« Imparfaite, généreuse, un p’tit peu râleuse. Et discrète, chaleureuse, un p’tit peu anxieuse. »
On se reconnaît bien dans ces mots désormais cultes pour les Fabuleuses 😀
Pour ma part j’ajouterais « aimante, souriante », sans oublier « souvent en colère et impatiente » !
Par contre, ce que je ne veux pas ajouter dans la liste de mes qualificatifs de maman, c’est « indispensable ».
Non, définitivement, ça, je ne veux pas l’être.
Et pourtant, combien de fois j’ai l’impression que c’est le cas ! Combien de fois, en voyant les réactions de mes enfants, j’ai le sentiment que je suis indispensable, que je suis la seule à pouvoir répondre à leurs besoins (selon eux en tout cas).
C’est une de ces réalités de maman qui m’est la plus difficile à vivre… Ça m’oppresse, ça me donne l’impression d’étouffer.
Quand ma fille de trois ans et demi crie « non c’est mamaaaaan ! »
dès que son papa s’approche pour mettre de la confiture sur sa tartine, pour enfiler ses chaussures ou pour attacher la ceinture de sécurité, et qu’on est sûrs que s’il le fait quand même c’est grosses larmes et cris assurées pendant loooongtemps. À ce moment-là on se demande : est-ce que j’ai plus la force de venir faire moi-même ou de gérer l’émotion intense qui menace d’exploser ? (Spoiler : la plupart du temps, je m’en occupe.)
Quand mon fils d’un ans pleure dans les bras de papa et qu’il s’arrête dès qu’il est dans les miens (et non, ce n’est pas juste quand il a faim et qu’il veut téter).
Quand je suis seule avec les deux et que je dois tantôt m’occuper de la grande en faisant des puzzles ou en lisant des livres, sinon j’ai droit à des « mais y a personne qui s’occupe de mouââââââ !! », tout en cherchant à intéresser le petit avec des jouets autres que lesdites pièces de puzzle, pour éviter le déclenchement de larmes et cris généralisés. Tout cela en pensant au repas à préparer et à la lessive à étendre, bien sûr.
Sans parler de quand ils sont malades, où c’est juste maman. Pour tout. Point.
Vous me direz sûrement que je dois poser mes limites, que c’est à moi de leur apprendre à se passer de moi, à s’occuper seuls, à accepter les autres. Certes. Merci bien, mais non merci, ça ne m’aide pas. Je connais bien ma réalité, je sais que ce n’est pas aussi facile que ça. Sinon je l’aurais fait depuis longtemps, croyez-moi.
Pourtant, je sais bien que je ne suis pas indispensable, qu’ils peuvent faire sans moi.
C’est bien pour ça que je parle de sentiment d’être indispensable et non pas de l’être tout simplement.
Ce sentiment, je le connaissais déjà avant d’être maman.
C’est quelque chose que je vis dans mon travail : en tant que pasteure, l’essentiel de mon job consiste à créer du lien, en l’occurrence avec des jeunes. Et quand on est en lien, on ne peut pas passer la main à quelqu’un d’autre si facilement. Quand il s’agit de créer des projets après avoir créé une relation de confiance, c’est difficile de laisser ça à quelqu’un d’autre quand, par exemple, on part en congé maternité.
Quand j’ai réalisé ça, et surtout quand j’ai réalisé que c’était difficile à vivre pour moi, j’ai pu poser des mots dessus pour comprendre et avancer : non, je ne suis pas indispensable, on peut se passer de moi, je suis remplaçable. Par contre, c’est vrai aussi que je ne suis pas facilement remplaçable.
Ce ne sera pas pareil avec quelqu’un d’autre, mais ce sera.
Il y aura des difficultés en plus pour les autres (reprendre le projet, se l’approprier, créer des liens), et pour moi (dur dur de renoncer à ce que j’aime parce que je suis trop mal à cause de la grossesse !!). Mais il y aura aussi de nouvelles possibilités, une place laissée à d’autres, une autre dynamique, tout ce qui aurait été plus compliqué si j’étais restée.
