Christine Lewicki est coach, conférencière et auteure des best sellers J’arrête de râler ! et Wake Up, 4 principes fondamentaux pour arrêter de vivre sa vie à moitié endormi (éditions Eyrolles). Elle est aussi une mampreneur : ses journées sont rythmées entre son entreprise O Coaching, ses diverses responsabilités bénévoles et la logistique quotidienne de sa famille. Elle vit à Los Angeles avec son mari et ses 3 filles.
De tout coeur, merci Christine de passer ce moment avec nous !
Avec plaisir ! Le sujet des mamans me tient particulièrement à coeur. Ma soeur Florence et moi-même, nous nous sommes rendues compte que malheureusement, très souvent on râle le plus sur les gens qu’on aime le plus au monde. Trop souvent, quand on se lève le matin ou qu’on rentre chez soi le soir, notre vie de famille ressemble à un champ de bataille. Trop souvent, à la maison, on est dans la souffrance. C’est vraiment dommage.
C’est pour cela que nous avons écrit un livre destiné aux familles (J’arrête de râler sur mes enfants et mon conjoint, ndrl). Nous souhaitions y apporter des pistes concrètes et tangibles sur comment retrouver plus de plaisir à la maison.
En anglais, on fait la différence entre les mots «house» et «home». Ici je parle de la maison au sens «home» : ce que vous les Fabuleuses, vous appelez le foyer !
Les médias vous présentent comme coach, auteure et conférencière. Et vous, vous commenceriez par vous présenter comment ?
Je m’appelle Christine Lewicki, je suis une femme, une maman de 3 enfants et l’heureuse épouse de mon mari Philippe. Je suis toujours épatée de voir à quel point on s’aime encore, après 20 ans ensemble. Je trouve que j’ai vraiment de la chance et que c’est absolument merveilleux !
Quelle est votre plus grande passion ?
Quand j’avais 16 ans, ma mère m’a demandé ce que je voulais faire plus tard. J’ai répondu : «Je veux aider les gens à être heureux au travail». Lors de mes nombreux jobs d’été, je voyais trop de personnes qui disaient le lundi : «Vivement vendredi !» Je me disais : «Ça ne va pas ! Ce n’est pas possible d’attendre la fin de la semaine pour revivre !»
J’ai donc commencé ma carrière dans les ressources humaines. J’ai d’abord abordé la notion de travail salarié, puis de travail entrepreneurial.
Aujourd’hui, j’aborde la notion de travail au sens beaucoup plus large de «quelle est la contribution que j’apporte à la société» : pour moi, le travail s’intègre tout à fait dans nos rôles de parents et aussi de mère au foyer. Les grands-parents font également leur travail quand ils jouent leur rôle de grands-parents !
Je suis vraiment passionnée par le fait de se servir de notre travail pour atteindre une forme d’épanouissement dans notre vie. Ma passion, c’est aider le plus de personnes possibles à se servir de leur travail pour passer d’une vie ordinaire à une vie extraordinaire, une action imparfaite à la fois…
Pouvez-vous nous raconter un grand moment de votre carrière ?
J’ai vécu un grand moment quand j’ai réorienté ma mission. Jusque là, en tant que coach, j’avais accompagné beaucoup d’entrepreneurs, de mampreneurs et de consultants, les aidant à faire valoir leur expertise.
Un jour, je suis allée à un séminaire à San Diego. J’y ai participé à un test dont le résultat était que ma vocation consistait à «transformer l’état d’esprit français». Une voix résonnait dans ma tête : «C’est n’importe quoi ! Qui es-tu pour prétendre faire quoi que ce soit pour transformer la mentalité française ?» J’ai vraiment résisté à cet exercice, d’autant plus que nous avions mis tellement de temps à faire notre place ici à Los Angeles que je ne me voyais pas tout recommencer en France.
Puis, j’ai lu un livre où on me proposait d’arrêter de râler. Pendant plusieurs mois, j’ai procrastiné. Un soir, je me suis rendue compte que je râlais trop sur ma vie de famille. J’ai compris qu’il fallait que j’arrête de râler, parce que ça allait me faire avancer énormément dans ma vie et aussi me permettre de mieux accompagner mes clients.
