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Le vaginisme

Hélène Dumont 1 juillet 2020
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« Vaginisme ».

Voilà un mot peu connu ; en tous cas, pas assez. Beaucoup ne l’ont probablement jamais entendu. Pourtant, le trouble de la sexualité féminine qu’il désigne concerne encore de nombreuses femmes. 

« Cela fait 2 ans que nous sommes ensemble, m’explique cette jeune femme, mais notre sexualité est compliquée. Je n’arrive pas à être pénétrée. Mon vagin semble fermé. Il devient aussi dur qu’un mur que l’on ne peut franchir. Avec mon compagnon, nous avons essayé de très nombreuses fois, et cela s’est soldé par de profondes déceptions, accompagnées d’une immense tristesse. Si nous forçons, la douleur est insupportable. Nous inventons d’autres façons de faire l’amour, nous nous aimons profondément. Mais aujourd’hui, nous souffrons beaucoup. Cela a un impact sur notre désir, notre relation de couple. Je panique à l’idée de ne jamais être mère. Jusqu’à maintenant, nous n’avons pas consulté de professionnel, je pensais que j’avais besoin de temps. Et puis, j’ai honte. Si je ne m’ouvre pas, dois-je croire que je ne l’aime pas assez ? Ou que je ne suis pas normale ? »

Selon le DSM-IV*, le vaginisme est un « spasme involontaire, répété ou persistant, de la musculature du tiers externe du vagin perturbant les rapports sexuels ». Les muscles du périnée qui entourent le vagin se resserrent de telle façon que la pénétration devient douloureuse, difficile ou impossible. Ce dysfonctionnement, souvent méconnu et incompris au moment de sa découverte, entraîne une grande détresse personnelle, mais également au sein du couple. 

On différencie deux formes de vaginisme : le vaginisme primaire, et le vaginisme secondaire. 

Dans le premier cas, la femme n’a jamais connu de pénétration. Rien n’entre dans le vagin : ni pénis, ni doigt, ni tampon, ni spéculum …

C’est la forme de vaginisme la plus fréquente. 

Dans le second cas, la femme a déjà connu la pénétration. Mais un jour, pour de multiples raisons, celle-ci devient douloureuse**. Peu à peu, sous l’effet de la douleur ou de son appréhension, le vagin se contracte pour se protéger, empêchant toute pénétration. Le vaginisme peut être global, la contracture étant alors systématique ; ou situationnel, la contracture ne se produisant que dans certaines conditions. 

Ce qui conduit à appréhender et à traiter le vaginisme selon l’histoire singulière et relationnelle de chaque femme. 

D’un point de vue organique,

le vaginisme peut être la conséquence d’un dysfonctionnement corporel : un hymen un peu épais, une malformation, une blessure, une mutilation, une pathologie gynécologique (endométriose, herpès, MST, vestibulite, cystites à répétition…). Ces causes sont importantes à repérer pour que la femme soit prise en charge par un médecin qui sera en mesure de poser un diagnostic. 

Il est également important de vérifier les connaissances anatomiques qu’a la femme sur  son sexe et sur celui de son compagnon. De nombreuses femmes n’ont jamais osé regarder le leur dans un miroir, ni entrepris de partir à la découverte de celui de leur conjoint. Pourtant, c’est bien avec – et au travers – du corps et du sexe que nous faisons l’amour. 

« Mon vagin, je l’imagine un peu sombre et étroit ; je n’ai jamais eu l’idée de le regarder. Quand au sexe de mon compagnon, je le trouve un peu membré et cela m’impressionne », me partage une femme. La perception de son intimité est biaisée par ce qu’elle nomme de la « pudeur ». De la même manière, elle craint de s’approprier l’anatomie de l’homme qu’elle aime. 

Or, le corps est beau dans sa globalité…

…ET dans chacun de ses détails, et il est important de les nommer. La femme a besoin de connaître son intériorité sexuelle pour recevoir celui qu’elle choisira d’inviter. Tout comme elle a besoin d’apprivoiser ce pénis dormant ou en érection pour l’accueillir, tel qu’il est, dans sa réalité. Prendre le temps d’apprécier sa taille, sa couleur, le gland, les poils qui l’entourent, les testicules un peu molles, la finesse de la peau. Prendre le temps de s’approcher de cet autre sexe, avec la douceur du regard, d’une caresse, d’un baiser. Se familiariser, peu à peu, pour s’ouvrir, se reconnaître et se retrouver. 

