Iris ou Madame en majesté - Fabuleuses Au Foyer
Maman épuisée

Iris ou Madame en majesté

Hélène Dumont 5 janvier 2018
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J’entends mes chaussures à talons qui claquent. Sauf que je ne les ai pas aux pieds.

« Bon-your maadââme ! Cha va ? »

Je sors la tête du hublot de la machine à laver d’où je viens d’extraire un troisième tas de linge mouillé.
Elle est là, plantée à mes côtés. Elle me fixe en hochant la tête, fièrement perchée sur 10 cm de cuir en daim retourné qui m’appartiennent, la bouche barbouillée de chocolat.

« Mmmh, ch’est bon, dit elle en remuant le papier chiffonné de la papillote fraîchement dérobée. Mmmmh, ch’est la pi-pa-yot. Cha va maaadâââme ? »

« Tu vois Iris, il y a 2 secondes, j’allais bien. Mais là, NON. J’en ai ras le pompon. »

Zen, restons Zen : la musique de Zazie me traverse l’esprit.

Cette chanson a dû être inventée pour moi quand ma marmaille me gonfle ; en tous les cas, probablement pour toutes les mamans en mal de « zénitude » à certains moments de leur journée. D’ailleurs, je me disais : tiens, mais il est onze heure, et je n’ai essuyé qu’un seul caprice et deux bêtises ?

Iris : 2 ans, 7 mois, 5 jours et quelques heures.

Ou madame en majesté.

C’est ma cinquième, je suis plutôt du genre rodée. Mais je dois reconnaître que mon réservoir de patience aiguë est bientôt vide. À sec. Madame Iris traverse une période rythmée de caprices et ne fait que des c********.

Ce matin, j’avais envie de me faire plaisir.

Après quatre garçons, Iris est ma première fille. Vous comprendrez mon petit faible : celui de la vêtir, de temps à autre, d’une jolie robe à collerette. Comme elle a les joues roses et les yeux verts, ça lui donne des airs d’enfant très sage. Et parce que je suis une maman naïve, en mal de solutions en ce moment pour me faire obéir, je me dit que cette fois-ci, l’habit fera le moine.

Le résultat est désolant.

Iris se tord le derrière sur mes chaussures, qu’elle risque d’abîmer bientôt si je ne réagis pas, tandis que le potentiel de mettre du chocolat baveux sur mon linge propre augmente.

Au diable la pédagogie et la psychologie.

Il s’agit de mes chaussures, on est bien d’accord, d’une papillote volée et de la survie de mon linge. Il faut agir vite.

« Oh ! C’est très beau tout ça, je lui dis gentiment, sauf que… tu vois, non seulement tu as MES chaussures (les plus jolies), mais en plus tu as pris une papillote (où ça, en fait ?) sans me demander ».

Je lui relève un pied. Iris se cambre en hurlant « Nannnnn ! » pour finir en sac à patate sur le carrelage de la salle de bain. Vous connaissez certainement la technique efficace du « sac à patate » : l’enfant se fait tout mou par terre pour qu’on ne puisse plus l’attraper sans se faire un tour de rein. Généralement, c’est la séquence qui précède celle de l’orage. J’esquive mon linge propre. Bouchez-vous les oreilles, ça va crier.

Cette période, en théorie, je la connais.

C’est la fameuse crise des deux ans, l’âge du « terrible-two ». En pratique, je disais plus haut que j’avais un peu d’expérience, mais il faut croire que certains enfants sont plus surprenants que d’autres. Ou qu’on oublie vite.

  • Madame Iris a pris conscience qu’elle pouvait dire « non ».
  • Madame Iris veut s’exprimer.
  • Madame Iris souhaite faire à sa mode.
  • Madame Iris est frustrée.

Et tout cela provoque quelques problèmes relationnels entre elle et moi.

Tenir dans la tempête,

voilà LE rôle de ma vie (de maman). Tenir bon, les jours de mauvais temps.
Je peux rester bienveillante, compréhensive, écouter, garder mon calme, me dire que tout est normal, éviter les situations de crise et ajouter Sainte Patience à ma litanie quotidienne, mais force est de constater que ma chère petite fille ne l’entend pas de cette oreille, qu’elle me met à rude épreuve, et que j’ai mes limites.

