J’ai mis un pied dehors,
Pour y trouver la paix,
Laisser le froid perçant
Apaiser, un instant
Le brouhaha de Noël et mes pensées incessantes.
J’ai respiré profondément
L’air piquait mes poumons
J’ai regardé autour de moi
La nature semblait endormie
Et, en moi, un long soupir s’élevait.
J’ai murmuré tout bas :
« J’en ai marre de courir
Rien ne s’arrête jamais,
Tout se suit, se poursuit, je survis, à peine
Je voudrais juste la vivre enfin, cette paix de Noël. »
Faire une pause sans un regret,
Sans douter et sans craindre,
Craindre de devoir le payer cash juste après.
Peut-on suspendre le temps ?
Hiverner comme la nature ?
La nature me répondit
Dans un frémissement de feuilles,
Un oiseau s’était posé là,
M’invitant à observer,
À écouter, à vivre, vraiment.
J’ai promené le regard,
Les mains blotties dans mes poches,
Une larme s’est échappée,
Le vent l’avait poussée à quitter le creux de mes yeux
Fatiguée du marathon sans fin qu’est le mois de décembre
« Je suis si fatiguée » murmurais-je,
La nature me répondit « Je sais,
Moi aussi, et c’est pourquoi je me repose,
C’est le devoir de l’hiver, sa raison d’être, son trésor,
Les nuits si longues, les jours si courts. »
Une autre larme se mit à couler, cristalline,
La nature, compréhensive, l’honora :
« Laisse couler, laisse couler
Tu peux te poser, te reposer, t’arrêter
Il est temps de lâcher prise, de te recentrer »
« Me recentrer ? Mais comment ? »
Et la nature raconta doucement
L’histoire des feuilles qui tombent,
De la sève qui se concentre sur l’essentiel,
De la lenteur, de la force, de l’hiver qui s’installe.
Je me rebelle, j’argumente à tout va :
« Mais regarde-moi, mon planning, la prochaine fête à organiser,
Les restes de raclette à utiliser, les cartons et emballages cadeaux à ranger,
Il y a si peu de place pour moi dans tout ça. »
Et, blottie dans mon grand manteau, tout mon être frisonne.
Un oiseau se pose sur une branche,
La baie qu’il va attraper est rouge, si vive,
Je l’observe se nourrir, j’envie sa liberté
Alors la nature me demande doucement :
« Et toi ? Où sont tes baies, ton eau et ton nid chaud ? »
La voix de la nature se fait plus ferme :
« Tu as recouvert ton corps de tant de vêtements pour te garder bien chaud,
Un bonnet qui couvre entièrement tes oreilles,
Une doudoune, une écharpe et des bottes !
Mais ton cœur, ma petite ? Ton cœur n’aurait-il pas froid ? »
« Et ton cœur, ma petite » :
Un frisson m’envahit à ces mots.
J’ai donné tant pour ce Noël de rêve,
J’ai voulu qu’il soit mémorable, instagrammable, parfait !
Mais les lendemains de fêtes sont difficiles,
Mon cœur a froid, mon cœur a soif, mon cœur a faim.
J’enfonce le nez dans mon écharpe,
La laine me chatouille un peu,
La nature en hiver, me rappelle lentement à moi,
Au centre, à la vie qui bat sous une couche de glace,
À la fatigue de mes muscles, à la lenteur des moments tout doux.
« J’ai l’impression de courir sur place,
De tourner autour du pot,
D’essayer de fleurir en toute saison »,
La nature me répond : « Apprends à te ressourcer,
Même au cœur du tumulte : laisse l’hiver prendre sa place ».
Je soupire encore une fois : « Je n’ai plus envie de me forcer,
de m’éparpiller, de m’essouffler… j’ai perdu mon chez moi, je crois ».
La nature prend son temps pour enfin me demander :
« Qu’aimerais-tu comme cadeau pour ce Noël, ma petite ? »
Je n’hésite pas, j’aimerais tant un instant pour hiverner.
Je respire dans mon écharpe, je regarde la porte d’entrée,
Au loin, j’entends le son de la télé, le rire des enfants,
Et comme par réflexe, mes bras s’enroulent autour de moi…
Ma tête se penche sur le côté, comme pour se reposer
Je baille, je ferme les yeux, je souris.
Mon corps anticipe ma décision, mon cadeau de Noël à moi,
Je veux rentrer chez moi, au chaud dans le foyer de mon être,
Je veux oser la lenteur de l’hiver,
Et cesser, quelques temps, de courir dans ma roue infernale,
Je chercherai mes baies à moi.
Alors tout doucement, sur la pointe de pieds,
J’ouvre la porte d’entrée,
J’enfile mes pantoufles chaudes, je me fais un thé,
Et pour mon cœur, j’ai sorti une écharpe :
Celle de la bienveillance !
C’est tout ce que je veux pour Noël :
Savourer, un peu,
Hiverner, enfin,
Et me réchauffer,
Me ressourcer,
Me recentrer
C’est mon plus beau cadeau, pour sûr.