Ils sont là, avec leurs petits yeux attendrissants ; ils me regardent, espérant que je m’arrêterai pleine de compassion pour prendre soin d’eux et m’en occuper enfin.
Mais je passe mon chemin.
Je n’ai pas le temps, et surtout je n’en ai pas l’envie.
À force ils vont prendre la poussière, mais leur présence me gêne, je vais devoir faire quelque chose. Bon.
Prends sur toi, oui c’est pénible, mais une fois que ce sera fait tu en seras débarrassée,
pour un temps du moins.
Quoi ? Mais non, je ne parle pas de mes enfants, j’assume mon côté mère indigne mais quand même! Eux, je les ai laissés au fond du jardin avec une boîte de cookies 🙂
Non, je parle de ces cartons de fringues
que je dois trier et qui s’empilent partout dans la maison, créant un jeu de piste diabolique, entre :
- ceux à jeter, car troués, salis, trop petits, trop moches…
- ceux à donner,
- ceux à laver certainement (et pour certains, à l’acide),
- ceux que je dois rendre à leurs propriétaires respectifs (tout en sachant très bien que je n’ai aucune idée de qui peuvent bien être leurs propriétaires respectifs),
- Ceux à garder parce qu’ils sont encore un peu grands pour le moment,
- ceux qui sont définitivement à classer dans la catégorie « souvenir »,
- ceux qui peuvent encore avoir une deuxième vie, transformés en plaid-patchwork (sisi,j’ai testé et pour une fois ils ont eu une utilité tous ces jeans troués !),
- ceux, enfin, qui s’entassent dans un des nombreux tiroirs de mon cerveau dans le compartiment « projet-trop-top-à-faire-avec-de-vieilles-paires-de-chaussettes-qui-ont-perdu-leur-double-dans-un-univers-parallèle ».
Voilà.
Bref, pour faire court : le tri de fringues, ça tue.
Du moins ça ME tue.
Et pourtant, en ouvrant un carton, tu retrouves ce pyjama trop mignon « Mon papa c’est le plus fort » dans lequel tu as glissé ton premier nouveau-né, cette petite boule d’amour qui a fait de toi une maman pour la première fois de ta vie. Tu ne peux définitivement pas le jeter.
Oh ! Mais je le reconnais, ce pantalon ! Et ce trou. La grosse chute qui a emmené MisterTwo droit aux urgences pour recoudre la première blessure d’une longue série. Ce jour-là, tu as eu peur, et lui il a eu chaud. C’était une journée remplie d’émotions en tous genres…
Lui non plus, pas moyen de le jeter ; à ce stade, c’est quasiment une relique.
Et l’odeur indescriptible de ce bavoir qui en a essuyé des compotes, des boudoirs écrasés, des vomis et j’en passe… Oui bon d’accord, on peine à reconnaître le nom brodé dessus et la couleur originelle du tissu…
Et là, qu’est-ce que j’aperçois ? Ne serait-ce pas…
Oui ! Ce magnifique soutif-allaitement-spécial-gros-nénés top glamour avec petites ouvertures sur les côtés pour allier l’utile à… euh…. rien d’autre qu’à l’utile 🙂
Bon allez, celui-ci peut définitivement voyager direction le sac poubelle !
Yes ! J’ai réussi à jeter quelque chose !
Et est-ce qu’on en parle, de la douceur de cette couverture qui a câliné ma dernière et sa maman lors d’une tétée sans fin ? Je le range où, hein ? Dans le carton des vieux souvenirs ?
Dans celui des « gardons-le, on ne sait jamais » ?
Ou dans le carton que l’on voudrait garder indéfiniment et rouvrir un jour, la larme à l’œil désormais cerné.
« Oh je me souviens, il y a si longtemps maintenant… »
Ah, mais attends, elle est là ! Cette chouette petite robe que je m’étais achetée, espérant qu’un jour je pourrais rentrer dedans ! 10 ans que j’attends de les perdre, ces fichus kilos ! Oui mais peut-être que…
(Mais jette-là bon sang, tu ne vois pas qu’aujourd’hui plus personne ne s’habille comme ça en 2019 ! me dit ma petite voix sensée)
« Oh ! Mon voile de mariée ! »
Pfff, le tri va être long, c’est moi qui vous le dit…
Et je ne fais pas partie de celles dont Madame Kondo est la nouvelle égérie, même si je ne doute pas de l’efficacité de sa méthode qui a depuis longtemps contaminé mes amies.
Moi, le tri par le vide je ne connais pas. Le bordel organisé, ça se travaille. Je le pratique depuis tant d’années, on ne change pas une équipe qui gagne…
– Mamaaaaaaan !… Je ne retrouve pas :
- mon protège-tibia bleu
- mon caleçon fluo, mais siiii celui avec des étoiles !
- ma cape de Super Jojo,
- mon foulard de scout,
- le bout de tissu vert, tu sais celui sur lequel j’ai dessiné un bonhomme qui vole (?)
- … (autres objets à compléter selon ton quotidien 🙂
Hé oui, parce qu’en plus d’être une bordélique-et-presque-fière-de-l’être, j’ai aussi engendré un spécimen du même genre.
Je le disais, on ne change pas une équipe qui gagne !
Alors je referme ces cartons
(trop précieux pour décider de leur sort, là, maintenant), les étiquette par taille et sexe et les empile les uns au-dessus des autres telle une magnifique tour de Kapla en équilibre précaire.
Ils resteront là jusqu’au jour où les souris auront définitivement eu le dernier mot, les transformant en rembourrage pour leurs lits de luxe, dans leur grenier 5 étoiles.
Épilogue :
– Chérie ! T’avais pas dit que tu voulais faire du tri dans les cartons de fringues ?
– Ben si. C’est bon, j’ai mis des autocollants !