Nous sommes vendredi. Fin de la semaine. Je suis dans une énergie haute avec l’envie d’accomplir beaucoup de choses aujourd’hui et pourtant je traîne la patte.
Malgré tout, je décide de ne pas m’écouter et de rentrer dans cette journée comme elle était prévue.
7 h 30 : Lever des enfants et départ à l’école. Je cours, je presse les enfants, je suis en retard.
8 h 30 : Ménage. Je suis pressée de finir avant mes rendez-vous professionnels et je casse une magnifique dame Jeanne. Je suis déçue et en colère. Je ramasse vite les morceaux et les mets dans un coin en attendant de les mettre à la poubelle dehors en rentrant ce soir.
9 h 30 : J’enchaîne les rendez-vous professionnels.
12 h 30 : Rendez-vous avec des amis pour un déjeuner en ville. Je suis encore en retard !
14 h : Rendez-vous perso.
16 h : Je vais chercher les enfants à l’école et fais une petite course au passage.
17 h 30 : En repartant pour un autre rendez-vous, j’oublie les morceaux de verre qui se trouvent devant la porte de la maison… et je cogne ma jambe dedans.
17 h 32 : Je suis étalée sur le carrelage de la cuisine, la jambe en sang, les enfants un peu affolés.
17 h 40 : Une voisine débarque pour nous garder les enfants.
17 h 45 : Je pars aux urgences avec mon mari.
17 h 50 : J’apprends que j’en ai pour 4 heures d’attente pour me faire recoudre. Mon mari ne peut pas rester.
18 h : J’attends… Enfin ! Oui je dis bien enfin, car sincèrement je ne sais pas ce qui aurait pu réussir à me stopper dans ma course, tel un rongeur tournant sans cesse sur sa roue.
4 heures d’attente !
Et le moment pour moi de faire face aux conséquences de mes choix. J’ai été pressée toute la journée. À aucun moment je ne me suis écoutée. À aucun moment, je n’ai décidé de réévaluer ma journée. À aucun moment je n’ai pu dire « Non je ne peux pas », que ce soit à moi-même ou aux autres.
Ma journée était loin d’être finie : je devais terminer l’après-midi à la chorale et enchaîner avec une soirée d’anniversaire pour une amie. Mais mon corps a dit STOP ! Tel un guerrier courageux qui se lance contre son ennemi pour enfin recevoir le coup de grâce.
Ces 4 heures d’attente ont été salvatrices.
Je suis passée par de multiples émotions : l’ennui, la déprime, la colère contre moi-même et le service de l’hôpital, la fatigue, puis… le silence. Enfin.
Et là, uniquement à cet endroit-là, j’ai pu ouvrir les yeux sur mes choix et leurs conséquences. J’ai vu. J’ai vu combien j’étais responsable de cette situation et non pas les autres. J’ai vu combien les conséquences de la hâte dans ma vie auraient pu être lourdes. J’ai vu le panneau “STOP”. Et je me suis arrêtée.
Depuis ce jour, j’ai pris un engagement envers moi-même :
Je veux éradiquer la hâte de ma vie.
Je ne veux plus vivre sous pression continue, passer mes journées à me dépêcher et à speeder ma famille.
Depuis ce jour, j’ai appris que le problème n’est pas quand tu as beaucoup à faire, mais quand tu as TROP et que la seule manière de t’en sortir c’est de te dépêcher ! C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de changer mon style de vie.
Je veux un style de vie qui me permet de vivre ce qui est essentiel pour moi tout en profitant du chemin. Je veux faire calmement, efficacement et avec joie ce qui compte vraiment. Je veux sentir mon âme, vivre le moment présent autant que je peux pour rester connectée à moi et aux autres.
Depuis ce jour, j’ai entamé plusieurs changements dans mon rythme de vie dont un significatif :
Celui de réapprendre à m’ennuyer.
Je crée volontairement des espaces temps pour attendre, sans rien faire d’autre, sans sortir mon téléphone ni vaquer à une autre occupation.
Lorsque j’ai envie de m’exercer, je choisis la file la plus longue au magasin, j’arrive très en avance, je roule sans dépasser la limite de vitesse, même si la voie est libre ! (Oui je sais, ça va de soi, mais que celle qui n’a jamais dépassé la limite me jette la première pierre !)
Chère Fabuleuse, je te vois déjà sourire…
Mais sache que c’est dans ces moments là que je vois enfin. Je vois le sourire de la petite fille assise dans le chariot en face de moi, la maman au bord des larmes dans sa voiture, mes enfants qui me racontent leur journée et moi qui écoute, vraiment… Je m’ouvre au silence en moi.
Le changement, c’est trois pas en avant et deux en arrière.
Je vais être très honnête avec toi. Je rechute encore souvent, mais de moins en moins. Certaines périodes sont plus faciles que d’autres. Mais à chaque fois je me rappelle le jour où je me suis blessée et je reviens à moi-même en répétant cette phrase :
« Ralentis. Respire. Reviens au moment présent. Demeure… »