« Pourquoi as-tu eu tes enfants si tôt ? Tu as gâché ta vie, non ? »
Ces mots, je les ai reçus comme un coup de poing en plein ventre. J’avais 29 ans, un bambin de deux ans sous le bras droit, un deuxième d’un an sous le bras gauche.
Avais-je eu mes enfants trop tôt ?
À 26 ans bien tapés — à quelques mois près, j’étais pile dans la moyenne française. Et est-ce que j’avais gâché ma vie, en ayant mes enfants ? J’ai dû faire des sacrifices, c’est vrai, sur le plan personnel et professionnel. Je courais de ma salle de classe à la crèche, forcément. Et je n’ai pas fait tous les road trips dont je rêvais avec l’homme de ma vie, étant rapidement embarquée dans l’aventure parentale.
Mais… avais-je pour autant gâché ma vie ?
La femme qui m’avait lancé cette phrase à la figure était grecque et avait eu son premier enfant vers 40 ans. Sa carrière de diplomate était lancée, sa vie bien installée. Il m’a fallu du temps pour comprendre (et digérer !) sa remarque. Pour elle, il y avait en quelque sorte la femme puis la mère. Elle ne comprenait pas que j’aie pu entrer dans la maternité avant d’avoir pleinement vécu mon expérience de femme. Mais moi, je n’avais pas l’intention de renoncer à l’une des dimensions de ma vie pour vivre l’autre. Je voulais être la femme et en même temps la mère !
Pourquoi l’entrée dans la maternité sonnerait-elle le glas de ma vie personnelle ?
J’ai trouvé réponse à ma question en lisant le livre Élisabeth Badinter, dont le titre en lui-même m’a sauté aux yeux : Le Conflit : la femme et la mère (2010). Elle y explique qu’à trop encourager et valoriser des modèles de maternité sacrificielle, selon lesquels on doit tout à ses enfants, on rend la maternité impossible. La révolution de la compréhension de ce qu’est un enfant, depuis les années 1990, a multiplié les injonctions et les devoirs envers eux et a considérablement alourdi les tâches maternelles.
Une fois qu’elle est mère, on attend de la femme qu’elle sacrifie tout à ses enfants.
Elle observe que cet idéal de la bonne mère conduit au « tout ou rien ». Cododo, allaitement à la demande, pas de garde d’enfant avant les 3 ans — sous peine d’être une « mauvaise mère » — ou rien. Face à ce modèle écrasant, de plus en plus de femmes repoussent l’heure de la maternité — on les appelle les post-poneuses, celles qui repoussent toujours à plus tard la maternité). D’autres refusent le sacrifice de soi — on nomme « child free » celles qui ont choisi délibérément de ne pas avoir d’enfant. C’est que « à trop charger la barque, elle coule », note Badinter.
Si l’on veut rendre possible la maternité, il ne faut sacrifier ni la femme ni la mère.
En réalité, je n’ai pas « gâché » ma vie en ayant mes enfants avant que ma vie personnelle et professionnelle soit totalement accomplie. Et même, je dirais qu’il y a en moi une urgence de déployer la femme, parce que je suis mère. Mes enfants me rappellent chaque jour que le temps file vite, que c’est maintenant qu’il faut vivre, et bien vivre. Le temps que je ne passe pas avec eux, je ne peux pas supporter de le consacrer à des choses qui n’en valent pas vraiment la peine. Avoir des enfants m’a appris à mieux travailler et à prioriser mes activités. Avoir des enfants m’a appris qu’il ne fallait pas toujours remettre à demain ce qui compte pour nous, car c’est aujourd’hui qu’il nous est donné de vivre.
Fort bien.
C’est très joli de dire qu’il faut être et mère et en même temps être femme, mais qu’est-ce que cela veut dire, concrètement ?
Comment concilier la femme et la mère ?
Trois dimensions de notre existence peuvent être cultivées pour ne pas oublier la femme en nous :
Les relations humaines (amicales, de couple)
Est-ce que parfois je prends le temps d’entretenir mes amitiés (ce qui peut aller du coup de fil au verre en terrasse, en passant par quelques jours sans enfants) ? Et mon couple ?
Le plan professionnel ou le développement de nos talents
Avoir des enfants nous invite à prioriser nos activités. Ils nous rappellent que le temps file et que la vie, c’est maintenant ! Qu’est-ce que je rêverai d’accomplir dans ma vie ? Qu’est-ce qui m’en empêche ?
Le plan du développement personnel, du déploiement de ma personnalité
Qu’est-ce qui me fait du bien et qu’est-ce que j’aimerais faire tous les jours ? Quelle activité aimerais-je reprendre, ou commencer ?
Bien sûr, parfois la vie de mère suppose des sacrifices. Nos enfants ont besoin de nous, à certains moments de leur vie plus qu’à d’autres. Mais n’oublions pas aussi, tout en étant mère, de déployer la femme en nous. Pour ne pas devoir choisir entre mère et femme ni être l’une puis l’autre.
Et toi, chère Fabuleuse, comment parviens-tu à faire coexister la femme et la mère en toi ? Si tu veux des petites piqures quotidiennes pour te rappeler à quel point tu es fabuleuse, je te propose de t’inscrire gratuitement ici 🙂