Le passage par ce que j’ai vécu dans mon travail m’a permis de comprendre que, si c’est difficile pour mes enfants de ne pas être avec moi, c’est parce que là aussi il est question de lien. Nous sommes en lien, je suis le lien premier avec chacun de mes enfants. Et un lien, par définition, est unique.
Du coup c’est pareil : je ne suis pas indispensable pour mes enfants, mais je ne suis pas facilement remplaçable.
C’est tout à fait possible pour d’autres personnes, et en particulier mon Fabuleux, de s’occuper de nos enfants et de vivre avec eux de super aventures. A priori tout le monde aurait préféré que je sois là, mais c’est aussi possible que je ne le sois pas.
Déjà ce premier constat me fait énormément de bien ! Il vient apaiser mon sentiment d’être indispensable, et vient lui rappeler que ce n’est justement qu’un sentiment. Fort, éprouvant, à prendre en compte, mais un sentiment et non une réalité.
Par contre, ce qui est une réalité, c’est qu’il n’est pas possible que je sois là ET que je sois dispensable. Si je suis là, impossible pour mes enfants (et moi, je l’avoue) de trouver une autre manière de faire : on fait comme d’habitude et comme c’est le plus simple, c’est-à-dire qu’on fait avec maman.
Pour pouvoir être vraiment dispensable, pour que je n’aie pas le sentiment d’être la seule à pouvoir répondre à leurs besoins, il faut que je parte.
Simplement. Que je laisse la place.
Ainsi, la dynamique est différente pour tout le monde, et mon absence ne se fait pas tellement ressentir (ou en tout cas pas sur le moment, on ne parlera pas ici des effets de l’absence quand je suis de retour…).
Voilà le deuxième constat que j’ai fait il y a quelques temps : quand je me sens submergée, que j’ai besoin d’espace pour moi, il faut que je parte, que je m’isole, que je passe le relai à quelqu’un d’autre et que je ne sois physiquement pas là.
Je le sais, mais j’avoue tout de même que c’est dur de partir ! Disons, quand je suis au travail ou que je vois des amies, ça va, c’est prévu, je quitte la maison et je vais ailleurs. Mais quand il s’agit de “simplement” s’extraire d’une situation engluante à la maison, c’est plus compliqué pour moi. Déjà, il faut que ce soit concrètement possible, qu’il y ait une personne à qui passer le relais, ce qui n’est pas toujours le cas.
Mais même comme ça, si mon Fabuleux est là par exemple, ce n’est pas si facile pour moi de partir.
Parfois mon Fabuleux me dit : « Mais va ailleurs là, va dans ta chambre un moment, tu te fais rouler dessus par les enfants mais tu es tellement crevée que tu n’arrives plus à mettre des limites, alors pars. »
Sur le moment, c’est très difficile à entendre, même si je sais qu’il a raison… Et j’ai mis du temps avant de vraiment le faire. Mais à chaque fois que je l’ai fait, quel bien ça a fait aux autres, et surtout à moi (ne pas être touchée ou appelée par un enfant pendant au moins 10min, le bonheur !!!).
Je suis reconnaissante envers mon Fabuleux de m’aider dans ces moments-là, quand moi-même je n’arrive pas à réaliser que c’est trop. Il faut dire aussi que pour lui ce n’est pas agréable d’être toujours (ou presque) le deuxième porte-avion. Quand je ne suis pas là, il passe en premier, il a de la place et il peut en profiter pleinement. Quand je ne suis pas là, ils peuvent trouver une manière de faire sans moi, de me remplacer. Même si ce n’est pas forcément facile, ils le font, et ça se passe bien.
Et quand je reviendrai, que ce soit 15 minutes après, une journée ou même un week-end plus tard, j’aurai récupéré de l’énergie et de la joie, et nous pourrons tous ensemble nous réjouir de nos retrouvailles 😉