Tu es dans les deux camps - Fabuleuses Au Foyer
Maman épuisée

Tu es dans les deux camps

femme en double
Myriam Oliviéro 14 juin 2023
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« Tout ce qu’elle avait à faire pour accepter leur aide, c’était de laisser tomber cette impulsion de se mettre aux commandes et de faire que tout soit parfait. »

On dirait une phrase tirée d’un roman à l’eau de rose ou d’un énième manuel de « dév’ perso », tu ne trouves pas ? Ce n’est pas tout à fait le cas, mais un peu des deux quand même : elle vient de Pourquoi les femmes font des burn-out d’Amélia et Emily Nagoski, qui y décortiquent scientifiquement les mécanismes du stress chez les femmes et démontrent comment le fait de créer du lien peut nous sauver.

Si on s’en sort très bien toute seule pour se fixer des objectifs inatteignables

— par exemple, vouloir boucler son bilan comptable, organiser la kermesse de l’école sans étriper aucun membre de l’APE, sortir 48 verrines de cappuccino glacé carottes cumin pour le brunch avec les collègues, et se préparer pour le marathon des JO de Paris, tout ça avant le 25 juin —, on éprouve « bizarrement » plus de difficulté à demander : « Pourriez-vous me tenir la porte, s’il vous plaît ? Ce n’est pas évident avec ma poussette… »

Il n’y a pas très longtemps, j’ai accompagné mon cadet à un tournoi de foot qui durait toute la journée. Ce n’est pas tout à fait une partie de plaisir pour moi… Je n’ai rien contre le foot, mais je ne partage pas toujours la conception que d’autres adultes ont du sport de loisir adressé à des enfants de 8 ans. Ce qui me plaît, c’est de voir mon fils s’amuser en plein air avec des copains et revenir à la maison fier comme un paon avec sa médaille : il n’a marqué aucun but, mais il a participé au jeu d’équipe et a passé une chouette journée. 

Nous étions plusieurs parents à encourager, avec plus ou moins de verve, nos futurs Lionel Messi (lol), et l’une des mamans devait, en parallèle, s’occuper de sa petite fille de 16 mois. Toi-même, fabuleuse maman, tu comprends que cela peut être vraiment compliqué à un moment donné. Pas simple pour la choupette de faire la sieste dans une ambiance pareille ! J’ai alors simplement proposé à la maman d’aller faire un tour en poussette avec sa fille pendant qu’elle suivait le match de son fils.

Sa réponse a été rapide, gentille et claire : « Non merci, ça va. »

En réalité, ça n’allait visiblement pas si bien que ça, mais j’ai compris qu’accepter de l’aide, pour cette maman, aurait été vécu comme un aveu d’incompétence maternelle. 

Je ne cherche pas à être condescendante. Cette situation m’a plutôt ramenée quelques années en arrière, quand c’était mon fils aîné que j’accompagnais au tournoi de foot, avec le petit frère d’à peine deux ans qui ne tenait pas en place.

En tant que maman de jeunes enfants, je n’étais pas prompte, moi non plus, ni à demander ni à accepter de l’aide.

« Je gère ! » Quitte à en baver, à suer, à péter un câble — en silence si possible —, à m’épuiser… je préférais mille fois « gérer » que laisser quelqu’un prendre le relais. Certes, les regards désapprobateurs, voire exaspérés, de certaines personnes qui sont promptes à juger, et bien lentes à soutenir, ne font que durcir cette carapace que l’on peut bâtir autour de soi et de son petit monde. « Tu as voulu des enfants ? Assume ! », peut-on entendre résonner dans des conversations familiales ou sur les réseaux sociaux.

Mais, en fait, assumer, est-ce que cela exclut toute forme de soutien ?

Non ! Et je dirais même : au contraire ! Beaucoup de mamans nous font part, quand elles nous écrivent par mail, de leurs multiples remises en question, doutes, craintes de mal faire. Cette peur d’être une « mauvaise mère » les taraude. Notre réponse est simple : si tu te poses des questions, si tu doutes, c’est que oui, tu es une bonne mère. Tu es imparfaite, tu te plantes, tu ne sais pas toujours quoi dire ou faire, tu cries, tu culpabilises, tu pleures dans ton coin, mais tu les aimes plus que tout ? Tu es une bonne mère. Tu aimes tes enfants et tu fais de ton mieux, sincèrement, chaque jour et chaque nuit : tu es une bonne mère.

