Après « Et je choisis de vivre » dont nous avions parlé à sa sortie l’an dernier, France 2 propose ce mardi 5 mai*, un film émouvant qui donne la parole à trois mamans et un papa endeuillés.
Ils s’appellent Claire, Katia, Sandrine et Jean-François. Il racontent, avec leurs mots autant que leurs silences, l’histoire des parents endeuillés qui vivent entre deux mondes. Il y a celui de leurs enfants partis trop tôt mais autrement présents, autrement vivants ; et puis celui dans lequel il faut bien continuer à vivre et qui enveloppe trop vite ces enfants d’un halo de silence et d’oubli.
À l’image de Katia qui reçoit comme un coup de poignard quand elle se découvre, aux yeux de la CAF, « célibataire sans enfant ». Comme si son fils Soham n’avait jamais existé.
Comme si elle n’avait jamais été mère.
« Pas de trace de toi, de ta vie, de ta présence, rien, témoigne cette maman endeuillée. Je suis rayée de la grande communauté des mères. »
Aujourd’hui, Katia essaie de trouver une place pour Soham dans son couple et dans la famille qu’elle construit avec son compagnon Benoît.
Le plus difficile ?
Constater que ceux qui osent encore prononcer le prénom de Soham se font rares. Elle témoigne d’ailleurs de la joie qu’elle a pu éprouver quand, lors d’une soirée avec des amis, une connaissance lui a posé des questions sur son fils décédé :
« Quel âge avait-il ? comment est-ce arrivé ? est-ce que tu as envie de m’en parler ? comment tu vis les choses aujourd’hui ? »
Une conversation que Katia a vécue comme un cadeau :
« Je sentais que ça ne la mettait pas mal à l’aise ! Ce n’est pas parce que j’avais des larmes qu’elle s’est arrêtée, et ça, ça m’a fait beaucoup de bien. Ça n’est pas parce que ça me fait pleurer que je ne veux pas en parler. »
Tous ces parents témoignent de leur envie de parler de leurs enfants, de continuer à pouvoir évoquer leurs existences. Et de la violence qu’ils ressentent de se sentir seuls à penser encore à eux. Une violence ressentie dans le silence de certains.
Il leur faut s’adapter aux attentes extérieures d’une société où la mort est tue, enterrée.
« Déjà, la mort d’un enfant est un effondrement, explique Sandrine, qui a perdu son fils Baptiste. On a d’autant plus besoin que ceux qui étaient des repères pour nous avant soient là. Ça ne veut pas dire qu’ils fassent comme si rien ne s’était passé, mais qu’ils soient capables de continuer à nous parler de leurs enfants vivants. »
Des amis proches de Sandrine et de son mari Jean-François témoignent de la difficile présence à adopter auprès de ces parents en deuil de leur fils Baptiste.
Difficile, mais indispensable.
« Accepter qu’on ne peut rien…et être là. Ne pas être dans le conseil, mais être là, faire sentir qu’on entend, qu’on comprend. Accepter de prendre le risque de dire le mauvais truc, mais c’est mieux que de ne pas être là ! »
Ces parents, qui se confient au fil des scènes, souffrent de l’indifférence, mais peut-être encore plus de la pudeur, cachée derrière cette “peur de mal faire”. Ce documentaire émouvant est un appel à risquer la relation, pour permettre à ces mères et à ces pères de continuer à vivre tout en portant en eux et autour d’eux la vie de leurs enfants partis trop tôt. Un plaidoyer pour oser se confronter à la fragilité et à la vulnérabilité.
Ces trois témoignages explorent, chacun à leur façon, le tabou qui entoure la mort des enfants et nous invitent à oser rompre le silence.
Un film qui saura toucher les parents endeuillés et qui pourra parler à tous ceux qui sont concernés, dans leur entourage proche ou plus lointain, par l’épreuve du décès d’un enfant. Les uns y trouveront la compréhension et la compassion nécessaires, les autres, des pistes pour mieux accompagner les parents endeuillés.
* Dites-leur que je suis vivant, un film de Caroline Conte et Thomas Robin, mardi 5 mai à 00h05 sur France 2, dans l’émission « Infrarouge ».