« Prends pitié de toi-même ».
Cette petite phrase, je l’ai souvent entendue de la bouche de ma maman. Elle-même la tenait de sa propre mère, ma chère Manou que j’aimais tant et qui fut pour moi un modèle de féminité avec son éternel chignon de cheveux châtains, son rouge à lèvres carmin appliqué d’un geste avant de sortir, et ses talons hauts portés en toute circonstance.
C’est donc toujours avec une pensée pour elles que je prononce cette maxime, que ce soit pour moi ou pour mes amies, et bientôt sûrement pour mes enfants.
“Prends pitié de toi-même”.
J’aime l’idée de transmission de mère à fille puis de femme à femme de ce conseil court et simple.
Il résonne comme un proverbe grec à la carpe diem et traduit une sagesse essentielle.
Enfant, puis adolescente et enfin devenue adulte, j’ai reçu cet adage glissé par maman à des moments où je me sentais engloutie par les impératifs de la vie :
- Avoir de bonnes notes à l’école et réussir mon gala de gymnastique.
- Obtenir ma mention au bac et préparer ma future vie étudiante.
- Réussir mes examens tout en préparant mon mariage.
- Obtenir mon concours tout en étant enceinte de mon premier bébé.
- Travailler tout en prenant soin de mes enfants.
- Me remettre de mon récent accouchement sans délaisser tout le reste.
- Être présente à mon mari, à mes amis mais aussi à tous ceux qui ont besoin de moi.
- Bref, tout mener de front, et parfaitement s’il-vous-plaît, jusqu’à l’épuisement parfois.
« Ma chérie, prends pitié de toi-même », me disait alors maman quand je lui exprimais mes doutes, ma fatigue, mon angoisse.
Fais au mieux, mais si tu sens que c’est trop dur, prends pitié de toi-même.
N’exige pas de toi ce que tu n’exigerais de personne.
Accepte de ne pas pouvoir tout accomplir parfaitement. Oui, tu es fatiguée, tu n’y arrives plus, et c’est normal. Tu as le droit de sortir la tête de l’eau pour reprendre ta respiration. Prends le temps de te reposer. Ne sois pas si dure avec toi-même, ne t’inflige pas tant d’impératifs. Célèbre tes petites victoires. Prends du recul, oublie un peu le “faire” pour te concentrer sur l’”être”.
Prendre pitié de soi-même. Cela appelle à la compassion, à l’amour inconditionnel de soi malgré l’imperfection. Et cela peut s’appliquer à tant de situations.
Prendre pitié de son couple par exemple.
Dans des moments denses voire tendus (naissance, déménagement, travaux, célibat géographique…) ou douloureux (maladie, deuil), avoir pitié de son couple c’est aussi prendre patience. Accepter que notre équilibre et notre rythme soient bouleversés. Accueillir avec bienveillance la difficulté à communiquer, la distance qui s’est installée, les incompréhensions qui ont surgi. Faire confiance. Garder la certitude que ce n’est qu’un passage, que nous nous aimons et que cet amour triomphera. Prendre pitié de soi-même, de son mari, de son couple, quand la vie n’est pas tendre et nous impose de faire face, quand les choses ne tournent pas rond. Aimer sans restriction et sans condition cet homme que l’on a choisi, ce couple que nous avons construit, cette famille que nous avons bâtie, et qui tiennent bon vaille que vaille, malgré les écueils, les failles et les difficultés.
Prendre pitié, c’est remplir son cœur de tendresse.
Ne pas se comparer, se juger et se condamner, mais au contraire entrer dans une logique de compassion face à nos difficultés et de gratitude pour tout ce qui est beau dans notre vie.
Prendre pitié de moi-même, c’est éprouver pour la femme que je suis de la compréhension et de la bienveillance quand je sens que ses forces ne sont pas suffisantes.
Se reconnaître fragile, vulnérable. Accepter de ne pas être toute puissante : “je ne peux pas tout faire, tout donner, tout accomplir. J’ai besoin de respirer, de souffler, de me reposer, de me retrouver.”
Être douce et patiente envers soi-même.
M’aimer vraiment.