Dans ma vie de maman de 5 enfants, dont un qui vit sur une drôle de planète (que Joseph Shovanec* appelle si joliment l’Autistan), je suis amenée à gérer beaucoup de choses de front.
Quand la vie bat son plein
Le réveil sonne à 6h30 tous les jours. Il n’y a que le samedi que je lui cloue le bec. Oui, parce qu’en plus d’avoir un enfant différent, nous sommes de bien curieuses gens. Le dimanche matin : sonne le réveil, et voilà qu’une heure trente plus tard, nous sommes tous les 7 assis bien sagement, en route pour aller louer Dieu.
Fichtre.
Et de 6h30 à sans doute beaucoup trop tard pour que cela soit raisonnable, les murs de ma maison sont au spectacle : représentation quotidienne, 365 jours sur 365.
- Lessives, toilettes d’enfants, câlins,
- Pleurs, fou-rires, colères, réconciliations,
- Chants, cris, chuchotements, secrets, tendresse, rage,
- Ménage, désordre, lessives et tant d’autres actions…
Trop c’est trop !
Et dans le défilement de ces jours, par moments, j’arrive à saturation.
J’aime ma vie de maman dans mon foyer. J’aime mes enfants. J’aime celui qui partage ma vie depuis 14 ans.
Mais il est des instants, où je me sens trop envahie. Trop « pour les autres ». Où je n’ai plus le sentiment d’exister pour moi-même. Où je ne me trouve plus.
Trop de bruits, trop de cris, trop de couches sales, trop de repas à préparer, trop de « besoins de maman » . Et trop d’autisme aussi.
Trop envahissant le petit habitant d’Autistan.
C’est alors que se fait ressentir en moi le besoin impérieux d’ouvrir une fenêtre.
Imaginez-vous confinés dans une pièce où l’oxygène fait défaut et où tout le monde vous presse. Approchez de la fenêtre et ouvrez là. Inspirez à plein poumons. Soufflez… Recommencez. Voilà. C’est de ça dont mon corps à besoin.
Alors je cherche la fenêtre.
Parfois je la crée même.
Cet été, j’en ai ouvert quelques unes. Deux magnifiques sorties avec des amies. Et pas plus tard que le week-end dernier : évasion Strasbourgeoise en très bonne compagnie. Sans mes enfants. Sans mon amoureux.
Mais voyez-vous, quand j’ouvre ces fenêtres, il y a toujours un moment où je culpabilise.
Laissez mes 5 enfants à leurs papa : est-ce que j’ai vraiment le droit de faire ça ?
J’imagine la tristesse de mon tout petit, parce que je ne serai pas là le soir (il a 5 ans, mais c’est mon tout petit)
Et puis les dents de mon grand garçon venu d’une contrée lointaine… Deux soirs dans être brossées, parce que je suis la seule a avoir accès à sa bouche.
Et puis mon homme à moi… lui laisser tout gérer. Il ne me demande jamais de prendre ses cours en charge lui. Je ne le remplace jamais dans son métier pour qu’il puisse souffler.
Ouvrir des fenêtres, c’est bon parce que…
- Ça nous fait sortir du cercle. Dans tous les métiers ou presque, vous allez au travail, puis vous rentrez à la maison. Dans mon cas, je suis à la maison tout le temps.
- Ça coupe court aux multiples sollicitation familiales, et croyez-moi ou non, vous aurez même le temps de poursuivre une pensée d’un bout à l’autre sans être interrompue. Et ça, ça n’a pas de prix.
- Ça permet de prendre du recul. Parce que prendre du recul entourée de linge à plier, de linge qui attend un coup de fer (depuis tellement longtemps que tout ce qu’il y a dans le panier est trop petit à présent), et engluée dans les questions en tous genre de tout le reste de la famille, c’est pas vraiment propice.
- Ça permet de revenir mieux disposée, et désirée.
J’ai entendu une de mes filles me dire :
« Bah dis donc maman on a jamais autant rempli et vidé le lave vaisselle !! »
- Ça permet donc aussi à ceux que vous entourez de vos soins avec persévérance, de se rendre compte que votre travail est précieux, et qu’il n’est pas si facile qu’il en a l’air. Et c’est leur rendre service que de leur permettre d’en prendre conscience.
Et par dessus tout :
- Cela vous permet de vous y pencher de nouveau les jours de grisaille. Et ça, j’aime beaucoup.
Alors n’hésitez-pas. Ouvrez des fenêtres. Elles n’ont pas besoin d’êtres longues, mais elles sont vitales. Renouvelantes.
Et si vous n’en ressentez pas le besoin pour vous-mêmes, peut-être connaissez-vous une fabuleuse, ou un fabuleux près de vous, qui est au bord de l’asphyxie ? Alors offrez-lui une fenêtre !