Quand je dis « arrête un peu de parler chéri »,
ça signifie : « Overdose d’information, de bruit, de sollicitation émotionnelle, du silence je vous en supplie Mamma Mia, en plus je suis en train de remplir la déclaration d’impôts, un minimum de concentration serait appréciable ! »
Quand je dis « Reviens ! »,
ça signifie : « Mais pourquoi tu cours quand je t’appelle, pour quoi tu me fais passer, en plus tu traverses sans regarder, mais quel inconscient, si tu te fais écraser je deviendrais quoi, moi, tu y penses une seconde ? »
Quand je dis « Mais si, le gratin de courgettes c’est très bon »,
ça signifie : « Si on ne le termine pas ce soir, c’est bon à mettre à la poubelle, ça fait trois jours que je te le sers sous une couche de ketchup pour faire passer la dose de légumes recommandée, et, honnêtement, moi non plus j’en peux plus de la courgette, la prochaine fois je cuisine du panais. »
Quand je dis « D’accord, trois copains pour ton anniversaire mercredi »,
ça signifie : « J’aurais dû dire non direct, on peut pas, on a la grippe aviaire, l’agenda est blindé, il va pleuvoir en plus, pourquoi j’ai dit oui, en plus j’aime pas trop ce Jean-Bernard, il est mal élevé, ah la la je mérite la légion d’honneur… ils font des gâteaux Pat Patrouille à la boulangerie ? »
Quand je dis « Tiens Chéri, j’ai eu Marie au téléphone, elle t’embrasse »,
ça signifie : « Oui, oui, j’assume, j’ai passé une heure trente au téléphone, j’ai donné le bain en téléphonant, touillé la soupe en téléphonant, coupé le jambon en téléphonant, mis le lave-vaisselle en téléphonant, on a ri et on s’est plaint de nos Fabuleux, ça fait un bien fou, même si je t’aime follement, mais pourquoi je fais pas ça plus souvent ? »
Quand je dis « Le ski cette année ? c’est une idée »,
ça signifie : « Tu es sûr que c’est une bonne idée ? Tu es prêt à te farcir la luge touuuute la journée, faire la queue pour les forfaits, chercher le gant oublié sur le banc du resto d’altitude, habiller tout le monde avec cinq couches de polaire qu’il faudra dépieauter à peine sortis parce que la dernière a envie de faire pipi ? Et pourquoi on ne va pas au soleil, pour une fois ? »
Quand je dis « Un dîner en semaine ? super idée ! »,
ça signifie : « J’ai tellement la flemme de ressortir le soir, la seule babysitter qui est encore OK pour garder les enfants laisse toujours la cuisine en PLS et en plus il faut la ramener après, mais je m’encroûte mon vieux, il faut que je soigne un peu notre vie sociale, on va finir comme deux vieux qui n’ont rien à se raconter si on ne fait pas attention… »
Quand je dis « Du sport trois fois par semaine ? J’admire ! »,
ça signifie : « Mais comment elle fait c’est pas possible, est ce que je me débrouille mal dans la répartition des tâches avec mon fabuleux, est ce que je suis flemmarde ou c’est elle qui est narcissique, et puis est ce que j’aurais envie de faire autant de sport si j’avais du temps, en fait ? Évidemment non, j’ai horreur du sport. »
Quand je dis « Ah ah, tu es drôle »,
ça signifie : « En fait non, c’est pas drôle, c’est blessant, tu sais bien que quand je suis fatiguée je prends tout au premier degré, c’est pas un crime de ne pas avoir de second degré, c’est juste que je suis sensible, en tous cas perméable, vulnérable, mais pourquoi je me sens obligée de rire à tes blagues méchantes sur ma voiture dégueu ou mon bouton de jean qui saute, je dois être maso… »
Quand je dis « Ah oui, j’en ai entendu parler »,
ça signifie : « La vache, jamais entendu parler, je suis complètement larguée niveau culture, la dernière fois que je suis allée voir un concert c’était en 1993, et le cinéma parlons-en, notre dernière sortie cinoche je ne me souviens pas en quelle année c’était, comment font les gens pour continuer à lire Télérama ou écouter France machin quand ils ont des enfants ? Moi je n’ai pas encore trouvé la recette… »