« Trouver 10 choses positives dans ma vie ? Impossible. Je n’y arriverai jamais. Même 3 ! » Me souffle-t-elle les larmes aux yeux. Rien ne va dans sa vie, qui est nulle – tout comme elle. Malgré tout, de mon point de vue, elle est plutôt chouette, sa vie. Et sous certains aspects, je l’envie même un peu.
Mais ce jour-là, le noir l’emporte sur le lumineux.
Cette amie venue me rendre visite par une grise journée d’hiver est dans une phase difficile.
Cet été, elle m’avait pourtant semblé bien plus positive. Je la comprends. Moi aussi, je trouve la vie plus légère et joyeuse quand il fait beau. Pour moi aussi, l’hiver est une traversée durant laquelle je suis tentée de guetter le printemps, comme on scrute la terre ferme.
La météo extérieure a une fâcheuse tendance à influencer ma météo intérieure.
En témoigne mon carnet de gratitude, commencé il y a quelques années. Tu sais, ce calepin dans lequel je note chaque jour ce pour quoi je suis reconnaissante, les cadeaux que la vie me sert sur un plateau d’argent. L’été, il est foisonnant. Et l’hiver… ses pages sont blanches comme neige. Ce cahier est resté fermé durant toute la saison hivernale des premières années où j’essayais de le mettre en place. Une élipse hiémale, dirait-on pour rendre la chose littéraire.
La vérité, c’est que durant cette période, je vivais dans l’attente que ça aille mieux
au lieu de vivre tout simplement, de savoir savourer les bonheurs apportés par l’hiver.
C’est également pour cette raison que je n’ai pas commencé à remplir un tel répertoire, dès le jour où j’ai découvert l’émotion de la gratitude à la sauce Fabuleuses. Je m’étais d’abord dit : « Je suis de nature optimiste. Ça n’est pas pour moi. Noter tous les jours, c’est contraignant. Je me débrouille très bien sans. » Erreur.
C’est bien d’être optimiste, de croire aux lendemains qui chantent – le fameux « ça ira mieux quand »
– mais pendant ce temps là, on n’habite pas l’instant présent. Ici et maintenant. Résultat des courses, on risque de passer à côté de sa vie.
Parfois, j’aimerais être une petite souris pour savoir ce qu’Hélène, Anna, Agathe et les autres écrivent dans leur carnet de gratitude. Comment font toutes celles qui arrivent à le remplir, elles. Même en hiver.
Faute de mieux, pour aider mon amie confrontée à l’angoisse de la page blanche, j’ai ouvert mon carnet
, dont au fil des ans, j’avais rempli un peu – tant bien que mal – les pages des jours pluvieux. Après avoir lu quelques exemples tout simples, je lui ai proposé un défi : s’envoyer mutuellement 3 gratitudes, chaque jour, pendant un mois.
Et tu sais quoi ? J’en ai trouvé. Et elle aussi. Même en plein mois de janvier.
Curieusement, le temps m’a paru moins maussade. Et la vie moins morose. Voire même un peu rose.
Aujourd’hui, je vis mieux la traversée de l’hiver, en échangeant mes gratitudes quotidiennement (ou presque…) avec une cousine vivant à l’étranger. Ainsi, mon carnet ne prend plus la poussière. Ce partenariat m’aide à tenir le cap. A rester le capitaine de mon âme, même les jours gris.
Si toi aussi, tu as l’impression d’être nulle en gratitude, si trouver 3 kifs par jours relève de l’exploit pour toi : non, tu n’es pas nulle. Ta vie non plus.
Tu n’as peut-être juste pas (encore) chaussé les bonnes lunettes.
Pour t’aider à y voir clair, je te partage quelques extraits de mon humble collection, au fil des saisons. Ces petits bonheurs du quotidien qui, même si en plein été c’est l’hiver dans ton cœur, donnent à ta vie toute sa saveur. J’ai choisi les plus ordinaires. Ceux que tu peux saisir dès aujourd’hui, quelque soit ta saison de vie. Ceux dont on sous-estime bien souvent la puissance.
Hiver :
- Le givre sur une toile d’araignée
- Les pas qui crissent sous la neige
- L’odeur du feu de bois
- Le reste de la tartiflette d’hier, qui fait un délicieux déjeuner, sans effort
- Le bain chaud, avec de la mousse et une bougie
- Le long câlin d’un enfant
- La promenade en famille, sous le soleil d’hiver
- Le gant perdu en ville hier, retrouvé aujourd’hui, après avoir reparcouru le chemin en sens inverse
- La sensation de chaleur et de sécurité, en fermant la porte lorsqu’on rentre chez soi
- Le regain d’énergie après une belle sieste
Printemps :
- Le coucher de soleil aux couleurs flamboyantes
- Le chant des oiseaux qui célèbrent le printemps
- Le parfum suave des lilas
- Les premiers radis de la saison qui croquent sous la dent
- Les rayons du soleil qui réchauffent mon visage
- Les rires d’un enfant
- L’apéro improvisé avec des amis
- Le calme dans la maison propre et rangée
- La danse de la joie dans le salon, la musique à fond
- La correspondance attrapée de justesse, malgré le retard du premier train
Eté :
- Le magnifique papillon qui butine sur une fleur, juste à côté de moi
- Le chant des cigales, mélodie de l’insouciance
- L’odeur du barbecue, qui donne un petit air de vacances
- Les fraises gorgées de soleil
- Les vagues qui viennent chatouiller mes doigts de pieds
- La main d’un enfant dans la mienne
- Le pique-nique au jardin public, entre midi et deux avec une copine
- La maison qu’on nous a prêtée pour les vacances
- Le tri d’une pile de papiers
- Le petit message tendre de mon fabuleux <3
Automne :
- Les couleurs intenses de la forêt
- Les gouttes de pluie qui tambourinent sur la vitre tout en rythme
- La compote de pomme chaude, dont les effluves chatouillent les narines de toute la maisonnée
- Le petit goût de châtaigne de la soupe de potimarron
- Le plaid tout doux sur les genoux
- Un dessin d’enfant, fait avec beaucoup d’amour
- Le café avec une copine
- Les deux mésanges aperçues par la fenêtre ce matin
- L’éclaircie qui nous a permis une agréable promenade
- Le livre passionnant déniché à la bibliothèque
Je te laisse avec cette dernière réflexion : la gratitude, c’est comme déchiffer un nouveau morceau de musique. Au début, c’est laborieux. Puis, plus tu t’excerce, plus ça devient facile et fluide. Jusqu’à devenir naturel et harmonieux.
Et toi, quelle(s) gratitude(s) pourrais-tu écrire, là, tout de suite ?
