Émeline ne paie pas de mine.
Elle file toute fine et personne ne se doute de qui se cache derrière ce bout de fille. En sa personne, tant de pouvoir, vous n’allez pas le croire.
Elle se lève tôt le matin et se transforme en boulangère. Brioches et petits pains, n’ont pas de secret entre ses mains.
Puis, d’une voix discrète elle entre et devient réveil matin. Mélodie légère, telle une caresse vous sortant du lit.
Elle se fait ensuite taxi. Attention à vous si vous vous trouvez sur sa route. Elle roule à vive allure. Ça rit, ça bouge dans son automobile.
De retour chez elle, Émeline se transforme en véritable robot domestique : vaisselle, repassage, raccommodage, récurage, tout y passe. Chez elle tout est impec’. C’est sur qu’on peut mettre un pied devant l’autre.
Au retour de l’école, elle devient institutrice multi-niveaux. Additions, multiplications, lecture, poésies, leçons de grammaire, orthographe et conjugaison. Ses amis sont Jacques Prévert, Maurice Carême et Boris Vian pour les plus dissidents. Les pluriels en ou, en al et en ail ne lui font pas mal.
Puis elle devient chef étoilé. À sa table, on change de menu tous les soirs. Elle manie la poêle comme personne, avec à l’oreille le téléphone.
Quand dans le ciel les étoiles brillent, elle se fait alors conteuse. On s’embarque avec elle dans d’autres époques, d’autres contrées. Tout devient un monde enchanté. Doucement, les paupières se ferment. On se blottie sous la couette. Une chanson douce, un baiser et vous voilà tous en train de rêver.
Enfin vient pour elle le moment de se poser, de se reposer. Son pouvoir, elle le partage avec des milliards d’autres femmes. On lui donne sur toute la terre un doux nom, celui de « Maman ».
Émeline, ne paie pas de mine.
Elle file alors à son tour sous la couette. Et elle rêve d’un autre pouvoir. Elle rêve que demain, elle restera sous l’édredon pendant que son autre elle, son double de maman se lèvera et sera à son tour cette super maman, cette wonder woman.
Elle s’endort, elle se blottit contre celui qui seul la voit telle qu’elle est, qui connaît ses larmes, ses faiblesses et ses forces, ses doutes et ses chutes mais qui sait que toujours elle se relève. Il sait lui quelle fabuleuse elle est.
Il la regarde tendrement, cette femme qui n’est pas qu’une maman.
Ce texte nous a été envoyé par une fabuleuse maman : Bénédicte Cantele.