Un dragon a emporté notre maison - Fabuleuses Au Foyer
Dans ma tête

Un dragon a emporté notre maison

illustration dragon
Hélène Bonhomme 26 novembre 2023
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Cet été, j’ai lu à mes enfants un petit conte illustré de Jack Kent : There’s no such thing as a dragon.

L’histoire m’a tellement parlé que je te la résume ici. 

Quand il se réveille un matin, le petit Billy Bixbee se retrouve nez à nez avec un dragon. La bête est assise sur son lit. Elle fait la taille d’un chat et semble inoffensive. Billy court prévenir sa mère, mais elle lui rétorque que les dragons n’existent pas.

Comme les dragons sont censés ne pas exister, Billy ignore la créature tandis qu’il s’habille et met ses chaussures. Alors le dragon se met à grossir ; il a désormais la taille d’un gros chien. Il grimpe sur la table du petit déjeuner et il dévore tous les pancakes.

La mère de Billy tente de passer l’aspirateur, mais le dragon n’a cessé de grossir :

il prend désormais tellement de place dans la maison que Madame Bixbee est obligée d’entrer et de sortir par les fenêtres pour le contourner.

Aux heures de midi, le dragon remplit la maison entière : sa tête sort par la porte d’entrée, et son immense queue va jusqu’au bout du jardin. Tandis que le camion du boulanger passe dans la rue, le dragon, par l’odeur alléché, s’élance dans la rue avec la maison des Bixbee sur son dos. 

En rentrant du travail, le père de Billy découvre que sa maison a disparu. Heureusement, les voisins lui montrent la direction à suivre : il se lance à la poursuite du fuyard, grimpe sur la tête du dragon qui occupe à présent toute la rue, et rejoint son fils et sa femme dans les airs.

Madame Bixbee soutient toujours que le dragon n’existe pas, mais Billy insiste :

« Il y a un dragon, Maman. » 

Aussitôt, la créature commence à rétrécir. Bientôt, elle a retrouvé sa taille de chat et tout le monde reconnaît que les dragons existent.

En reprenant ses esprits, la mère prend le petit dragon sur ses genoux et s’interroge tout en le caressant : « Pourquoi fallait-il qu’il devienne si gros ? »

Billy répond tranquillement : « Sans doute voulait-il qu’on le remarque. »

Dans tous les foyers, le tumulte s’installe progressivement.

La menace gronde… mais tant qu’elle n’est pas devenue absolument gigantesque, personne ne dit rien. On glisse la poussière sous le tapis. On fait comme si de rien n’était. Parce que reconnaître la présence du dragon nous obligerait à reconnaître la présence de certaines émotions : l’amertume, la peur, la honte, le regret, la solitude, le désespoir, la déception, la jalousie, la frustration, la haine, l’ennui… 

Sur le moment, ignorer le problème nous aide à entretenir la paix. Mais comme chez Billy, le dragon ne cesse de grandir et un beau matin, il surgit sous une apparence tellement flagrante que personne ne peut faire abstraction de lui. 

Et toi, chère Fabuleuse, quel est ton dragon ?

Il s’agit parfois d’une dépendance, parfois d’un blocage au niveau sexuel, d’un secret de famille, d’une infidélité, d’un conflit au sujet de la garde des enfants, de l’impossibilité de couper le cordon avec la famille d’origine… Il s’agit parfois simplement d’une course permanente, d’une fatigue immense et/ou d’une terreur absolue à l’idée de s’affirmer et d’affronter de potentiels conflits.

L’animosité qui découle de cette situation dragonesque aurait pu être déversée au compte goutte, un problème après l’autre, à une dose tolérable, au fil des années.

Mais comme les choses n’ont jamais été adressées clairement, les problèmes s’entassent, s’amassent et se solidifient.

Ils prennent des proportions ingérables, qui nous explosent à la figure et nous laissent totalement abasourdis.

Tout le monde sentait la tempête arriver, mais personne n’a jamais pris le taureau par les cornes. Personne n’a eu les conversations effrayantes mais indispensables, celles qui auraient pu désamorcer la bombe quand il en était encore temps.

Mon objectif n’est pas de te faire peur avec une histoire de dragons menaçants.

Bien au contraire. Mon objectif est de te transmettre la petite étincelle de courage qu’il te manque peut-être pour soulever le tapis et regarder dans les yeux les petits dragons qui y ont fait leur nid. De reconnaître leur présence. De les appeler par leur nom. De te mettre en mouvement.

Chère Fabuleuse, ta santé mentale est précieuse, et rien n’est assez insignifiant pour ne pas valoir la peine de se battre.

Ton couple est précieux, et rien n’est assez insignifiant pour ne pas valoir la peine de se battre.

Ton foyer est précieux, et rien n’est assez insignifiant pour ne pas valoir la peine de se battre.

Tu songes peut-être : « Je suis capable de prendre sur moi pendant quelques années encore. » Alors tu gardes le silence, et tu te convaincs que c’est parce que tu es quelqu’un de pacifique.

Oui mais en attendant, le monstre sous le tapis a encore pris quelques kilos… 

Dis-moi, quel est ton dragon ? N’hésite pas à passer par l’écrit. C’est un service que tu te rendras à toi-même, en nommant ce que tu n’as peut-être jamais nommé. Tu verras, une fois reconnu, le dragon commencera déjà à rétrécir…



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Cet article a été écrit par :
Hélène Bonhomme

Fondatrice du site Fabuleuses au foyer, maman de 4 enfants dont des jumeaux, Hélène Bonhomme multiplie les initiatives dédiées au bien-être des mamans : deux livres, deux spectacles, quatre formations, la communauté du Village, une chronique sur LePoint.fr et un mail qui chaque matin, encourage plusieurs dizaines de milliers de femmes. Diplômée de philosophie, elle est mariée à David et vit à Bordeaux.

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