Devenir mère a été une tempête sur mon estime de moi - Fabuleuses Au Foyer
Dans ma tête

Devenir mère a été une tempête sur mon estime de moi

maman tempête
Myriam Oliviéro 17 mars 2022
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J’ai mis du temps à assimiler le simple fait que je pouvais échouer.

Enfant, j’étais tellement conforme à ce qu’on attendait de moi – calme, studieuse, polie, etc. – que je n’étais pas spécialement prête à me planter. Ça peut paraître super prétentieux, dit comme ça, et pourtant non, je ne me plaçais pas au-dessus des autres. D’ailleurs, ce n’est pas pour autant que j’ai décroché la première place dans tous les domaines, loin de là… à commencer par les concours de piano.

Malgré mes répétitions quotidiennes et concentrées, je perdais mes moyens en voyant le jury et le public qui scrutaient chaque note, chaque nuance, chaque placement de main. Je n’ai jamais eu la première place et, malheureusement, c’est surtout ça qui est resté longtemps imprimé dans mes souvenirs. De ce fait, la déception surpassait toujours la satisfaction d’avoir travaillé, persévéré, progressé et éprouvé du plaisir à jouer. J’ai tout de même fini par tolérer mon manque d’excellence dans la musique, car après tout, je n’avais pas pour ambition de devenir musicienne professionnelle.

En devenant adulte, j’ai connu d’autres “ratés” divers et variés.

J’ai donc été obligée d’encaisser, ce qui n’a pas été simple pour moi, vu la faible estime que j’avais entretenue à propos de moi-même. Mais bon, ce n’était jamais la fin du monde, juste la fin de certaines illusions et espoirs. Ces expériences m’ont déstabilisée un temps, puis j’ai su rebondir et, surtout, ça n’engageait que moi.

Puis je suis devenue maman.

Tout, ou presque, est dit dans ces quelques mots : je suis devenue maman. Celles qui savent savent. À partir de là, les ratés, comment dire… il y a un moment où j’ai arrêté de les compter. Qu’on s’entende, ce terme est péjoratif et, vu par d’autres, ça n’y ressemble pas, à des ratés, mais la manière dont je raconte ces événements ici, c’est celle dont je les ai vécus et ressentis dans mon for intérieur.

La tempête sur l’estime de soi qu’est la maternité, dont parle Hélène Bonhomme, est une image qui trouve beaucoup d’écho en moi.

On pourrait d’ailleurs emprunter d’autres termes du même champ lexical pour évoquer ce qui se passe en nous : tornade, cyclone, typhon, apocalypse, …

Alors, je peux te dire que la césarienne en urgence pour mon premier accouchement, suivie d’un échec de l’allaitement, je les ai vécus comme des ouragans, au bas mot. Encore aujourd’hui, 12 ans après le premier, et presque 7 ans après le deuxième, quand j’évoque ce que j’ai vraiment vécu comme des échecs cuisants, je ressens encore une vague d’émotions qui déferle dans mes entrailles et remonte jusqu’à ma gorge.

Au milieu d’une époque où la volonté d’un retour au naturel paraît aller de soi chez de plus en plus de mamans – ce que je trouve tout à fait honorable –, ne pas allaiter son enfant au sein a tendance à être jugé, a minima regardé avec un petit tiquement de l’œil et un sourire légèrement forcé.

Pour ma part, je n’ai même pas attendu le jugement des autres, je me suis jugée moi-même comme une mère qui n’avait pas réussi à nourrir ses enfants de la meilleure manière. Je vois encore les multiples sage-femmes et auxiliaires de puériculture y aller de leurs conseils, tous différents et, dès que la courbe de poids s’infléchissait, débarquer avec les biberons, les pipettes et le lait artificiel. Biberons que je n’avais même pas pris la peine de mettre sur la liste de naissance, laits artificiels dont je ne savais absolument rien, beaucoup plus calée que j’étais sur les infusions au fenouil favorisant la montée de lait et les techniques pour éviter les crevasses. 