J’ai donc décidé de me lancer dans le challenge «J’arrête de râler» et de faire un blog pour le partager à mes amis et aux membres de ma famille.
À ma grande surprise, le blog a eu un succès énorme sur les réseaux sociaux, a été partagé de blogueur en blogueur, puis est arrivé aux médias, dans la presse, à la radio, à la télé. Ce qui n’était qu’un blog a ensuite donné naissance à un livre.
Manifestement, ma vocation était réelle : j’étais effectivement destinée à contribuer à transformer l’état d’esprit français.
Avez-vous eu une expérience de «mère au foyer à plein temps» ?
Suite à notre départ aux Etats-Unis, pour des raisons juridiques, je n’avais pas de visa pour travailler. À 10 000 km de tout soutien familial, je me suis retrouvée mère au foyer à temps plein. Ce n’était pas du tout ce que j’avais prévu mais c’est le plus beau cadeau que la vie ait pu me donner.
Quel a été votre plus grand challenge, pendant cette période à la maison ?
Les défis d’une maman au foyer dépendent vraiment de l’âge des enfants. Quand mes filles étaient petites, ce n’était pas vraiment satisfaisant de devoir faire les courses, préparer les repas jour après jour, ramasser les jeux, changer les draps, donner les bains… toute cette logistique familiale que j’appelle «ma vie ordinaire et franchement pas toujours sexy !»
Quand on est mère au foyer, on est confrontée à ça : la vie ordinaire et pas toujours sexy. Ce n’est pas facile, parce qu’on ne se sent pas nourrie. On a l’impression de donner, donner, donner… et on ne reçoit pas beaucoup. Cela peut être très frustrant.
Comment êtes-vous sortie de cette souffrance ?
Au moment où ma deuxième fille est née, j’ai vraiment senti qu’il fallait que je lâche prise, que je «plonge» dans la maternité, que j’arrête de résister et que je commence à accepter certaines choses. Je me souviens très bien d’un moment où je me suis dit : «Christine, arrête d’essayer de t’asseoir pour le petit-déjeuner. Tu vas moins souffrir si tu acceptes de manger le petit déjeuner debout.»
Il fallait toujours chercher une tartine, il y avait toujours un enfant qui pleurait ou quelque chose qui faisait que je n’arrivais pas à m’asseoir pour prendre un café. Donc à un moment donné, je me suis dit : «Christine, lâche prise. La souffrance n’est pas dans le fait de prendre ton café debout, mais dans le fait de t’attendre à prendre ton café assise. Si tu acceptes de prendre ton café debout, tu ne vas plus souffrir.»
Ce qui amène énormément de souffrance dans les foyers, c’est cet écart entre ce qu’on souhaite qu’il se passe et ce qu’il se passe réellement.
Comment réduire cet écart entre nos attentes et la réalité ?
Il faut agir des 2 côtés :
- essayer d’améliorer la réalité : inspirer les autres, les éduquer, demander de l’aide, mettre en place des routines, organiser notre vie pour faire en sorte que la réalité s’aligne avec nos attentes. Par exemple, j’ai mis en place des bacs à linges pour que les enfants rangent eux-mêmes leurs vêtements.
- lâcher prise et revoir nos attentes à la baisse : je me suis rendue compte qu’il était important que mes attentes s’alignent aussi avec la réalité. Parfois, on a des attentes hallucinantes par rapport à nos enfants ou à nos propres moyens. On vit dans l’illusion que nos enfants vont faire tout ce qu’on leur demande au moment où on le leur demande, que la maison va toujours être rangée etc. Mais à un moment, il faut lâcher prise.
Aujourd’hui vous n’êtes plus «au foyer à plein temps». Quels sont vos challenges de maman qui travaille ?
La grosse différence, c’est qu’entre temps j’ai arrêté de râler !
J’ai eu cette prise de conscience que je passais mes journées à résister ma vie, que je passais à côté de ce que j’avais à vivre. Je me suis dit : «Mes enfants sont petits, ils vont grandir, un jour je vais mourir et j’aurai passé ma vie à résister ma vie ! Il faut que je trouve le moyen d’être en paix avec le chaos de mon quotidien.»
