À mesure que le mercure augmente, dans ma tête, ça commence aussi à s’affoler : il va bien falloir que je sorte mon maillot et expose mon corps aux yeux de tous.
L’été, synonyme de légèreté et d’insouciance, a toujours été pour moi été un moment de stress, mais surtout de “body shaming”.
Késako ? Le body shaming, c’est le courant qui consiste à critiquer ou insulter ouvertement le corps de quelqu’un, ou d’une catégorie de personnes. Que ce soit dans la rue, ou les réseaux sociaux, mais aussi à la télévision ou dans les magazines, ou lors d’un recrutement pour un emploi.
Aujourd’hui je ne veux pas te parler de body shaming en général, mais des effets de ce fléau sur notre dialogue intérieur, et sur le mien en l’occurrence.
Moi, devant la glace de ma chambre :
« Pfff, toujours pas assez de seins ! »
Moi, dans une cabine d’essayage :
« Décidément, ce petit ventre ne veut pas disparaître… »
Résultat ? J’ai honte de mon corps et le lui fais bien sentir : je rentre le ventre, je porte des soutiens-gorge rembourrés… Je n’en suis plus à m’affamer à coup de salade verte histoire de ne pas faire trop tâche sur la plage, mais quand même. Je ne suis pas franchement tendre avec mon corps et ses petites imperfections (que moi, simple mortelle, je ne peux pas Photoshoper d’un coup de baguette magique).
D’aucuns me répondront : « Quoi, tu n’aimes pas ton corps ? Arrête 5 minutes et regarde-toi, il y a bien pire que toi, alors arrête de te plaindre. »
Mais je ne me plains de rien ! Et je me sens d’autant plus honteuse de ne pas raffoler de mon corps que oui, en effet, “ça pourrait être pire”.
Alors, j’aimerais une bonne fois pour toutes arrêter cette comédie de la honte, accepter mon corps tel qu’il est (parce que je peux vous garantir qu’il en a bavé et que je lui dois une fière chandelle).
Sauf que “faire la paix”, ça ne se décrète pas.
S’accepter telle que l’on est, non plus (surtout quand on est abreuvée en permanence de publicités pour les maillots de bain en ce début d’été !).
Pour faire la paix, je sais qu’il faut d’abord demander pardon. J’en sais quelque chose en ce moment avec les disputes incessantes entre mes deux garçons à qui je demande toute la journée de demander pardon à l’autre, histoire de “faire la paix”. Mon corps, malgré tout ce que je peux lui reprocher, il en a vraiment bavé et il a vraiment assuré. Alors, merci pour ça, déjà !
Et puis, pardon aussi, à toi, mon corps
Pardon de t’infliger tant de souffrances, des souffrances invisibles, en t’adressant presque en permanence des reproches destructeurs.
Je sais aussi qu’on ne peut pas changer en un coup de baguette magique des propos très négatifs en louanges… mais que tout commence par changer quand on arrête de se focaliser sur les mêmes détails (au hasard, le ventre et la poitrine).
Eh oui, parce que notre cerveau se programme pour ne repérer que ce sur quoi nous mettons notre mon focus. Voilà mon focus à moi :
“J’ai le ventre flasque et pas un pet de poitrine… Mais quelle horreur, on dirait un mec !”
En vrai, je n’ai pas seulement un peu de bidon qui dépasse du jean, ou juste une poitrine de pré-adolescente alors que j’ai 35 ans. J’ai aussi quelques atouts et des jolies choses qui ne demandent qu’à pouvoir s’exprimer tranquillement, sauf que :
Mon cerveau a été mal programmé
Je l’ai entraîné à ne s’arrêter que sur mon ventre et ma poitrine… donc le reste, je le zappe totalement.
Alors bien sûr, je ne vais pas pouvoir changer la façon dont j’ai programmé mon cerveau du jour au lendemain. Mais j’ai le pouvoir de commander à mon cerveau de se concentrer sur d’autres aspects de mon corps : mes longues jambes, mes yeux verts.
Ce ventre pas assez ferme, ces seins pas assez bombés, évidemment, je ne vais pas me mettre à les adorer comme par magie. Mais je peux remplacer les critiques incessantes que je leur adresse par de la neutralité, dans un premier temps, puis ensuite par de l’amour.
Brené Brown, grande spécialiste de la honte, explique que pour mettre la honte au tapis, il faut faire preuve de vulnérabilité. Et comment fait-on preuve de vulnérabilité ? En posant des actes de courage.
Alors quand les magazines féminins nous serinent à longueur de pages des astuces pour avoir un ventre plat et être sublime en maillot pigeonnant, voilà le challenge que je me lance, pour cet été : je vais faire preuve de courage et assumer ma poitrine menue en portant un maillot de bain sans rembourrage.
Oui Madame !
Un petit pas pour la femme, mais un grand pas vers plus de bienveillance pour moi-même.