Astrid Veillon : « Il n’y a pas de mère parfaite, chacune fait comme elle peut » - Fabuleuses Au Foyer
Vie de famille

Astrid Veillon : « Il n’y a pas de mère parfaite, chacune fait comme elle peut »

Agathe Portail 30 mars 2022
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Astrid Veillon, c’est une voix, un bouillonnement d’énergie, un arc à dix cordes et une présence qui accompagne la vie des Français depuis des années sur scène et à l’écran. Léa Soler, son personnage actuel, retrouvera très bientôt son public à l’occasion de la diffusion prochaine de la Saison 6 de Tandem sur France 3.

C’est aussi une mère, une compagne et une femme d’une sincérité absolue qui ne s’encombre pas de précautions de langage.

Lorsqu’elle rencontre l’homme de sa vie et qu’elle se sent prête à accueillir un enfant, le temps passe et l’enfant tarde. Elle vit alors ce temps d’attente comme une punition, d’autant que le corps médical ne cesse de soulever toutes les raisons hormonales ou physiologiques qui freinent la possibilité d’une grossesse.

«  À un moment je m’en suis remise à la vie, parce que j’ai puissamment foi en la vie. » 

Cet acte d’abandon lui a permis de regagner une forme de sérénité et finalement, Jules est entré dans sa vie.

Le chamboulement physique et psychologique de la grossesse a suffisamment secoué Astrid Veillon pour qu’elle en fasse un livre*. Cependant, elle ne se donne pas la mission de « prévenir » ou de « démystifier » la grossesse en clamant qu’on ne l’avait pas prévenue. 

« Par nature, la femme est prête, qu’on le veuille ou non, la femme est « conçue » pour faire des enfants, même si tout n’est pas toujours simple. Nous sommes prêtes, et en même temps nous ne serons jamais assez préparées. Aujourd’hui, on veut se préparer à tout, tout maîtriser, même sa dernière heure… On est allées jusqu’à perdre notre instinct finalement, à vouloir tout maîtriser. Mais l’aventure [de la maternité] est tellement unique et personnelle que toute la préparation du monde ne sert à rien. »

Astrid Veillon croit en la singularité de chaque expérience,

singularité qui invalide la plupart des conseils bien intentionnés. Dans son livre, point de conseils, mais une sincérité qui déculpabilise toutes celles qui n’expérimentent pas cette grossesse épanouissante qu’on nous vend comme étant la norme.

« Peut-être que par ce genre d’écrit, on peut arriver à déculpabiliser les femmes enceintes, mais à les préparer, certainement pas. C’est une histoire intime qui n’appartiendra qu’à elles. L’information qui existe sur le sujet est nécessaire mais on arrive à un excès qui devient presque dangereux, parce qu’on essaie de s’identifier, et quand l’identification ne fonctionne pas on se dit qu’on n’est pas normale. »

Est-il nécessaire d’en passer par la maternité pour se connaître pleinement ?

Celle qui se méfie des gens bardés de certitudes répond :

« Il y a eu la femme d’avant et la femme d’après. Je suis passée par des doutes, des peurs incommensurables, des étapes extrêmement douloureuses. Est-ce que je sais aujourd’hui qui je suis réellement ? Je ne suis pas sûre. Je connais mieux mes besoins, ce qui est bon pour moi, j’apprends à dire non. Est-ce la maternité ou l’évolution naturelle de l’âge qui apporte la maturité ? Je ne sais pas. »

À l’arrivée de Jules, Astrid Veillon a tout appris sur le tas, sans pouvoir se référer à un modèle quelconque. 

« J’ai l’impression d’être passée sans transition de l’adolescente à la mère.

J’ai mené une vie chaotique et difficile jusqu’à mes 21 ans. Puis à mon arrivée à Paris, j’ai connu l’insouciance, la bringue, et à 38 ans j’ai rencontré l’homme de ma vie dont je suis tombée enceinte un an après. J’étais une gamine : je pleurais comme une enfant, je réagissais comme une enfant et du jour au lendemain, je suis devenue mère. J’ai l’impression d’avoir sauté l’étape de la femme. »

En devenant mère, Astrid Veillon a réussi à pacifier sa relation avec celle qui l’a eue à vingt ans à peine. 

