« Maman, est-ce qu’on a le droit de… ?»
Les enfants me demandent régulièrement s’ils ont « le droit ». On a besoin qu’on nous donne le droit, l’autorisation. Et là, ça tombe bien, Liane Foly nous la donne :
« On a tous le droit d’aimer sa vie ou pas, de faire sa route, de faire son choix. »
Honnêtement, on n’a pas vraiment besoin de sa permission. Et pourtant, moi, ça me fait du bien de l’entendre. Parfois, je laisse mes contraintes me dicter ma vie et je ne sais plus à quoi j’ai le droit.
On a le droit notamment de faire son choix. Toujours. Mais on choisit parfois un autre refrain. À ma connaissance, il n’existe pas dans le répertoire français, et pourtant, il rime ! Le refrain du « C’est comme ça, je n’ai pas le choix. » On se raconte qu’on n’a pas le choix. Alors qu’on l’a. Toujours. Attention, je ne dis pas qu’on a toujours l’embarras du choix, mais il nous reste toujours des options.
Je peux avoir moins DE choix de parfums de glaces mais je n’en ai pas moins LE choix de mon parfum.
Que l’on choisisse entre vingt parfums ou deux, on choisit quand même.
Quand je dis que je n’ai pas le choix, c’est que parfois, j’ai l’impression qu’il me reste juste le parfum rhum-raisin de la vie. Le goût que je déteste*. Et je lèche ma glace, contrainte et forcée.
Mais, j’aurais pu prendre le cornet tout seul. Ou pas de glace du tout. Ou une gaufre, bah oui pourquoi pas ? Et je pourrais aussi m’apercevoir qu’en fait, rhum-raisin, ce n’est pas si mauvais que ça.
*Je sais que c’est un parfum clivant, peut-être que pour toi, ce serait le summum du kiff et tu as le droit, on a tous le droit ! Remplace donc juste par ton parfum détesté pour choper la métaphore !
Exemple de glace rhum-raisin de la vie :
Je ne bosse pas parce que mon salaire ne couvrirait pas les frais de garde des enfants. Je choisis le critère économique. Ce critère me semble tellement raisonnable et logique que j’en oublie que c’est un choix.
Si je prenais la gaufre, je pourrais décider que la différence entre mon salaire et les frais de garde est le prix de mon épanouissement professionnel.
Ou revenir à la glace rhum-raisin parce que je préfère avoir un plus grand pouvoir d’achat et que grâce à ce choix, je me sens plus à l’aise financièrement.
Autre exemple de rhum-raisin de la vie :
Je n’ai pas d’autres choix que de bosser. En étudiant ma situation financière, j’en déduis que faire garder mes enfants et poursuivre mon activité professionnelle est la seule possibilité et je subis.
Si je ne prenais que le cornet, je pourrais peut-être trouver un moyen de réduire les besoins du foyer et découvrir des sources d’économie qui me permettrait de ne pas bosser ou moins pour rester auprès de mes enfants.
Je pourrais aussi ne pas prendre de glace du tout : ne pas bosser, prendre un énorme crédit à la consommation, voler dans les supermarchés. Personnellement, ça ne me paraît pas envisageable et finalement, je choisirai la rhum-raisin, mais je saurai que je choisis rhum-raisin parce que c’est la personne que j’ai envie d’être : une personne responsable et honnête.
Vous reprendrez bien une petite boule ? Il ne me reste que de la rhum-raisin !
Je n’ai pas le choix, je dois conduire mes enfants à leurs différents rendez-vous. Mes enfants ont des besoins médicaux particuliers ou des activités extrascolaires.
Si je prenais juste le cornet, je pourrais peut-être m’arranger avec d’autres parents et mutualiser certaines conduites. Si je prenais la gaufre, je pourrais embaucher quelqu’un pour faire ces conduites (à passer encore une fois au crible économique). Et je pourrais tout autant ne pas prendre de glace du tout : je ne les emmène nulle part. Tant pis pour leur élocution, tant pis pour leur rééducation, tant pis pour leur progrès en flûte traversière.
Mais je peux aussi reprendre ma « rhum-raisin » en me disant que j’ai envie d’être cette mère-là, qui passe des heures sur les routes, juste pour l’épanouissement de ses enfants.
Une petite dernière ? Rhum-raisin ?
Je n’ai pas le choix, je dois bien faire cette tâche, mon conjoint ne fait rien. Je ne vois personne d’autre pour exécuter cette tâche, je dois donc la faire, contrainte et forcée (et de mauvais poil).
Ou je pourrais prendre un cornet et redéfinir avec mon coéquipier un plus juste partage des tâches.
Ou la gaufre, embaucher quelqu’un. (La gaufre coûte hyper cher, je sais ^^)
Ou pas de glace du tout : on verra bien ce qui se passe si cette tâche-là n’est jamais accomplie.
Ou finalement, aimer la rhum-raisin, aimer accomplir cette tâche parce que j’en ai envie pour moi finalement, parce que c’est la femme que j’ai envie d’être. Librement.
Cette métaphore sucrée peut avoir un goût un peu amer.
On peut penser que vraiment, dans notre cas, on n’a pas le choix. On a évidemment toujours le droit de se dire qu’on n’a pas le choix. Mais il me semble que changer ce refrain est une bonne manière d’user de notre droit à aimer notre vie plutôt que pas.
Et toi ? Est-ce que tu as du parfum rhum-raisin dans ta vie ?
Est-ce que tu as déjà envisagé la gaufre ? Est-ce que tu as déjà expérimenté qu’en fait, ce n’était pas si mauvais que ça, la glace rhum-raisin ?