Les prénoms originaux envahissent les livrets de famille des célébrités : jusque là, rien de nouveau.
On avait haussé un sourcil à la découverte du prénom du fils d’Elon Musk et de Grimes — X Æ A-12. (Oui, c’est ça le prénom, une suite de lettres et de chiffres. A priori, il faut simplement l’appeler « X ».) À titre de comparaison, quand Rihanna a dévoilé le prénom de son fils, RZA, franchement, je me suis dit que tout était normal.
Quand il a fallu trouver un prénom à mes enfants, mon conjoint et moi-même avons opté pour la méthode traditionnelle.
Notre liste personnelle à la main, dos à dos, nous énoncions à tour de rôle nos trouvailles et nous réjouissions ensemble de voir les prénoms qui apparaissaient sur les deux listes. Ce fut un moment plein d’amour et d’espoir, un moment drôle, parfois un peu houleux, dont je garde un souvenir attendri. Le plus beau étant, quelques mois plus tard, de tenir dans nos bras la réalisation concrète, en chair et en os, de ce choix. Ce prénom sélectionné avec soin dans le secret de la grossesse, qui est maintenant utilisé 1500 fois par jour pour divers motifs et dans diverses variations, de « finis ton assiette, Jean-Kévin Muche ! » à « je t’aime plus fort que la lune et les étoiles, mon Jeannot-Kévinou, » ce prénom personnifie l’enfant dans notre psyché, l’incarne dans la société et ancre son identité pour les années à venir.
À y réfléchir, le choix du prénom dit beaucoup de nous…
…et de ce que nous projetons dans notre enfant, contradictions comprises. Rihanna passe le plus clair de sa grossesse à exhiber fièrement son ventre rebondi, mais choisit un prénom incompréhensible et imprononçable par la majorité des gens. Ce décalage entre la présence revendiquée sous le feu des projecteurs et, parallèlement, la protection farouche de l’intimité familiale montre ô combien le prénom d’un enfant traduit le désir profond de ses parents de lui offrir le meilleur.
Le meilleur étant de rester protégé ou compris de tous, original ou traditionnel, porteur d’un héritage, d’un hommage, d’une tradition ou bien en rupture d’un schéma établi : c’est selon chacun.
De même, certains parents souhaitent garder précieusement le secret du prénom jusqu’à la naissance, alors que d’autres se réjouissent de parler de leurs préférences et de nommer publiquement leur bébé avant sa naissance. Divulguer le prénom de son enfant, c’est aussi s’exposer aux avis de tous… ce qui peut devenir source de contrariétés, voire de conflits.
Alors, que faire ? D’abord, revenir à soi.
Se faire confiance et écouter l’émotion positive qui guide notre choix. Quant aux avis des uns et des autres, on peut apprendre à leur prêter une oreille distraite et se détacher de leurs ressentis. Nous sommes les meilleurs parents pour notre enfant, et à ce titre, notre choix de prénom sera le bon, empli d’amour et de belles valeurs.
Qui plus est, le prénom n’est que l’écrin de la personnalité complexe de l’enfant. Voilà de quoi relativiser les quelques éventuelles tensions qui surgissent à l’heure du choix final.
Shakespeare se saisit de cette évidence lorsqu’il fait dire à Juliette :
« What’s in a name? That which we call a rose,
By any other word would smell as sweet. »
« Qu’y a-t-il dans un nom ? Ce que nous appelons une rose,
Sous tout autre nom sentirait aussi bon. »
Quel que soit son prénom, l’enfant aura ses caractéristiques propres et cheminera dans le monde selon son bon vouloir. Il pourra changer de prénom s’il le souhaite, ou le chérir toute sa vie.
Voilà une bonne nouvelle, chère Fabuleuse ! Finie la pression du choix du prénom. Qu’il porte un prénom classique ou cryptique… Ton enfant ne ressemblera toujours qu’à lui-même.