Cette casquette, ce costume, cette mission-si-tu-l’acceptes de père, quand démarre-t-elle exactement ? Faut-il signer quelque part ? Faut-il couper le cordon avec les dents ?
Papa déjà grand-père ou jeune père tout frais éclos (mais encore un peu cerné), papa solo, papa d’ados, papa de jumeaux, on leur a tendu le micro et contrairement à la légende urbaine, il n’a pas fallu leur tirer les vers du nez à la pince croco.
Séquence émotion.
« ”Voici votre fille, comment s’appelle-t-elle ?”. Ces mots prononcés par la sage-femme à la première bouffée d’oxygène de ma fille m’avaient plongé dans une sensation angoissante d’isolement : ma femme et moi désormais seuls, en compagnie de cet enfant que l’on ne connaissait pas. Ayant toujours voulu vivre le moment présent sans trop me projeter, c’était pour moi une belle claque ! Je ne suis pas devenu père par anticipation…
Aujourd’hui, avec mon avis de père actuel, je pourrais vous dire que les mois suivant la naissance, mon instinct n’était pas si vivace et que je vivais la logistique du quotidien avec joie, mais sans ressentir une paternité charnelle. Or, le processus de création de mon sentiment de père naissait, il se renforcera et mutera tout au long de ma vie.
Si je devais retenir un moment clé de cette construction, c’est lorsque ma fille a eu des bronchiolites à répétition vers ses 6 ou 7 mois. Lors des rendez-vous de kiné respiratoire ou radio des poumons, les regards qu’elle me lançait m’ont fait comprendre que j’étais rassurant pour elle et que, si j’étais présent, elle pouvait avoir confiance même dans des mains inconnues. La dépendance d’un enfant envers nous pèse quotidiennement sur nos épaules, mais c’est elle qui nous permet aussi de nous sentir parents. »
Louis, fabuleux papa de deux filles, 3 ans et 6 mois
« Se sentir père pour la première fois ? Difficile de répondre à la question tellement cet engagement de père évolue au gré de l’âge des enfants, de leurs projets de vie. Si je devais identifier un instant précis de “première fois”, je dirais le jour où j’ai appris que mon épouse attendait notre première fille, après quelques difficultés de fécondité de notre couple. Je me souviens que la nouvelle a créé de manière instantanée un sentiment de responsabilité immédiate, mais surtout une bouffée d’amour pour un être somme toute encore invisible, mais bien réel dans mon cœur et mes pensées. »
Etienne, fabuleux papa de deux filles et un garçon, âgés de 24, 22 et 17 ans.
« Au moment de la naissance de mon fils, mon épouse se trouvait au bloc opératoire.
Je n’ai pas pu y avoir accès, donc j’attendais benoîtement à l’extérieur sur une chaise lorsque les infirmières m’ont apporté un enfant défiguré par l’accouchement, qu’elles m’ont posé sur le ventre pour le « peau-à-peau » très en vogue.
Sur le moment, j’ai été effrayé par l’enfant et leur ai demandé si elles étaient sûres qu’il s’agissait bien du mien.
Je suppose que c’est cela découvrir la paternité ! »
Quentin, fabuleux papa d’un garçon de 6 ans
« Je ne me suis jamais senti devenir père car je fus père le jour même de la naissance de notre premier fils. Pour moi, c’était simple et avec ma très chère femme, Anne, nous avons tout fait pour élever “de notre mieux” nos cinq enfants. Nous avons eu beaucoup de chance.
Il y a quand même un jour où j’ai choisi ma place en bout de notre belle tablée et ceci, définitivement. J’étais fier 😉 »
Philippe, fabuleux papa de quatre garçons et une fille âgés de 36 à 23 ans, grand père de sept petits-enfants
« Quand me suis-je senti père pour la première fois ?
En 2009, j’ai perdu ma sœur, Sixtine, et pour la première fois je me suis projeté en tant que père car je me suis mis à la place de mes parents en imaginant ce qu’ils pouvaient ressentir. Je ne me suis pas “senti” père, bien sûr, mais c’est la première fois que je me suis projeté réellement.