J’ai donc arrêté de râler. Aujourd’hui, ma réalité de mère entrepreneuse a profondément été transformée par ce challenge. Nos matinées à la maison n’ont littéralement plus rien à voir, nos soirées non plus. Parce que j’ai arrêté de pointer du doigt les coupables, on vit dans un climat de sérénité, on est beaucoup plus dans l’échange, la coopération, le plaisir, la bienveillance ensemble.
Vous êtes devenus la famille Ricoré ? Une famille heureuse et parfaite ?
Famille heureuse, oui. Parfaite, non ! Notre famille est complètement imparfaite.
Ce matin, quand j’ai quitté la maison, il y avait encore des affaires du petit déjeuner sur la table, des miettes par terre dans la cuisine, les boîtes de décorations de Noël au milieu du salon… Ma maison est toujours en bazar. J‘ai toujours des frustrations.
Mais quand ça va trop loin, je suis capable de dire mon besoin. Mes enfants et mon conjoint sont capables de le comprendre, et moi de comprendre le leur.
Êtes-vous prête à parler du décès de votre cousine, et des changements qu’il a engendrés dans votre quotidien ?
Je pense souvent à ma cousine. Les émotions sont toujours aussi fortes. Julie a été emportée par un cancer du cerveau. Elle avait 39 ans et 3 enfants de moins de 14 ans.
Je pense souvent à elle quand je fais les tartines des enfants ou justement quand je balaie ma cuisine. Et je me dis que j’ai de la chance. J’ai de la chance de balayer ma cuisine, d’avoir une table de petit déjeuner toute sale, de devoir conduire mes enfants à l’école. Toutes ces choses auxquelles je résistais avant, maintenant je me dis que j’ai de la chance de les vivre.
Cette épreuve m’a vraiment apporté de la gratitude pour cette vie ordinaire.
J’ai aussi appris quelque chose d’important avec ce décès : il y a des drames dans la vie, des choses profondément tristes. Cela peut être des décès mais aussi des pertes d’emploi, de maison, des manques d’argent, la maladie… Il y a des choses difficiles à vivre dans notre quotidien. Plus on vieillit, plus on rencontre ces choses. Mais au milieu de cette souffrance, il y a aussi de la sérénité, de la paix, de l’amour à vivre. Ce que j’ai vécu, c’est vraiment de la grâce.
Je pense que dans toutes les souffrances de la vie, il y a quelque chose de profond à vivre si on choisit la grâce plutôt que la catastrophe. C’est une prédisposition de l’esprit, quelque chose qui se cultive. C’est un choix. Choisir la grâce de ce qu’il y a à vivre dans nos souffrances.
Votre secret pour rester inspirée dans ce que vous faites ?
Dans mon livre Wake up, j’expose 4 principes fondamentaux :
– J’ose être brillant(e)
– Je pose des actes à la hauteur de mes ambitions
– Je crée ma réalité avec mes mots
– Je prends soin de ma source.
Pour moi, «Prendre soin de ma source» est le principe plus difficile à mettre au coeur de ma vie. C’est certainement le cas pour la majorité des mères, qu’elles travaillent ou qu’elles ne travaillent pas : d’un point de vue logistique, on est tellement sollicitée, on a tellement de responsabilités, de choses à gérer et avec lesquelles jongler qu’on a l’impression que ça n’arrête jamais et que c’est impossible de prendre soin de notre source.
Mais j’ai réalisé que sans ce principe fondamental, les 3 autres ne peuvent pas exister, ni durer, ni être mis au coeur de ma vie. Je ne peux pas être brillante, agir à la hauteur de mes ambitions ni changer ma réalité par mes mots, si je ne prends pas soin de ma flamme intérieure.
Je suis intimement convaincue qu’on a tous une flamme à l’intérieur. Parfois, on peut la sentir lors d’une conversation délicieuse, alors qu’on travaille sur un projet qui nous tient à coeur, lors d’une conférence ou en lisant un livre.
