Quatre enfants, quatre expériences de la maternité totalement différentes.
Quatre moments de vie, quatre saisons de couple, quatre personnalités, quatre constructions différentes. Et bien entendu, ces quatre voix, ces quatre types de besoin et ces quatre manières d’exister ne font pas poliment la queue les unes derrière les autres pour pouvoir s’exprimer chacune leur tour. Non, tout est mélangé, comme passé au blender, et ça s’entrechoque entre celui qui a besoin de silence et celle qui veut danser au milieu du salon, celui qui est rongé par l’anxiété et celui qui prend la vie avec la décontraction de Brice de Nice… Et nous, au milieu de tout ça, Fabuleux et Fabuleuse qui jonglons avec nos propres besoins, nos propres ressources et nos propres contraintes.
C’est éprouvant et beau en même temps.
Oui, parfois le télescopage entre les désirs des uns et les ressources des autres fait du bruit, parfois c’est la cacophonie. Parfois les larmes et l’épuisement, parfois les rires et les moments doux. C’est un peu ce baiser plein d’enthousiasme qui explose en coup de boule : on voit des étoiles, on cueille la tendresse, et on a les larmes aux yeux (parce qu’on a mal au nez), tout à la fois.
Chez les Fabuleuses, nous explorons de multiples facettes de la maternité, celles dont personne ne parlait, il n’y a pas si longtemps.
Aucune facette n’exclut les autres, comme dans le kaléidoscope de la vie de famille :
le mouvement perpétuel réorganise en permanence les émotions, les convictions, et ce qui était vrai à 8h30 ne l’est plus forcément à 20h30.
Ce n’est pas grave.
Tu peux vouloir abandonner tes enfants sur une aire d’autoroute à Vierzon, quand tout le monde s’excite en se lançant des Figolu à la figure tandis que tu essaies de relier Clermont-Ferrand à Quimperlé, seule au volant. Et une fois à destination, tu peux fondre d’amour en les voyant s’émerveiller des nuées de mouettes qui accompagnent le retour des bateaux au port.
Le kaléidoscope de ta vie de famille a juste tourné d’un ou deux degrés, et tout est différent.
Il y a eu des périodes, dans ma vie de maman, où j’ai cru que l’amour et la joie avaient disparu. Plus envie de voir mes enfants, plus envie de me réveiller des siestes-fuites dans lesquelles je sombrais profondément, plus d’étincelle. Et un jour, avec de l’aide, le kaléidoscope a tourné, un tout petit peu, la lumière est revenue au bout du tunnel-tube et tout est devenu différent. Pourtant rien n’avait changé à l’intérieur. Pas de nouveaux bouts de verre, pas de couleurs plus chouettes, pas de formes waou qui n’y étaient pas avant. Dans mon kaléidoscope, je voyais la même réalité, agencée autrement. Les facettes d’une même maternité venaient de se positionner d’une manière nouvelle et tous ces petits angles tranchants qui me blessaient si souvent s’emboîtaient de nouveau pour former une rosace magnifique.
Oui, chère Fabuleuse, parfois ça coince, parfois les moments de grâce et les bouffées d’amour sont trop fugaces, parfois tu te dis que dans ton kaléidoscope, une force mystérieuse n’a laissé que le verre noir et les angles aigus, et puis, hop, la lumière revient et un mouvement anodin redonne couleur et cohérence à toutes les facettes de ta vie de famille.
Dans cette histoire de kaléidoscope, il y a deux choses indispensables :
- de la lumière (sinon on ne voit rien)
- la certitude que chaque mouvement dessine un nouveau motif.
Parfois le motif est harmonieux, tout s’emboîte. Parfois c’est compliqué, anguleux, les pointes sont tournées vers l’extérieur et ça blesse. Pourtant, tout ce qui constitue les jolis motifs est bien là. La lumière aussi, est bien là. Tout est déjà là, en réalité. Il n’y a “plus qu’à” orienter ton kaléidoscope vers une source lumineuse et créer un mouvement pour que les morceaux de verre s’emboîtent différemment, mieux, peut-être.
Cette image m’a permis de faire la paix avec ce mystère profond : comment puis-je être aussi exaspérée par les contraintes de la maternité, et aussi comblée de joie par de brusques bouffées d’amour ? Quelle cohérence entre la mère excédée et la mère aimante ? Franchement, la réponse est : on s’en fiche. C’est le jeu du kaléidoscope. À aucun moment le bout de verre bleu ne se demande s’il est bien à sa place entre le rouge et le jaune, et pourquoi, tout à coup, il est en sandwich entre le vert et l’orange.