Ça m’a pris par surprise comme ça un samedi après-midi. Moi qui me sens bien dans une maison bien rangée, qui ai l’impression d’étouffer quand le niveau de bazar ou de moutons de poussière atteint un seuil critique, qui aime tant que chaque chose ait une place et que chaque place ait sa chose.
Ce jour-là j’avais quand même fait pas mal de choses dans la maison, en plus d’avoir passé la matinée à accompagner mon deuxième garçon à un tournoi de foot et d’avoir profité de la liquidation d’un magasin pour dégoter un manteau, un pull et des baskets à mon grand qui grandit bien vite (trop vite ?).
Mais tout n’était pas nickel.
La table de la pièce de vie était jonchée des feutres en vrac, d’un kit de travaux manuels à moitié utilisé, de la paperasse de mon mari infirmier libéral et d’autres choses encore. Sans compter ce qui traînait à gauche et à droite parce que posé là, en passant, par l’un ou l’autre des individus qui composent cette famille. Je n’étais pas montée en haut des placard pour faire toute la poussière, je n’avais pas mis de l’eau dans toutes les plantes, je n’avais pas encore vidé le lave-vaisselle, je… — et là je m’arrête dans la liste des choses non faites parce que si je ne commence pas à hyperventiler, c’est peut-être toi, chère Fabuleuse, qui vas faire de l’urticaire en lisant ces lignes et ce n’est clairement pas le but.
Je me suis assise sur mon fauteuil près de la cheminée, j’ai jeté un regard autour de la pièce… et j’ai souri.
Ça paraît d’une banalité folle comme ça et pourtant, sur le coup, je l’ai vécu comme une véritable épiphanie.
M’asseoir cinq minutes, admettons, mais sourire et me dire « c’est bien comme ça ».
Ça relevait du miracle pour moi, Fabuleuse aux relents perfectionnistes.
Voici la pensée qui m’a traversée et que je voudrais te partager, à toi qui te sens embourbée dans ta to-do list qui s’allonge toujours plus qu’elle ne rétrécit. Il n’y a pas de scoop dans mes propos mais un vécu simple, réel et que tu peux vivre toi aussi. J’ai réalisé que ces objets qui parsemaient ma maison et qui pouvaient me rendre dingue quand j’étais fatiguée, quand je me laissais submerger par les exigences que j’étais la seule à m’imposer, étaient des échantillons de mon bonheur, des petits reflets de la vie que je me suis choisie aux côtés de mon Fabuleux et de mes deux merveilleux garçons — même si ce n’est pas toujours cet adjectif qui me vient à l’esprit pour les qualifier dans le quotidien.
Je me suis rappelée les quelques fois où je m’étais retrouvée seule à la maison parce que mes enfants étaient en vacances et que mon cher et tendre infirmier musicien était en tournée — de soins ou de concerts. Il y avait ce côté tellement bienfaisant d’être au calme chez moi, et que j’aimerais revivre de temps en temps.
Il y avait aussi ce kif de ranger la maison et qu’elle reste rangée
(truc de ouf que seules les parents comprennent).
Plus de crayon non rebouché sous la table, plus de chaussettes en bouchon à côté du panier à linge, les coussins du canapé qui restent sur le canapé, mes petites bougies posées harmonieusement sur la table basse du salon pendant plus de 12 minutes. Le rêve. Enfin, le rêve pendant un jour ou deux, voire trois maximum. Puis s’installe la sensation de manque, de vide dans les tripes. Vient le moment où l’absence de mes p’tits mecs perd de son charme et finit par être pesante. Grandissent cette attente et cette joie pleine de les retrouver et de savourer plus que jamais leurs câlins et leurs « maman ! » enthousiastes.
J’ai déjà culpabilisé de ne pas profiter assez de ma solitude.
De trop vite avoir envie qu’ils reviennent et remplissent la maison, dans tous les sens du terme. Je me disais :
« Mais pourquoi est-ce que je ne profite pas juste de ces instants qui me font du bien, juste à moi ? Après tout, je les mérite bien ! Je suis fabuleuse ! »
Et oui, parce que je suis abonnée aux mails du matin depuis le 16 septembre 2016 quand même.
Alors j’en ai fait du chemin, j’ai assimilé — pas parfaitement hein — le « fait vaut mieux que parfait », le goût du moment présent et autres pépites semées par Hélène, Anna, les chroniqueuses et d’autres fabuleuses mamans. Je dois pas mal de changements de regard positifs sur la maternité à cette équipe incroyable ! Ce n’est pas un hasard si j’ai eu à cœur de les rejoindre et de m’y sentir à ma place 🙂
Mais j’ai compris, cet après-midi-là, assise sur mon fauteuil près de la cheminée, que tout comme j’avais déjà accueilli un certain nombre d’imperfections heureuses dans ma vie, je pouvais accueillir tous ces objets qui n’étaient pas à leur place et m’accueillir moi au milieu de tout ce « désordre ». Je pouvais être heureuse quand mes enfants remplissaient la maison et quand ils la rendaient vide. Et même dans l’entre-deux. Je pouvais ressentir de l’apaisement, même si les coussins du canapé n’étaient pas sur le canapé. Je pouvais avoir hâte de revoir mes loulous, même si je regardais un film de filles toute seule en mangeant un œuf à la coque (je suis la seule à aimer les œufs, c’est même un des aliments que je préfère).
Parce que je les vaux bien, ces moments d’indulgence avec moi-même. Parce que je suis comme je suis et que c’est très bien comme ça.
Et toi, chère Fabuleuse, avec quoi as-tu besoin de faire la paix ?
Est-ce avec ta liste de toujours plus de choses à faire ? Avec les jouets qui jonchent le sol de tous les espaces accessibles ? Avec les re-décorateurs d’intérieur hauts comme 3 pommes ? Ou juste avec toi et tes pensées qui s’enchaînent mais ne se ressemblent pas toujours ?
Je t’invite à prendre une chaise, un fauteuil, un coussin, le tapis ou ce qui est disponible et ne colle pas trop aux fesses, à t’assoir quelques minutes, fermer les yeux et te rappeler que ta fabuleuse vie, c’est aujourd’hui et ici que tu la vis, avec ceux que tu n’échangerais pour rien au monde.