Cela fait presque trois heures que le mercredi a commencé et je ne supporte déjà plus mes enfants. En fait, je ne supporte plus grand-chose : le bruit, le travail, le temps incertain, et surtout leurs bruyantes chamailleries.
Je rêve d’une semaine de vacances sans eux.
Et puis, il y a cette petite phrase lue au détour d’un livre : « je lui ai tenu la main même si j’avais passé l’âge depuis longtemps ». Moi qui pleure de les avoir toute la journée sur le dos, me voilà à pleurer parce qu’un jour ils ne voudront plus me tenir la main.
As-tu remarqué, chère Fabuleuse, à quel point notre vie est ponctuée de paradoxes ?
Tanguy en est un parfait exemple : « tu pourras rester toute ta vie auprès de moi » devient « je n’en peux plus, il faut qu’il parte ! ».
Et nous, les Fabuleuses, quels sont les nôtres ?
- J’ai tellement envie d’être enceinte/J’ai tellement hâte d’accoucher, je n’en peux plus
- Vivement qu’il fasse ses nuits/Il est 14 h, il est peut-être temps qu’il se réveille
- J’ai le dos en compote, vivement qu’il marche/Où est-ce qu’il est passé encore ? On était plus tranquille quand il ne bougeait pas
- Allez, tu goûtes au moins, il faut manger de tout ! /Le frigo est déjà vide ? Mais j’ai fait le plein il y a 2 jours !
- Vas-y chéri, dis « Maaaa-man »/Il me rend folle à m’appeller tout le temps ! /C’est quand déjà, la dernière fois qu’il nous a appelés ?
- Va réfléchir dans ta chambre/Tu veux pas sortir de ta grotte ? Ça sent le fennec !
- Vivement qu’il s’habille tout seul/Wow, ta tenue pique un peu les yeux ma chérie
- Vivement qu’il parle/Mais il ne se tait donc jamais, où est le bouton off ?
- Oui mon amour, moi aussi je t’aime, mais ça fait 45 min que tu me fais des câlins et des bisous, et maman a autre chose à faire/C’était en quelle année, son dernier câlin et son dernier « je t’aime » ?
- Range tes jouets ! /Tu ne veux pas lâcher ton jeu vidéo pour faire un jeu de société ?
- Pitié, arrête de te changer trois fois par jour/C’est quand la dernière fois que tu t’es changé ?
- Ça suffit, le bain, on sort maintenant ! /Ta dernière douche, c’était quand ?
- Tu vois bien que je suis occupée ! /Ça te dirait pas qu’on fasse un truc ensemble ? /Tu ne voudrais pas venir déjeuner le mois prochain ?
- Ça ira mieux plus tard/C’était mieux avant
Le paradoxe est là, chère Fabuleuse, à espérer mieux pour plus tard en regrettant le passé, tout en oubliant de profiter de l’instant présent.
Parce que, à moins d’événement perturbateur majeur dans ta vie, ce n’était pas mieux avant et ce ne sera pas mieux plus tard. C’était, c’est et ce sera différent. Chaque saison de vie nous apporte son lot de joies et son lot de tartines de merde.
Avant eux, nous étions libres mais incomplètes.
Puis ils dépendent de nous pendant un temps qui paraît long mais qui passe finalement si vite. Nous apprenons à être mère.
Ensuite, l’adolescence vient marquer la fin d’une époque. Ils nous aiment toujours mais différemment. Ils montrent leur désir d’indépendance et nous préparent à la suite. On peut se trouver fort démuni devant ce nouveau temps libre.
Finalement, ils quittent le nid. Nous voilà de nouveau plus disponibles, mais nous avons changé. Le temps pour soi tant espéré se voit habité par l’inquiétude pour nos « petits » plus si petits et par l’envie féroce de les voir et de les savoir heureux.
Nous grandissons avec eux et grâce à eux.
Pour les jours où tu as hâte qu’ils s’en aillent, pour les jours où tu regrettes les câlins d’autrefois… chère Fabuleuse, offre-toi le luxe de t’arrêter.
Oui, arrête-toi et regarde autour de toi. Tu es à l’endroit et au moment précis où tu dois être.
Pars à la recherche des trésors qui te sont offerts ici et maintenant. Goûte le bonheur de pouvoir vivre tout ça.
Et répète cette phrase avec moi : « ah, je suis vraiment bien, là ».