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Jardiner nous rend-il sages ?

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Agathe Portail 2 mai 2024
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Dès que tu entres dans Google les mots clés « jardiner » + « bienfaits », les articles pleuvent.

Mettre les deux mains dans la bouillasse et investir dans un râteau serait LA solution pour réparer une estime de soi fissurée, colmater un manque d’amour et apaiser une angoisse chronique. Il est d’ailleurs amusant de constater que nous obtenons à peu près les mêmes résultats en tapant « tricot », « couture », « cuisine », bref tous ces trucs que nous avons appris à trouver nuls, aliénants (et moches, si l’on ajoute à cette liste le crochet). Pour ma part, j’ai toujours eu la couture en horreur, la machine à coudre se met en rade dès que j’approche à moins de deux mètres, les aiguilles se tordent, les fils se cassent et le tissu fronce. Mais j’adore le jardinage. Pourtant, je ne partais pas forcément mieux : je ne compte pas le nombre de plantes vertes mortes de soif ou de noyade entre mes mains. Mais par un étonnant miracle, j’ai persévéré, et le petit JardiLux près de chez moi a rapidement fait fortune. 

Comment expliquer la magie qui opère lorsque tu désherbes un carré de terre et que tu y sèmes une pincée de graines ?

Quel mystère explique qu’après un week-end passé en dehors de chez toi, tu sors en trombe de la voiture pour aller voir si ta bouture a fait une feuille, si ton rosier a sorti une rose, si ta jachère fleurie a levé ? Il est merveilleux de constater combien nous sommes capables de nous réjouir de l’éclosion d’UNE fleur alors que deux mètres plus loin, trois vilaines ronces sont en train de prendre racine, et que la tondeuse n’est pas passée depuis longtemps.

Nous sommes tellement moins exigeantes au jardin qu’à l’intérieur de la maison, ne trouves-tu pas ?

Si le gravier est plein de mauvaises herbes, ce n’est pas un drame (même si ça ferait plus net sans pissenlits, on est bien d’accord), cela n’empêche pas de s’extasier sur l’éphémère pivoine qui vient de s’ouvrir. Si le massif que tu as consciencieusement biné il y a trois semaines est de nouveau envahi de feuilles vertes, tu deviens étonnamment capable de t’en réjouir : coup de bol, ces envahisseuses sont… des fraises des bois ! Et cette petite fleur sauvage bleu roi qui squatte en bordure (la Véronique de perse, pour ne pas la nommer), elle est tellement mignonne que tu la laisses. Ça fera jardin à l’anglaise et tu t’épargneras une séance de désherbage. Aux orties, le perfectionnisme !

Avec le jardinage, nous apprenons à valoriser ce qui n’était pas prévu, à ne pas arracher trop vite cette drôle de tige qui pousse tout droit au milieu de nos fleurs de printemps (et si c’était un lys ?), à nous réjouir de nous sentir courbatues (« yes, j’ai bien bossé les fessiers en plantant mes bulbes d’été »), à ne pas sentir la morsure du soleil ni celle des moustiques. Nous devenons résistantes et pas chochottes, pour le bonheur de contempler ensuite notre belle plate-bande fleurie.

Contrairement au ménage, le jardinage se partage dans la joie.

Quel bonheur pour mon fils, à qui j’ai confié en mars la plantation de glaïeuls, lorsqu’il voit enfin sortir les longues feuilles du sol ! Et quelle fierté de cueillir pour moi un bouquet parmi SES fleurs qu’il a semées, arrosées et observées sortir de terre tout seul. 

Jardiner, c’est recueillir les fruits de son boulot tout en acceptant le temps long : non, tout ne se verra pas tout de suite, c’est normal. Un sujet délicat à aborder avec ton ado ? Propose-lui de t’accompagner faire « un tour de jardin » : en faisant mine d’inspecter tes rosiers, tu pourras lui poser la question qui ouvre les vannes « Tu ne m’as pas l’air en forme, tu as envie qu’on en parle ? ». 

Je te l’avoue sans honte, chère Fabuleuse, que lorsqu’avril pointe le bout de son nez, je laisse tomber le ménage et le repassage.

C’est tellement gratifiant d’entendre un « waouh, ton jardin est tellement canon ! ».

Bizarrement, je n’ai jamais entendu l’équivalent pour l’intérieur (« waouh, ton salon est tellement canon ! »).  

Jardiner nous rend sages. Bizarrement, nous acceptons qu’il va nous falloir « faire avec ». La terre est calcaire ? On ne va pas s’épuiser à planter des arbustes de terre de bruyère (ou alors, c’est JardiLux qui va se frotter les mains). Adieu, les rhododendrons qui pourtant nous font rêver chez notre super copine Gudule, bonjour le lilas. Le jardin est plein nord ? Mmmmh, qu’est-ce qui pousse à l’ombre ? En jardinant, on apprend à tirer parti des paramètres de départ que nous n’avons pas choisis.

Et si on faisait pareil dans nos vies de maman ?

Jean-Kevin est dyscalculique ? Quel bonheur de l’entendre à la trompette. Marie-Loana a un petit côté hyper actif ? Chouette, elle va s’éclater à organiser un anniversaire digne du Club Med pour sa petite sœur. Oups, coupure de courant imprévue, OK on sort les bougies. Une mutation à Maubeuge ? Génial, il y a un zoo, idéal pour le stage de Jean-Kev qui veut devenir vétérinaire. 

Tu me diras, tout le monde n’a pas la chance d’avoir un jardin. Ce à quoi je répondrai qu’il n’y a pas besoin d’un parc de trente-deux hectares pour s’éclater ! Une jardinière à plantes aromatiques à suspendre au bord de la fenêtre, une orchidée à chouchouter au fil des années, un bonzaï à tailler avec amour… tout ceci apporte son lot de joie et d’enseignements. Et puis, si vraiment tu as envie de bénéficier des bienfaits du jardinage en t’évitant la terre sous les ongles et le risque de tétanos, tu peux aller consulter nos recommandations de lecture sur le thème du jardin ou bien… tenter le tricot ! C’est génial, le tricot, on y trouve une autre forme de sagesse, je t’en parlerai un autre jour.



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Cet article a été écrit par :
Agathe Portail

Maman de 4 enfants (très) rapprochés et girondine d’adoption, Agathe Portail écrit des romans adultes édités chez Actes Sud, Calmann Levy et J'ai lu, mais aussi des romans historico-fantastiques édités par Emmanuel Jeunesse.

https://www.fnac.com/ia9173370/Agathe-Portail

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