Ah, le sujet de l’allaitement… On pourrait en parler des heures et des heures que chacune repartirait avec les mêmes idées qu’elle avait au départ. Ce n’est pas le sujet.

Très franchement, on a tellement plus à gagner dans la sororité que dans le crêpage de chignons.

Mon expérience est bien sûr très personnelle, mais je suis certaine que plus d’une Fabuleuse – dont toi peut-être qui me lis – pourrait me lancer un “moi aussi” plein d’émotions. Tu peux être une de celles qui éprouvera simplement de la compassion, même si tu as vécu tout autre chose, ou tu feras partie de celles qui ne comprendront pas ce que j’ai vécu. Peu importe, parce que ce qui nous rapproche le plus finalement, c’est notre capacité commune à nous considérer bien trop souvent nous-mêmes comme la cause de tout ce qui ne tourne pas rond, même Maurice dans son bocal carré.

Alors, qu’est-ce qu’on en fait, de tous ces ratés ?

On les garde sur nos petites épaules ?

On les enferme à double tour dans un recoin sombre de nos souvenirs, dans la chambre la plus haute de la plus haute tour de notre inconscient, en espérant qu’ils ne fassent pas de bruit ?

Quitte à se rejouer la même scène dès qu’une parole ou un événement les fait remonter à la surface ?

Ou alors on en parle, et on se dit un “moi aussi, j’ai raté des trucs dans ma vie” qui en dira bien long et viendra mettre du baume au coeur.

Dans cette tempête de l’estime de soi, on peut choisir de se débattre avec ses petits bras ou on peut se tendre la main, embarquées sur le même rafiot, et se laisser guider par la lumière de celles qui seront passées par là et auront trouvé des solutions pour naviguer avec plus de fierté et de légèreté.

Fort heureusement, tout ce que j’ai raté ne m’a pas empêchée d’avancer.

Voici ce que j’ai appris :

si je me focalise sur mes échecs, j’oublie de regarder tout ce que j’ai réussi.

En plaçant la barre toujours plus haut que ce que je ne peux atteindre, je me place moi-même dans une spirale où les échecs entraînent la mauvaise estime de moi et inversement, et indéfiniment. Peu importe qui a placé le curseur au mauvais endroit au départ, que ce soit mes parents, mes arrière-grands-parents, Adam et Eve, où qui sais-je…

Je dois me concentrer sur ce que je peux changer moi, aujourd’hui et ici.

Et je le peux. Yes I can, comme dirait ce cher Barack. D’ailleurs, personne d’autre ne le fera. Personne d’autre que moi ne fera changer mon regard de direction et poser mes yeux avec reconnaissance sur qui je suis et ce que j’ai fait de bien, de bon et même d’excellent. Parce que j’ai beau être imparfaite, p* j’en ai fait des belles choses dans ma vie, j’ai atteint des objectifs personnels et professionnels, j’ai trouvé l’homme de ma vie, qui lui joue divinement du piano – un hasard ? peut-être, peut-être pas 🙂 –, et on est encore plus amoureux qu’il y a 18 ans, j’ai 2 garçons dont je suis hyper fière, j’ai des amies qui, juste par leur existence, me rappellent que je vaux la peine d’être connue.

Alors des ratés, d’accord j’en ai fait des tas –  l’odeur de certains persiste encore dans les narines de ma mémoire – et j’en ferai encore, mais je suis fière de moi et ça fait un bien fou à la Fabuleuse que je suis, à mon Fabuleux, à mes enfants, et peut-être même à la terre entière si ça se trouve.

Sois fière de toi, chère Fabuleuse, tu le vaux bien, crois-moi, et bien plus encore.



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Cet article a été écrit par :
Myriam Oliviéro

Infirmière de formation et diplômée en médecine tropicale, Myriam s’est orientée vers l’action médico-sociale auprès des publics démunis. Après un séjour de 2 ans en Afrique de l’Ouest, elle s’est investie en France dans différentes associations.

Mariée à un Fabuleux infirmier et pianiste avec qui elle a 2 garçons, elle a rejoint cette année l’équipe des Fabuleuses en tant qu’assistante de rédaction.

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