Alors, pourquoi ne pas desserrer un peu ta cuirasse de maman-qui-déchire-tout-mais-qui-au-fond-ne-serait-pas-contre-un-peu-de-soutien, dans laquelle tu te sens étouffer ?

Qu’as-tu à perdre ? Ta dignité ? Selon ce bon vieux Larousse, la dignité est le respect que mérite quelqu’un. Tu mérites le respect, chère Fabuleuse, et tu le mériteras encore, quoiqu’il arrive. Tu le mériteras toujours si quelqu’un te voit pleurer de fatigue, si tes vitres ne sont pas faites toutes les semaines (ni tous les mois), si tu dis que tu en as marre, si tu laisses une autre maman en qui tu as confiance faire un tour de poussette avec ton enfant. En réalité, tu n’as rien à perdre — sauf peut-être ton image de maman parfaite —, et tu as tout à gagner : un moment de répit salutaire, la révélation que tu n’es pas seule, et que tu n’es pas la seule à galérer sévèrement parfois, la gratitude d’une personne à qui tu auras fait confiance, et tellement plus.

Brené Brown le dit si bien dans l’indispensable Le Pouvoir de la vulnérabilité 

« Nous avons divisé le monde en deux camps : ceux qui proposent leur aide et ceux qui ont besoin d’aide. En réalité, nous sommes dans les deux camps. »

Nous avons toujours été, nous sommes et nous serons toujours dans les deux camps. On peut donner énormément, mais jusqu’à un certain point. Certaines d’entre nous vont jusqu’à l’épuisement, le burn out, voire pire, avant de prendre la décision de rechercher et accepter du soutien. Pourquoi en arriver là ? Certes, beaucoup de mécanismes sont à l’œuvre dans cette résistance, mais la bonne nouvelle, c’est que nous avons besoin des autres autant qu’ils ont besoin de nous. Tu ne vas pas être cataloguée « victime » ou « incompétente » parce que tu auras saisi une main tendue à un moment donné. Parce que la fois d’après, c’est toi qui pourras tendre la main, partager tes super trucs de maman qui assure, remonter le moral, ou juste faire un tour de poussette avec le bébé qu’une autre maman t’aura confié. C’est ça, être dans les deux camps : ne pas culpabiliser de reconnaître qu’on est fatiguée ou qu’on ne sait pas quoi faire dans telle ou telle situation, puisque ça arrive aussi aux autres et que c’est juste normal. C’est aussi reconnaître qu’on a des limites toutes humaines et qu’on ne pourra pas donner si notre propre réservoir est vide.

Je cite à nouveau les sœurs Nagoski :

« Le lien social est une forme de nourriture, au même titre que les aliments. (…) Nos besoins en lien social évoluent tout au long de la vie, mais notre besoin fondamental d’entretenir du lien ne change pas. (…) 

Ce n’est pas une faiblesse ; il ne fait pas de nous des personnes “en manque d’affection”. Il nous rend plus fortes. »

Que tu te situes dans un camp ou dans l’autre aujourd’hui, du côté de celles qui peuvent apporter de l’écoute, un soutien, ou du côté de celles qui ont besoin d’être épaulées, je t’invite à regarder autour de toi, à faire un premier pas, puis un autre, pour te connecter à des personnes avec lesquelles tu pourras former une « bulle d’amour » et où chacune pourra se sentir soutenue sans jugement. Pour en finir avec le sentiment de ne pas être assez, relie-toi aux autres. Tu verras, ça change vraiment tout.



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Cet article a été écrit par :
Myriam Oliviéro

Infirmière de formation et diplômée en médecine tropicale, Myriam s’est orientée vers l’action médico-sociale auprès des publics démunis. Après un séjour de 2 ans en Afrique de l’Ouest, elle s’est investie en France dans différentes associations.

Mariée à un Fabuleux infirmier et pianiste avec qui elle a 2 garçons, elle a rejoint cette année l’équipe des Fabuleuses en tant qu’assistante de rédaction.

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