Si j’étais le diable, et si je voulais réduire le monde à néant, je ne gaspillerais pas mon énergie à renverser les institutions ni à manipuler les puissants.
Non. Je viserais petit. Je viserais précis. Je viserais les mamans.
Si elles cèdent, tout s’effondre : les enfants, les couples, les communautés, les nations.
Si j’étais le diable, je haïrais les mamans pour leur résistance. Pour cette façon insupportable qu’elles ont de continuer, même fatiguées. Pour leur tendresse insensée, leur patience obstinée, leur foi ridicule en l’avenir. Je les haïrais pour ce pouvoir qu’elles ont de réparer le monde sans armes, sans bruit, sans mon autorisation.
Dans les sociétés pauvres, je laisserais les mamans mourir de maladies évitables. Dans les sociétés riches, je laisserais la guerre des pensées faire le travail à ma place. Trop facile : pas d’armes, pas de bombes, juste des voix dans la tête. Sans un seul coup de feu, je ferais vaciller des familles entières.
La détresse mentale tue (l’ENCMM le confirme : le suicide est aujourd’hui la première cause de mortalité chez les jeunes mères).
Alors si j’étais le diable, je volerais le sommeil, le temps, la joie des mamans.
Je leur soufflerais qu’elles n’en font jamais assez. Je les comparerais, je les culpabiliserais, je leur ferais croire que se montrer vulnérable est une faiblesse et que se reposer est une honte. Je ferais de l’épuisement une norme et du doute un mode de vie.
Si j’étais le diable, je mènerais une guerre lente, souterraine, dans l’indifférence générale. Une maman à la fois, je sèmerais un chaos silencieux qui, peu à peu, contaminerait toutes les sphères de toutes les sociétés.
Mais heureusement, je ne suis pas le diable. Mon job, c’est précisément de lui botter les fesses.
Chaque jour, chez les Fabuleuses, on reçoit plusieurs centaines de messages — des SOS, des confidences bouleversantes, parfois des pensées suicidaires. Alors on a créé la Hotline des Mots pour donner à ces mamans perdues ce qu’elles ne trouvent nulle part ailleurs : une écoute attentive. Et pour les remettre en selle, on leur envoie gratuitement les pépites du Mail du Matin, déjà lues par 400.000 Fabuleuses.
Chaque jour, on répare aussi les mamans brisées.
Notre hôpital à nous, c’est le Village. On y soigne les cœurs, les nerfs, les relations. On donne des réflexes de survie, des habitudes qui protègent les pensées, une communauté qui guérit sur la durée. Cette méthode a déjà sauvé 13.000 foyers du chaos.
Et puis, chez les Fabuleuses, on nourrit aussi les mamans qui vont bien. Elles sont des cibles de choix pour le diable, puisqu’elles portent en elles de la dynamite — des idées capables de transformer le monde. Alors on les forme, on les encourage, on les aide à croire en leurs intuitions et à déployer leurs talents grâce à nos programmes de formation (nouveau : une petite sélection est disponible ici à l’unité). Depuis 2014, des milliers de Fabuleuses ont écrit, créé, entrepris, et sont devenues à leur tour des repères pour d’autres mamans. Et ça, c’est ma grande fierté.
Aujourd’hui, en cette Journée mondiale de la santé mentale, je le redis haut et fort :
chez les Fabuleuses, nous sommes en première ligne de la santé mentale des mamans. C’est notre terrain, notre expertise, notre mission. Une maman à la fois.





