ne doivent pas être ambitieux pour ne pas se décourager. Ils viendront peu à peu contenir l’anxiété, apaiser la peur, consoler et restaurer l’estime de soi-même, pour enfin dire un matin, à la suite de Marianne « Tiens, ce matin ça va mieux »

Reprendre confiance en soi

Stéphane réalise combien il était infantilisé dans sa relation. Sa parole avait peu de valeur. Maintenant qu’il est seul, il ose entreprendre un projet, cuisiner un petit plat, affirmer ses goûts ou ses choix jusque dans sa paternité. « J’ai envie de laisser la place au père que j’avais envie d’être, me partage Stéphane, à celui que j’avais étouffé pour plaire à ma compagne et ne pas provoquer de dispute. Je ne peux pas m’empêcher de me demander si mes choix éducatifs sont bons, je doute, mais je me sens de mieux en mieux dans ma posture de papa auprès de ma fille. »

Marianne, elle, apprécie de gérer son argent à sa guise. Ses projets prennent corps, l’énergie et le sérieux qu’elle investit dans son travail sont enfin récompensés à travers un achat immobilier qui l’avait longtemps fait rêver. Se séparer pour redevenir soi quand on a été trop longtemps collé à l’autre, quand on s’est perdu dans l’autre, quand on lui était soumis pour ne pas l’agacer est une prise de conscience qui aide les personnes que j’accompagne à se reconstruire. Se séparer pour faire peau neuve.

Imaginer l’avenir

Chaque rupture est différente : latente ou brutale, elle exhorte toujours à un travail de deuil pour se reconstruire, mais cela prend du temps. Néanmoins, aux Fabuleuses qui seraient dans la tempête et qui douteraient de s’en sortir un jour, je vous assure que ce temps prend fin, qu’il permet même de changer et d’aller vers le haut, à condition de prendre soin de soi-même, de se laisser aimer par les autres, d’apprendre à aimer sa solitude, de se laisser peu à peu toucher par le pardon et de croire que la vie nous attend, juste là, au coin de la rue.



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Cet article a été écrit par :
Hélène Dumont

Après avoir suivi un parcours de Lettres et Civilisations, Hélène est devenue professeur des écoles puis conseillère conjugale et familiale. Très attachée aux problématiques de l’articulation du maternel et du féminin, elle travaille aujourd’hui en cabinet libéral au rythme de sa vie de famille : un chouette époux et 6 enfants ! Elle est l'auteure du livre Terre éclose : la sexualité au féminin.
https://www.helene-dumont-ccf.com/

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