« Je sais qu’elle a fait ce qu’elle a pu. Je sais que c’est difficile d’être mère. Il y a des choses que je ne comprendrai jamais, je ne peux pas tout comprendre, mais je ne lui en veux plus, j’ai décidé de ne plus la juger. »

Les contraintes inhérentes à une carrière d’actrice sont multiples : il est, entre autres, extrêmement préjudiciable de disparaître des radars pendant trop longtemps. Cependant, Astrid Veillon assume pleinement le fait d’avoir adapté sa vie professionnelle de manière à vivre sa nouvelle vie de mère : 

« Je vais passer pour une réactionnaire mais je ne peux pas concevoir d’avoir un enfant si c’est pour ne pas m’en occuper. Je savais que je n’aurais pas d’autre enfant. J’ai renoncé aux projets qui ne méritaient pas que je me sépare de mon fils. Je voulais voir sa première dent, entendre son premier mot, voir ses premiers pas. Je n’ai jamais manqué un anniversaire. Il est vrai que j’ai eu la chance d’avoir un super papa pour mon fils. Ce n’est pas que ma vision mais un enfant ça ne se fait pas toute seule, ne serait-ce que pour l’enfant. »

La vie d’actrice, comédienne et autrice impose des déplacements,

et Astrid Veillon se souvient d’une mise au point salutaire avec Jules, 8 mois :

« J’ai dû partir deux jours et son père m’a appelée : Jules refusait de manger. J’ai fait mettre le téléphone en haut-parleur et lui ai dit très simplement « Écoute moi bien. Tu es le plus beau cadeau que la vie m’ait donné. Je t’aime plus que tout au monde, ta place dans ma vie est essentielle. En revanche, j’ai ma vie, et tu ne me feras pas culpabiliser d’aimer ma vie en dehors de toi.«  Il a compris le message, cinq minutes après il mangeait de nouveau. »

Lorsqu’elle a commencé à tourner Tandem il y a sept ans, Astrid Veillon reconnaît que son fils vivait son absence comme un abandon.

« Quoi qu’on fasse, ce sera de notre faute. Il n’y a pas de mère parfaite, chacune fait comme elle peut et surtout comme elle veut. De toutes façons, ce ne sera pas simple ».

L’énergie que dégage Astrid Veillon est telle qu’on l’imagine difficilement expérimenter l’épuisement.

Cependant elle se revoit passer l’aspirateur et faire tourner une machine pendant la sieste de son fils nourrisson et elle reconnaît qu’elle aurait mieux fait de dormir en même temps que lui plutôt que de galoper, encore une fois, après le mythe de la mère parfaite.

« C’est ça qui nous épuise, cette mère sur papier glacé. Ce côté « mais si je ne le fais pas, qui va le faire », ou encore « mais moi je ne travaille pas, et mon mec, si, donc c’est à moi de gérer tout ça ». Donc on n’écoute pas nos sage-femmes qui nous disent de nous caler sur le rythme de notre bébé et on s’épuise au lieu de dormir. Il faut être gentille avec soi, personne d’autre ne peut comprendre, même le papa. Par exemple, le père de Jules voulait qu’on garde le berceau dans notre chambre. Au bout de deux jours je l’ai mis dans sa chambre, c’était impossible de fermer l’œil s’il dormait avec moi. Il m’a fait la tête ? Eh bien tant pis. Faisons ce qui est bon pour nous : pour être bien vous-même, faites-vous du bien. » 

Neuf mois dans la vie d’une femme, Editions Calmann-Levy, paru en septembre 2010


Les coups de coeur d’Astrid Veillon

Un film : Babel d’Alejandro Gonzales Inarritu. « C’est un petit bijou de cinéma, autant pour le thème, l’intensité, les décors, les paysages que pour la mise en scène et le casting. J’ai été bouleversée par ces destins croisés, confondus, scellés. »

Un livre : Le Chemin le moins fréquenté de Scott Peck. « Comment ce livre est-il arrivé à moi ? Je ne sais plus, mais il a été une révélation, une nouvelle façon d’aborder la vie. »

Une citation : « Ne laisse jamais personne te dire ce dont tu es capable, c’est à toi de choisir et de vivre ta vie » de Laurent Gounelle. « Je crois que Jules la connaît par cœur tellement je la lui répète ! »

Une chanson : Aux armes citoyennes de Zazie, « pour la beauté du texte ».



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Cet article a été écrit par :
Agathe Portail

Maman de 4 enfants (très) rapprochés et girondine d’adoption, Agathe Portail écrit des romans adultes édités chez Actes Sud, Calmann Levy et J'ai lu, mais aussi des romans historico-fantastiques édités par Emmanuel Jeunesse.

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