Pour les uns, ça sera :
“Encore une réunion ? Mais qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire de mes enfants pendant ce temps-là ?”
Pour d’autres, ça réveillera de mauvais souvenirs :
Une fois assis sur leurs petites chaises, on se retrouve un peu tous comme des enfants face à leur maîtresse. Hop, d’un bond, on se retrouve plus de vingt ans en arrière.
Pour d’autres, ce moment passé dans la salle de classe réveillera des souvenirs enfouis sous les rides et les années : à titre personnel, voir les peintures accrochées aux murs de la classe m’aide à retrouver mon enfance dans les classes, d’autant plus que je n’ai strictement aucun souvenir de mes années en maternelle.
Pour d’autres encore, la réunion de rentrée est un incontournable qui permet de les rassurer : rencontrer l’instit, c’est aussi un moyen de mettre un visage derrière un nom, de nouer un premier contact avec la personne qui est chargée d’une fabuleuse mission pour cette année.
Pour moi, c’est un peu tout ça à la fois.
Sans relais familial proche et avec un Fabuleux aux horaires de travail extensibles, la question de l’organisation ne se pose pas longtemps : j’emmène les enfants avec moi. Et à chaque fois, en entrant dans la salle de classe, pointe une légère appréhension :
« J’espère que la maîtresse aura prévu quelques jeux pour les occuper, ou qu’ils pourront jouer dans la cour pendant ce temps… J’espère surtout qu’ils vont se tenir à peu près tranquilles ^^. »
Quant au besoin d’être rassurée, cette année encore, il était bien ancré : en savoir un peu plus sur la gestion des devoirs (pour le plus grand), sur la pratique ou non de la sieste en moyenne section (pour le cadet). Je ne cache pas que la vue du cahier de graphisme des moyennes section présenté par la maîtresse m’a filé un petit coup de stress… Et puis, je me suis rappelée que l’année scolaire dure 10 mois et que, certainement, Numérobis sera en mesure de tracer de magnifiques “a” en cursive, lui qui a encore du mal à dessiner un bonhomme à peu près potable.
Être parent d’élève, c’est encore et toujours faire confiance :
faire confiance aux instits…et aux capacités de nos petits !
Après le topo de la maîtresse, place aux questions. Je me risque à l’exercice (franchement périlleux quand on a les genoux au niveau des oreilles), tout en gardant bien à l’esprit :
- de ne surtout pas ennuyer les autres parents ni mettre la maîtresse en difficulté
- de ne pas stigmatiser mon enfant
- de ne pas monopoliser la parole trop longtemps (autant vous dire que comme je dois garder un coup d’oeil sur mes lascars, l’exercice est assez acrobatique) afin de ne pas déclarer ouverte la compétition intitulée “à qui aura l’oscar du meilleur parent”.
Mais, je ne vais pas te le cacher, chère Fabuleuse :
Cette réunion de rentrée est une sacrée mine d’inspiration pour moi.
Oui… parce qu’en observant bien les parents autour de moi, il y a toujours :
- Celui ou celle qui prend plein de notes (Mea culpa, j’ai fait ça à la première rentrée de mon aîné !)
- Celui ou celle qui arrive en retard (le même que l’an dernier)
- Celui ou celle qui n’est pas d’accord par principe
- Celui ou celle qui est à fond, en mode : “Moi je peux accompagner toutes les sorties !” (ah, ce sujet ô combien difficile, parfois teinté de culpabilité maternelle : se sentir libre – ou pas – de refuser, s’accorder le plaisir de voir son enfant évoluer dans le groupe) ou “Moi je peux accueillir les poules chez moi pendant les vacances!” (Mea culpa, celle-là c’est moi. Oui, oui !)
- Celui ou celle qui fait des blagues
- Celui ou celle qui aimerait être ailleurs (c’est souvent celui ou celle qui fait des blagues, d’ailleurs)
- Celui ou celle qui ramène tout à son enfant : “Ah nan mais moi, le mien, ça va pas lui plaire du tout, tous ces changements…” (Je précise que cette année, les maîtresses ont changé le chemin d’accès à la classe de Numérobis. Ce sont de dangereuses révolutionnaires dont les pratiques menacent l’équilibre de nos enfants).
Et puis, il y a l’instit, qui, rappelons-le, fait quand même de son mieux pour ne pas être trop longue tout en étant précise, pour ne pas paraître trop sévère ni trop laxiste, pour garder son sang froid quand l’un des parents pose la question à laquelle elle a déjà répondu, pour répondre autant aux angoisses des parents un peu dubitatifs sur le niveau scolaire qu’à ceux un peu inquiets quant aux capacités réelles de leur enfant.
À bien y réfléchir, et en effectuant un bond de plus de vingt ans en arrière, je n’ai pas été franchement traumatisée par un instit ou un prof. Si je ne garde pas de souvenir impérissable de la plupart d’entre eux, je n’oublierai jamais ceux qui m’ont encouragée, donné le goût de l’effort et permis de découvrir et de développer mes talents.
Maintenant que j’ai endossé le rôle de parent d’élève, je crois qu’on est parfois très inquiets des relations entre nos enfants et leurs instit alors que nous-mêmes avons finalement très peu de souvenirs traumatisants (quand ce n’est pas aucun).
À propos de mon énumération en “celui” et “celle” :
Les parents qui assistent à ces réunions de rentrée, force est de constater que ce sont surtout des Fabuleuses. Après avoir longtemps pensé in petto “Franchement, encore une fois, les papas ne se pressent pas au portillon pour faire le job !”, j’ai réalisé qu’ils étaient peut-être tout simplement restés à la maison pour gérer le 18h-20h et laisser leur moitié s’extraire de ce moment fatidique et assouvir aussi, avouons-le, une pulsion maternelle bien ancrée :
“Qui mieux que moi pour être là?”
Eh oui, la mère dragon n’est jamais bien loin…
et celle qui a tendance à juger un brin rapidement et durement la présence ou l’absence des papas, elle est là aussi, tapie dans l’ombre de la revendication, prête à rugir.
D’ailleurs, cette année, c’est mon Fabuleux qui est allé à la réunion de rentrée de mon aîné. Eh bien, croyez-le si vous le voulez : ça m’a demandé un vrai exercice de lâcher-prise. Oui, lâcher sur la façon dont il a géré lui, mais lâcher aussi sur une forme de charge mentale que je me mets – le plus souvent toute seule comme une grande (alors que personne ne m’a demandé de tout gérer toute seule et parfaitement).
Alors évidemment, il n’a pas écouté comme j’aurais écouté, n’a pas posé les questions que j’aurais posées, mais il était là. Il a fait le job. Pas comme moi, c’est sûr, mais là n’est pas le plus important.
Le plus important, c’est que je lui ai fait confiance…et qu’il ne s’est pas trompé de classe ^^.