Le jour où on s’est aimés assez à deux pour être trois, on a trépigné d’impatience à l’idée de vivre les bonheurs tout chauds d’une vie de famille.
On s’est dit les yeux fiévreux que demain serait fait de tartines de confiture, de tours de trottinette, de robes à paillettes et d’histoires à inventer. Et que c’était tant mieux.
On s’est dit aussi qu’inévitablement, il y aurait des brises légères sur nos matins ensoleillés, et même peut-être des vents de force 3, à nous transir de froid.
On s’est dit qu’il y aurait, un jour, des mots doux à mettre sur les maux durs.
Mettre des silences sur tes chaos, mon souffle sur tes brûlures, mes bras sur tes tempêtes, ma couverture sur tes chagrins, mon amour sur tes combats, ma chaleur sur tes épreuves.
Mettre des « ça ira » sur tes doutes, des « fonce ! » dans tes carrefours.
Mettre mes mots doux sur tes maux durs. Pour accompagner la petite fille. Maintenant. L’année prochaine. Dans dix ans, dans trente ans. Toujours.
Mettre des mots doux sur mes maux durs, aussi.
Pour rassurer la petite fille. Maintenant. L’année prochaine. Dans dix ans, dans trente ans. Toujours.
Pour te dire que rien ne changera, que rien ne peut couper tout à fait ce fil-là, que si parfois la femme va mal, la mère va bien.
Pour te dire « je suis là » quand je semble m’éloigner, « je t’aime toujours » quand je ne m’aime plus du tout. Pour te dire « je me relève quand je trébuche, ne t’en fais pas ».
Je ramasserai doucement tes cheveux derrière tes oreilles, et te chuchoterai dans un sourire qu’un jour, toi aussi, tu sauras.
Qu’une maman a aussi ses soucis de femme,
ses tourments d’amante, ses tracas de fée, ses inquiétudes de citoyenne, ses délires de magicienne, ses frustrations de petite fille.
Qu’une maman fait face à bien des défis, qu’elle doit composer aussi avec les blessures de ses aventures, les urgences de ses essentiels, sa fatigue à assumer et ses valises à déposer. Sa fragilité, ses angoisses et ses regrets. Ses douleurs et ses envies d’ailleurs, ses montagnes à gravir et ses océans à traverser. Ses projets à tricoter et ses rêves inachevés.
C’est le plus merveilleux et le plus terrifiant des challenges qui soit, mais je l’ai accepté : j’aurai toujours des mots doux pour nos maux durs, tu sais.
À chaque fois qu’il le faudra, je prendrai ta main pour te rappeler que parce qu’on sait sourire, on chassera ensemble les larmes à grands coups d’arcs-en-ciel. Parce qu’on a des manteaux, on n’aura pas froid très longtemps. Parce qu’on sait nager, on rejoindra la rive. Parce qu’on sait courir, on ira vite se mettre à l’abri. Parce qu’on sait creuser, on fera un chemin dans les jours qui coincent. Parce qu’on a des crayons de couleur, on dessinera à quatre mains des cœurs sur les ciels tout noirs.
Parce qu’on s’aime, et qu’on aime le chocolat, toujours, toujours, à nous deux, à nous trois, on vaincra.
Ce texte nous a été transmis par une fabuleuse maman : Audrey Degoul