La plus grande responsabilité de notre vie, c’est de maintenir ce feu intérieur allumé. Je ne peux pas laisser la négativité ambiante, les râleries, le stress éteindre cette flamme intérieure.
Concrètement, comment faites-vous pour prendre soin de votre source ?
D’abord, je fais de la place dans mon agenda. Je pousse les autres choses. J’arrête ce que je suis en train de faire. Dans tous les cas, nos foyers vont toujours nous solliciter énormément : il faut donc créer de l’espace, accepter de laisser tout en plan pour aller cultiver notre flamme intérieure.
Ensuite, je choisis les informations qui entrent dans mon champ de conscience. J’ai arrêté la télé, la radio, les mauvaises nouvelles qui nous font peur et qui nous font douter du monde plutôt que de nous le faire comprendre. Je préfère m’informer avec des sources d’information qui sont plus approfondies, qui me donnent des réelles pistes pour comprendre le monde.
J’essaie également de livre des livres d’auteurs inspirants, d’aller à des conférences ou des séminaires, bref de faire entrer dans mon champ de conscience des choses qui me donnent des ailes plutôt que des choses qui me coupent les pattes en me faisant douter du monde, de l’humanité et de moi-même.
Pour prendre soin de ma source, j’essaie également de m’entourer des bonnes personnes, c’est-à-dire de gens qui sont sur le même chemin que moi : vouloir connecter avec la grâce de la vie plutôt qu’avec la souffrance, les râleries, les limitations, les peurs de la vie.
Enfin, j’ai beaucoup de pratiques corporelles et spirituelles. La danse, le yoga et les enseignements spirituels sont au coeur de ma vie. Je crois qu’il y a énormément de réelle sagesse dans notre coeur et dans notre âme, et que c’est par le corps qu’on peut y accéder.
Quels sont vos projets pour la suite ?
Il y en a plein ! L’une de mes grosses priorités du moment, c’est que mes livres soient publiés aux Etats-Unis. Je vais commencer par J’arrête de râler !. Comme le marché de l’édition est très différent ici aux Etats-unis, il faut tout recommencer. Mais j’ai vraiment envie que mon travail soit publié ici !
Ensuite, j’ai un projet de livre qui est en train de germer en moi. Il parlera de l’étape de développement personnel qui est juste après avoir arrêté d’être une victime (J’arrête de râler !) et avoir commencé à vivre réveillé (Wake Up, 4 principes fondamentaux pour arrêter de vivre sa vie à moitié endormi).
Je souhaite également poursuivre la construction de notre réseau de formateurs J’arrête de râler sur mes enfants et mon conjoint, qui s’étend maintenant en France, en Suisse et en Belgique, et qui donne beaucoup de clés aux parents qui veulent transformer le quotidien de leur foyer.
Je voudrais aussi continuer à développer le travail de Wake Up, le rendre plus accessible à plus de monde, notamment aux jeunes adultes.
Quelle est votre devise ?
«Sois la lumière que tu as envie de voir dans le monde !» Dans «lumière», il y a la notion de rayonner qui je suis, de saisir toutes les opportunités d’être moi-même dans toutes mes imperfections.
J’ai aussi une autre devise : «Use me». C’est très spirituel : j’ai envie d’être au service de quelque chose de plus grand que moi.
Un petit mot pour les Fabuleuses ?
Je n’ai aucun doute qu’elles sont fabuleuses ! (Rires) Non mais réellement. On peut se dire : qu’est-ce que c’est que d’être fabuleuse ? Avoir une robe sexy, avoir le bon poids sur la balance, correspondre à ce que les autres attendent de nous, à ce que la société attend de nous ?
Pas du tout. Être fabuleuse, c’est aller chercher ce qui est à l’intérieur de soi et qui a envie d’être révélé.
C’est se donner la permission d’aller chercher le plaisir. Parce que je suis convaincue que ce qui est à l’intérieur de nous et qui a envie d’être révélé, c’est souvent ce qu’on aime le plus faire.
Quand on se donne la permission de faire ce qu’on aime le plus faire dans la vie, on se retrouve à être la personne qu’on a le plus envie d’être dans la vie. C’est ça, être fabuleuse !