Le vaginisme peut également résulter d’une éducation rigide, enfermante, intrusive, où la petite fille ne doit qu’obéir, sans pouvoir exprimer son désir ou ses goûts, contrainte de rendre des comptes. Rien ne doit être secret, car ces secrets sont sans valeur ni signification.

  • Comment s’ouvrir quand on a été bâillonnée ?
  • Comment accepter d’être pénétrée sans peur, quand on a grandi dans le devoir de révéler le peu de ce qu’il restait de nous-même ? 

Le vaginisme est parfois le prolongement d’une éducation où le sexe est considéré comme sale, tabou et déshonorant ou encore d’une approche ultra-sacralisée du sexe, emprunte de peurs et de projections complexes liées à la croyance qu’une sexualité consommée hors mariage conduit à la perte de l’honneur, de la valeur de la personne ET de sa famille. Dans ce contexte, n’importe quelle jeune fille aimant ses parents n’oserait leur infliger une pareille peine, une honte aussi insupportable, et risquer ainsi de perdre leur amour. Dans ces situations, être pénétrée fait peur.

Quel que soit le moment.

« Je n’ai pas seulement mal dans mon sexe, me confie cette femme. Je ne sais même plus quoi en penser en tant que fille : de mon sexe, de la sexualité en général et de la façon dont on m’en a parlé. Si je perds ma virginité, aurais-je encore de la valeur ? »

Une telle transmission moralisatrice de la sexualité qui ne vise pas à rendre la jeune fille plus autonome, plus heureuse, plus libre, mais qui met au premier plan l’honneur familial et le regard des autres, interroge. La seule préoccupation, en définitive, est que la jeune fille ne tombe pas enceinte. C’est ainsi que mes clientes me racontent des histoires entendues de leurs parents, oncles, tantes et grands-parents, sur un ton condescendant : cette femme « rentrée avec le polichinelle », ou telle autre, une « Marie couche-toi là ». Des paroles peu anodines, transmettant de façon implicite un message de jugement : les femmes qui ne gardent pas pour leur futur époux le « trésor de leur virginité » étaient montrées du doigts, accusées. 

Une femme de 50 ans m’a confiée que son père s’était longtemps vanté « de marier sa fille vierge » plutôt que de se réjouir de son propre bonheur. En étalant aux yeux de tous une intimité qui ne lui appartenait pas, il a plongé sa fille dans un profond désarroi. Seul lui importait d’échapper au déshonneur d’une grossesse hors mariage, réduisant cet évènement au signe visible d’une sexualité consommée, expression de pulsions non contrôlées, de faiblesse morale et donc d’une mauvaise éducation. 

Comme un verrouillage intérieur transmis en héritage, le vaginisme est souvent le fruit d’enfermements inconscients, de loyautés familiales, de peurs liées à l’intrusion ou encore, d’une mauvaise représentation de la pulsion masculine, de nos conflits relationnels. Mais la bonne nouvelle, chère Fabuleuse, c’est qu’on en guérit. 

La valeur d’une femme ne dépend pas de sa sexualité.

Elle est bien plus ! Le corps n’est pas sale, il est merveilleux. La femme doit pouvoir vivre la joie de l’accueil du sexe de l’autre sans avoir de compte à rendre à qui que ce soit. Elle doit pouvoir exprimer son désir, son plaisir, et revendiquer une sexualité libre et épanouie : elle n’en sera pas une pute pour autant. 

Elle a le droit de grandir et de devenir femme dans les bras de celui qu’elle aime. 

Elle a le droit d’être FEMME. 

D’accéder à cette partie d’elle pour, enfin, se reconnaître.

* Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux

** Ces douleurs génitales sont désignées sous le terme de « dyspareunie ».Pour en savoir plus sur le vaginisme : http://www.lesclesdevenus.org/



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Cet article a été écrit par :
Hélène Dumont

Après avoir suivi un parcours de Lettres et Civilisations, Hélène est devenue professeur des écoles puis conseillère conjugale et familiale. Très attachée aux problématiques de l’articulation du maternel et du féminin, elle travaille aujourd’hui en cabinet libéral au rythme de sa vie de famille : un chouette époux et 6 enfants ! Elle est l'auteure du livre Terre éclose : la sexualité au féminin.
https://www.helene-dumont-ccf.com/

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