Ça pourra paraître tardif pour certaines, précoce pour d’autres : les filles avaient 9 mois quand on les a laissées dormir chez mes beaux-parents toute une nuit pour la première fois.
Pour être tout à fait honnête, je n’en ressentais pas spécialement le besoin, je l’ai surtout fait pour faire plaisir à mon Fabuleux…mais aussi pour me donner un coup de pied aux fesses et sortir de ma zone de confort (lutter contre ses peurs, tout ça, tout ça). Une fois les filles déposées, on a filé en ville dans un pub irlandais typique et cosy, où l’on a bu et mangé gras à outrance, comme dans nos fastes années. Au final, on est rentrés à 22h et on s’est effondrés, épuisés, tels deux vieux zombies.
Évidemment, tu le vois venir gros comme une maison, je n’ai pas passé la meilleure nuit de ma vie, ni le meilleur réveil de ma vie d’ailleurs.
Angoissée, culpabilisée.
Angoissée, parce qu’il n’y avait pas de bruit à la maison et pas de bouche à nourrir dès le lever : c’était silencieux et tellement vide… Culpabilisée parce que je ne savais décidément pas profiter comme il se doit de ces moments sans enfants (attente vs réalité).
Longtemps, c’est le manque d’envie et d’occasion qui a fait qu’on que je ne les avait avais jamais laissées dormir ailleurs sans nous moi.
Bien sûr, quand elles avaient 6 semaines et que ma mère et son conjoint en visite nous ont dit « Allez passer une nuit complète à notre hôtel, on s’occupe des filles cette nuit », j’ai un peu stressé, mais je n’ai pas réfléchi pendant deux heures : il était d’une urgence vitale de ne pas se lever 2 à 3 fois chacun dans la nuit et de DORMIR.
Bien sûr, les grands-parents sont venus jouer les baby-sitters à différentes occasions, mais nous rentrions toujours à la maison avant le matin. Mais toute une nuit sans nous, jamais, et il était nécessaire – pour nous, pour elles – de passer par là.
Nécessaire, oui. Évident, pas forcément…
J’ai ainsi pu clairement mettre le doigt sur ce qui me faisait peur, car je savais qu’elles étaient en sécurité là-bas, qu’elles auraient une couche propre, de quoi manger et des câlins en quantité :
J’avais peur de leur manquer.
J’avais peur qu’elles se sentent abandonnées et délaissées par leur maman qui ne répondrait pas à leurs besoins ce soir et ce matin-là. J’ai projeté sur elles le manque de ma propre maman, à 700km de là, qui m’apporte du réconfort tout doux et tout chaud, et qui ne doit surtout jamais disparaître… Oui, ma maman c’est un peu comme mon doudou, et c’est ce que j’ai projeté sur mes filles.
“Si maman est là tout va bien” : Bonjour le fantasme de toute-puissance et de contrôle sur la vie !
Ma peur de les laisser faisait aussi écho à ces deux jours après l’accouchement, pendant lesquels je n’ai pas pu avoir les filles dans ma chambre, avec moi. Mon corps avait lâché (hémorragie de la délivrance, 3 litres de sang en moins, transfusion et transfert en réanimation, pour te la faire courte) et je n’avais pas pu m’en occuper les premières 48h… Autant te dire que je l’ai très mal vécu (même si ce n’est pas ma faute, et que tout le monde était aux petits soins pour elles à la pouponnière, blabla…).
Doucement, je vais devoir couper le cordon…
…me défaire de mon rôle de Maman Absolue, de Maman Poule ou de Maman Control Freak, appelle ça comme tu veux. Ça ne va pas être facile, mais je le leur dois à elles, pour leur autonomie affective ; je le dois aussi à mon Fabuleux, qui attend patiemment que je réinvestisse mon rôle de Chérie ; et je le dois à moi-même aussi, pour ne pas me perdre.
La maternité a donné deux nouveaux sens à ma vie, Maud et Léonie, et il va falloir du temps pour que chacun trouve sa place dans cette famille : des essais, des loupés, des ajustements mais aussi des belles choses et des victoires.
J’y arriverai, je le sais, parce qu’après tout, avec mes qualités et mes défauts, je suis Fabuleuse !
P.S. : Tout s’est très bien passé !