Mes plus beaux silences de maman - Fabuleuses Au Foyer
Dans ma tête

Mes plus beaux silences de maman

Agathe Portail 6 janvier 2025
Partager
l'article sur


Une sieste ensemble, un coussin sous mon ventre colossal. La chaleur de l’été se cogne aux volets à demi fermés, les rideaux frissonnent, et tu me caresses de l’intérieur par vagues, toi, mon bébé que je ne connais pas encore. 

Pieds nus la nuit sur le parquet, j’entre dans ta chambre moite qui sent le lait et la lessive.

Tu m’attends, les yeux grands ouverts dans ton berceau, tes petits poings serrés, tes ongles minuscules et ta bouche en bouton de rose qui attend mon sein. 

Pas un cri, pas un pleur, je m’approche en douce de la porte de ta chambre et je te vois assis dans ta petite salopette, concentré à t’en froisser le front. Tu essaies de faire entrer un cube dans un trou rond et ça t’absorbe entièrement.

Dans la voiture, ton fauteuil est vide.

Je t’ai laissé à la crèche pour quelques heures d’adaptation, tu ne t’es même pas retourné quand je suis partie. Je suis fière et mélancolique. Le temps de notre bulle est terminé, nous sortons doucement de notre face-à-face et la nostalgie a le parfum de l’oxygène. Dans ce silence, l’air circule.

Tes colères sont des ouragans que je ne sais pas comment calmer. Parfois tu te cognes la tête contre le sol, le mur, et je glisse ma main entre ton front et la pierre pour ne pas que tu te blesses, et j’attends que l’orage passe, j’attends l’épuisement de cette furieuse énergie qui me fait pleurer d’impuissance. Quand tu n’en peux plus, je te prends contre moi, ta poitrine froissée de sanglots. Tu colles ta bouche dans mon cou.

On dirait que tu te branches, et c’est moi que ça recharge.

Le mercredi vous ne dormez plus, mais vous savez que moi, oui.

Le silence est tissé de petits mots chuchotés, de pas feutrés et de portes qui se ferment aussi doucement que possible. À 16 h pile, une feuille de papier se faufile sous ma porte : « On peu gouté ? ».

Retour du collège. Tu ne dis rien. Je sens dans ton silence une douleur d’adolescence dont tu ne veux pas me parler, alors on roule. Une fois arrivés, tu ouvres ta portière, sans un mot. Tandis que je cherche ma clé, j’entends dans mon dos que tu lâches ton sac dans les graviers, puis je sens deux grands bras qui m’entourent et ta tête se niche au creux de mon cou.

Tu déposes ta peine, en silence

et nous restons longtemps tous les deux, sous le vent devant la porte fermée, le temps que tu t’apaises.

Nuit d’été.

L’heure du coucher est largement dépassée, mais l’air est tiède et le brasillement des étoiles invite à se coucher dans l’herbe douce, tous les six, les bras repliés sous la tête. Ce soir, on annonce une pluie d’étoiles filantes. Quand l’un d’entre nous en voit une, il tend un doigt vers le ciel.

On n’entend que les grillons et c’est comme le silence, en mieux.

Un mercredi de février, la lumière est grise et sourde, les nuages bas. Tout à coup le ciel se met à fourmiller. Des millions de flocons tombent dans notre jardin, vous n’avez jamais vu la neige. Que de cris, d’euphorie, les bras en l’air et la bouche ouverte pour tout engloutir ! Quand le sol, les branches, le toit de la voiture sont blancs, je dis « chut, écoutez comme le son est différent ». Vous rentrez la joie à l’intérieur de vos yeux, de vos cœurs, et vous tendez l’oreille. Silence d’ouate. La dernière murmure : « Maman, c’est comme si on avait du coton à l’intérieur ! ».

Retour de camp d’été.

Sur le parking, une assemblée de parents attend que le bus se vide. Tu nous aperçois et tu souris, un sourire plus grand que ton visage. On te tend les bras, tu t’y jettes, et alors qu’on attendait des exclamations, tu nous serres contre toi, longtemps.

Ça dure, ça efface les bruits autour.

Ton odeur a changé, tes cheveux ont poussé. Puis tu dis : « vous m’avez tellement manqué ».

Et toi, chère Fabuleuse, quels silences gardes-tu précieusement ? Tu as besoin d’un peu de silence en ce début d’année ? Alors nous t’offrons le défi « La Minute de Silence », 100% gratuit.



Partager
l'article sur




Cet article a été écrit par :
Agathe Portail

Maman de 4 enfants (très) rapprochés et girondine d’adoption, Agathe Portail écrit des romans adultes édités chez Actes Sud, Calmann Levy et J'ai lu, mais aussi des romans historico-fantastiques édités par Emmanuel Jeunesse.

https://www.fnac.com/ia9173370/Agathe-Portail

> Plus d'articles du même auteur
Les articles
similaires
femme qui fait chut
Maman a besoin d’un peu de silence 
De quoi rêvent les mamans ? D’une semaine au soleil avec parasols inclus et marmots exclus ? De retrouver leur ligne d’avant[...]
la péridurale magique
Les 7 ingrédients indispensables de la péridurale magique
J’ai vécu trois grossesses. Pour chacune d’entre elles, j’ai fait la fière, la forte, et lorsque m’était posée la question[...]
À toi qui gardes le silence
À toi qu’on n’entend pas parce que tu gardes le silence, À toi qui penses être seule dans ton mal-être,[...]
Conception et réalisation : Progressif Media