Si caprice il doit y avoir, caprice il y aura, et chacune de nous deux devra se débrouiller avec sa propre frustration. Pour moi, celle de ne pas avancer aussi vite que je le voudrais dans mon bazar journalier, tout en profitant de ses cris stridents ; pour elle, celle de ne pas faire ce qu’elle voudrait selon son bon plaisir.

À l’heure où je vous écris, Iris se réveille de sa sieste.

« Bravo ! Tu n’as pas mouillé ton lit. Troisième jour sans couche. »

Ce que j’aime dans ma vie de maman, c’est qu’il y a des colères mais aussi des progrès, ça équilibre. Ma petite fille me dit qu’elle grandit, c’est chouette, je ne l’oublie pas.

Mais revenons à nos moutons.

Iris a de la suite dans les idées :

la voilà qui se précipite à nouveau sur les chaussures que je n’ai pas rangées (et flûte, pourquoi je ne les ai pas rangées, d’ailleurs ? Parce que le téléphone a sonné, mon mari est rentré, j’ai répondu à ce mail, puis dessiné un bonhomme… ). Une fois la paire enfilée, elle remue son arrière-train et attrape mon sac à main. La vie est belle de si haut, semble-t-il.

On recommence le scénario :

« Bon-your maadââme, ch’a va ??? »

J’ai un terrible doute : est-ce qu’elle m’imite ? Ne nous attardons pas sur la question, la réponse est risquée… Et, quoiqu’il en soit, je dois récupérer mes chaussures, tout en sachant pertinemment qu’en chaque enfant de deux ans normalement constitué, un Gremlins sommeille. Défi du jour, te voilà.

J’ai envie de fermer les yeux,

de demander un « joker », de pratiquer la politique du « pas vu, pas pris », ou de crier « pouce ». Je reconnais qu’elle me fatigue malgré son air mignon. Je sais également que je ne suis pas seule et qu’à priori, cette période devrait bientôt toucher à sa fin. Beaucoup de mamans de « terrible-two » me font part de leur incompréhension, de leur lassitude, de leur épuisement :

« C’était un bébé charmant, et voilà que maintenant, je ne gère plus rien, il se roule par terre à la moindre contrariété ».

Je ne reviendrai pas sur le fait que l’enfant grandit, mais plutôt sur les conséquences de cette évolution nécessaire. C’est qu’à coup de pleurs et de hurlements, l’enfant renvoie à sa mère une image négative de ce qu’elle est.

Certaines mamans me confient qu’elles ont l’impression d’être de « mauvaises mères »…

… incompétentes, incapables de comprendre ce que souhaite leur petit prince ou de se positionner.
Ajoutez un peu de fatigue, un zest de manque de confiance en soi, un stress professionnel, une dispute avec le conjoint, un vague à l’âme, une grossesse, et vous obtenez le cocktail explosif parfait pour péter un plomb et culpabiliser.

Nous ne sommes pas égales face à cette fatigue, nous n’avons pas non plus la même résistance. Si vous sentez que la vôtre à ses limites, fermez les yeux pour vous recentrer un peu ; dîtes vous « je suis normale », et cherchez vite une personne, une amie, un groupe, un blog, un lieu qui prendra votre relai ou saura accueillir votre désarroi, vos questions, pour vous faire respirer et prendre du recul, proposer quelques solutions.

J’écris, j’écris, mais où est ma fille ?
Toujours dans mes chaussures… Vous savez quoi, je lâche l’affaire, on dira que je ne suis pas assez sévère. Allez Iris, on va faire du vélo. La voilà qui saute dans ses bottes. Finalement, c’est qu’elle est bien dans ses pompes.



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Cet article a été écrit par :
Hélène Dumont

Après avoir suivi un parcours de Lettres et Civilisations, Hélène est devenue professeur des écoles puis conseillère conjugale et familiale. Très attachée aux problématiques de l’articulation du maternel et du féminin, elle travaille aujourd’hui en cabinet libéral au rythme de sa vie de famille : un chouette époux et 6 enfants ! Elle est l'auteure du livre Terre éclose : la sexualité au féminin.
https://www.helene-dumont-ccf.com/

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