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Lectures d’hiver

Anna Latron 18 décembre 2021
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Alors que la trêve de Noël a commencé, quoi de mieux que de se glisser sous un bon plaid, tisane à la main, et de déguster un bon bouquin ? À la veille des fêtes, je partage avec vous 3 romans fabuleux que j’ai dévorés récemment.

S’adapter, Clara Dupont-Monod

« Un jour, dans une famille, est né un enfant inadapté ». Inspiré par le parcours personnel de Clara Dupont-Monod, ce livre raconte l’histoire d’un bouleversement au sein d’une famille, mettant en lumière la présence d’un enfant handicapé dans une fratrie. Les personnages ne sont nommés que par leur rang et leur rôle dans la famille : le père, la mère, l’aîné, la cadette, l’enfant et le dernier, né après le décès de son frère handicapé. Ce livre figure sans conteste au palmarès de mes coups de cœur pour cette année 2021.

« À enfant hors norme, savoir hors norme, pensait l’aîné. Cet être n’apprendrait jamais rien et, de fait, c’est lui qui apprenait aux autres. » En effet, chacun des enfants de cette famille va beaucoup apprendre de lui : patience et chagrin pour l’aîné ; colère et écoute pour la cadette ; gentillesse et générosité pour celui qui est né après.

Tous aussi différents qu’ils soient, ces enfants « un blessé, une frondeuse, un inadapté et un sorcier » auront surtout appris à être une famille. Un merveilleux livre, porté par une plume délicate et lyrique, dont j’ai eu envie de souligner de nombreuses phrases tant elles étaient belles et sonnaient justes. Un très beau texte, dont j’ai admiré la pudeur et la délicatesse, et dont l’auteur réussit le tour de magie de le transformer en une ode à la nature et à toutes les fratries.

Mille petits riens, Jodi Picoult

Ruth est sage-femme et infirmière en obstétrique. En 20 ans, elle n’a jamais rencontré de problèmes avec qui que ce soit, jusqu’à ce matin où elle vient prodiguer des soins au jeune Davis. Le lendemain, elle découvre qu’elle n’a plus le droit de s’occuper de lui. Et plus tard, quand le nourrisson cesse de respirer, avec Ruth à ses côtés, la coupable est toute trouvée.

Vengeance ? Négligence ? Le seul tort de Ruth est d’être une afro-américaine alors que Turk, le père de l’enfant, arbore fièrement une croix gammée sur son crâne rasé.

La mort de ce nourrisson va soulever un mal ancré et dissimulé derrière des non-dits… Avec profondeur et justesse, ce roman social pointe du doigt ces mille petits riens qui en disent long pour beaucoup d’entre nous. L’angle pris par l’auteure est judicieux pour ne pas dire brillant. Elle prend le parti d’aborder ce racisme « dissimulé » de la même manière qu’il est utilisé, c’est-à-dire très subtilement, bien que parfois, certains passages peuvent provoquer un certain malaise. En alternant les points de vue, quitte à revivre les mêmes scènes sous plusieurs angles, l’auteure réussit à faire entrer les lecteurs blancs, le temps du livre, dans la peau d’une femme noire, leur faisant vivre de l’intérieur les grandes injustices, mais aussi les mille détails du quotidien qui, insidieusement, stigmatisent en permanence l’existence des noirs américains.

Souvent dure et choquante, destinée à sensibiliser et à faire réfléchir, la lecture devient addictive, portée par un vrai suspense, des personnages crédibles et l’écriture fluide de Jodi Picoult.

L’été sans retour, Giuseppe Santoliquido

Au travers du récit d’un fait divers qui a secoué l’Italie — la disparition inquiétante d’une jeune fille — l’auteur nous décrit la Basilicate et un petit village où tout le monde se connaît, et nous fait naviguer entre de nombreux personnages attachants : le narrateur, Sandro, qui se remémore les événements, le vieux Serrai, un homme parlant peu, profondément attaché à sa terre et qui a accueilli Sandro à la mort de ses parents, le procureur, piémontais, qui fait tâche d’huile dans cette région, Bianca et sa fille Lucia, Chiara que tous recherchent…

Ce fait divers permet à Giuseppe Santoliquido d’approfondir plusieurs thèmes, en oscillant entre polar et étude de moeurs : la télévision — la disparition suscite un emballement médiatique effréné où les médias ne reculent devant rien pour faire de l’audience ; les relations dans ce petit village où les habitants s’épaulent, où la famille est primordiale, où les fêtes sont importantes, mais où il faut se maintenir dans un moule ; l’attirance de certains jeunes pour les émissions de télé-réalité, leur désir de fuir pour échapper à l’ennui.

Un récit original, pétri d’émotions, bien écrit, sans pathos, au suspense implacable, l’histoire d’une famille maudite confrontée à des secrets enfouis, soumise à la cruauté obscène du cirque médiatique.

« Le destin est une bête sournoise, il procède par touches légères, par strates infinitésimales, vous laissant accumuler mauvais choix et petites erreurs, vous autorisant à orienter le gouvernail de votre vie sur une suite de mauvais caps, puis, un beau jour, au lieu d’atteindre la destination tant convoitée, c’est le naufrage. Impossible de changer de trajectoire. »



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Cet article a été écrit par :
Anna Latron

Journaliste de formation, Anna Latron collabore à plusieurs magazines, sites et radios avant de devenir rédactrice en chef du site Fabuleuses au foyer et collaboratrice d’Hélène Bonhomme au sein du programme de formation continue Le Village. Mariée à son Fabuleux depuis 14 ans, elle est la maman de deux garçons dont l'aîné est atteint d’un trouble du spectre de l’autisme.

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