Je suis sûre que beaucoup de Fabuleuses rêvent de ce qu’elles pourraient offrir à leurs enfants en oubliant que ce qu’elles donnent tous les jours n’a pas de prix.
C’est comme pour la maison de nos rêves, à moi et mon Fabuleux :
Nous aimerions acheter un loft dans une usine désaffectée, avec des coins et des recoins pour jouer à cache cache, des meubles Louis XV, par-ci par-là des touches psychédéliques et une grande bibliothèque qui sent la poussière. Dans le jardin, nous planterions un chêne, et nous cultiverions un potager un peu sauvage.
Mais soyons réalistes :
Étant donné les prix de l’immobilier ici, nous recherchons plutôt un quatre pièce correct avec une petite terrassette, et je vous en supplie…
…Ô bonheur absolu, des toilettes séparées !
Bref, nous habitons un trois pièces carré dans une maison carrée avec vue sur l’appartement carré des voisins à l’est et sur l’appartement carré des voisins à l’ouest.
J’ai fini par presque me satisfaire de notre petit cocon, essentiellement grâce à mon amour très modéré du ménage.
Sauf que j’ai eu des enfants, et ça n’a pas raté.
Je culpabilise de ne pas leur offrir plus, de ne pas mettre plus d’énergie à trouver mieux, de les avoir confinés dans un appartement sans jardin. Je suis sûre qu’aucun de leurs copains ne doit partager sa chambre et qu’ils ont tous des salles de jeu énormes (ma petite voix est parfois de très mauvaise foi).
En attendant, on slalome entre les duplos et les circuits en train, qui sont détruits tous les soirs pour éviter de marcher dessus quand on doit aller consoler celui qui fait un cauchemar.
Alors, je ne t’explique même pas comme ma petite voix m’a titillée quand nous sommes allés chez grand-mère. Il faut dire que l’aïeule habite dans une grande maison avec un très grand jardin et une vue si exceptionnelle que Paul Cézanne l’a peinte des dizaines de fois. Elle a même un salon dans lequel les enfants n’ont pas le droit de rentrer. C’est beau mais c’est surtout ce que nous ne pouvons pas nous offrir.
Nous sommes des parents nuls dans une maison nulle.
C’était sans compter sur Joyeux qui après quelques jours de vacances est venu nous dire :
« Je veux rentrer à la maison et jouer au duplo avec papa, maman et Malicieux. Dites, quand est-ce qu’on rentre ? »
J’aurais pu lui répondre : « C’est tout ce que t’inspire cette beauté, mon enfant ? Rentrer et jouer aux duplos? » Mais j’ai souris victorieusement à ma petite voix, parce qu’à travers ses mots, j’ai compris :
oui, nous n’avons pas encore trouvé la maison de nos rêves, mais chaque jour, nous offrons à nos enfants un foyer, et ça n’a pas de prix.