Je pense l’avoir ressenti concrètement le jour où nous avons appris que ma femme était enceinte… sentiment partagé entre joie, peur et crainte ! La peur ou la crainte de ne pas assurer, la lourde responsabilité que l’on s’était “imposée” malgré tout, même si c’était un choix d’être parents ! Mais avec une joie profonde et l’excitation que cet enfant naisse vite car c’est long, malgré tout, 9 mois ! Et je pense que ce sentiment est revenu puissance 1000 une fois ma fille dans mes bras, avec la concrétisation de tout ce que tu imagines en tant que futur papa : le contact, le peau à peau, les échanges silencieux mais profonds avec un bébé… »
Thomas, fabuleux papa de 4 filles âgées de 11 ans, 9 ans, 4 ans et 2 ans
« Être père, qu’est ce que ça veut dire ? C’est devenir responsable de la vie d’un petit être qu’on a pas choisi ? Sentir mon cœur déborder d’amour et réaliser tout à coup que rien ne sera jamais comme avant, et ce, pour chacune des naissances de nos cinq enfants ? C’est accepter la responsabilité qui m’est confiée (ou qui me tombe dessus) de faire grandir ce petit être et lui donner les clés, les outils, la structure qui lui permettront d’être heureux plus tard ? C’est apprendre à être à l’écoute de son enfant, de son conjoint, de soi-même aussi un peu, et de sa foi si on a des convictions religieuses… C’est passer de cet état où je ne pense qu’à mon bonheur de jeune couple et celui de mes potes à cet état où un ingrédient de taille s’est ajouté à mon bonheur : ma famille ? C’est faire preuve d’une grande humilité en réalisant que j’ai (encore et à chaque naissance) tout à apprendre ?
Pour répondre précisément à la question de “quand”, c’était à la minute où j’ai su que ma femme attendait chacun de nos enfants. Père un peu différent à chaque fois, mais rétrospectivement toujours aussi heureux à chaque annonce de grossesse, toujours aussi ému, toujours aussi partagé entre une certaine angoisse et une folle confiance.
Je me suis senti père pour la première fois, cinq fois. »
Jean-Marc, père de trois garçons et deux filles âgés de 20 ans, 18 ans, 13 ans, 10 ans et 1 jour (+)
« En décembre 1976, ma femme, enceinte, portait Philippe depuis 3 mois et son ventre prenait forme. Très rapidement elle m’a associé à l’évolution de ce qu’elle vivait et aux différents contrôles liés au protocole de suivi : échographies, battement du cœur, les mouvements du fœtus qui bougeait dans son ventre et qu’elle me faisait palper, etc. C’est là que je me suis senti père pour la première fois car ce crescendo vécu jusque-là, convenait à mon rythme. Fin mai, je suis parti sereinement en déplacement professionnel. À peine arrivé, je fus bousculé par un coup de téléphone de ma femme m’annonçant que l’accouchement était imminent et qu’il fallait rentrer d’urgence. Quand je me suis pointé, nous n’étions plus dans le rythme “baba cool” précédemment apprécié : Philippe était déjà né. Le fils venait de coiffer le père au poteau. La maman était rayonnante car elle avait accouché plus vite que son ombre, et le père émerveillé pris son fils dans ses bras ; celui-ci avait 3 heures. »
Jean, Fabuleux papa de trois enfants âgés de 45 à 37 ans, grand père de neuf petits-enfants
« Être père ? Il serait simple de répondre que la première fois que je me suis senti père fut lorsque j’ai pris mon enfant dans mes bras à la maternité ou bien encore quand ce petit être a fait irruption dans notre foyer en hurlant à tue-tête, ce jour où a définitivement pris fin le tête à tête que nous entretenions avec mon épouse.
Non, pour ma part il a fallu attendre quelques années que ce petit garçon grandisse et qu’il ait besoin de moi. Pas pour le nourrir ou bien lui changer ses couches, je veux parler dans mon cas d’un besoin d’apprentissage et de transmission : faire du vélo, monter aux arbres, sauter un fossé, apprendre à nager, à respecter la nature. Ce sont ses sollicitations qui ont donné du sens à ma mission de père. Enfin, je me sentais utile ! Pas utile pour décharger ma femme des tâches quotidiennes, mais utile car je pouvais transmettre ce que mon père m’avait appris et faire grandir mon enfant, mon fils, dans les grandes étapes de construction de sa vie ! »
Fred, Fabuleux papa d’un garçon et trois filles âgés de 11 ans, 8 ans, 6 ans et 6 ans
« C’est indéniablement le premier enfant qui m’a fait devenir “père” et qui fait passer de l’état de jeune adulte un peu insouciant à celui d’adulte responsable… d’avoir donné la vie.
Ce qui est extraordinaire, c’est que l’on ne devient pas père du jour au lendemain mais la maturation s’est faite tout au long des 9 mois d’attente de ce premier joyeux événement : d’abord, voir sa moitié porter celui qui vous fait devenir père et mère, le sentir bouger lorsqu’on caresse le ventre de celle qui deviendra mère, participer aux séances de préparation à l’accouchement tous les deux, tout cela accentue le sentiment que quelque chose d’extraordinaire va advenir dans les mois qui viennent sans pour autant savoir en évaluer l’importance à ce moment précis.
Cela est couronné par le bain donné tout juste après la naissance à ce petit bout de vie que l’on ne sait pas très bien comment porter tant il est petit mais qui est en même temps merveilleux car tout est là : les petits doigts, les petits pieds, la petite tête etc.
Ces moments se renouvellent avec les autres enfants, chaque naissance est bien sûr différente, mais à l’arrivée du 2ème enfant, on est déjà père depuis quelque temps… Mais c’est toujours aussi magique. »